Des mecs, billets à la main, cherchent acheteurs. D’autres, les mains vides, cherchent des places. On trouve de tout devant l’Olympia. Un vendeur de sandwiches rôde par-là, tentant désespérément d’écouler ses « jambon-fromage à quatre euros ». Les fameuses lettres lumineuses annoncent « GRAND CORPS MALADE ». Du slam. Certains sont venus ce jeudi soir pour découvrir un univers. C’est le cas de Eljida, la quarantaine, « qui ne le connaît que de nom ».

La sonnerie qui annonce le début du spectacle retentit dans les couloirs à la moquette rouge. Le bar se vide, les gens prennent placent, les ouvreuses encaissent. Il est 21h15, Grand Corps Malade s’avance. Les percussions font sursauter dès la première seconde. L’orchestre se met à jouer et la grosse voix rauque du poète commence à déclamer. Ici, sur la mythique scène, il y a cinquante ans, l’excellentissime môme Piaf, s’avançait, faisant craquer le parquet sous ses petits pas, et se mettaient à chanter.

En 2008, pour la première fois dans le célèbre music-hall, place au slam. Impossible de donner la moyenne d’âge du public venu en masse. Une poignée d’octogénaires, quelques sexagénaires, une ribambelle de quinquagénaires. Tous sont là pour l’applaudir. Fabien Marceau, grand, filiforme, une béquille pour l’aider à se déplacer entame son récital. Parfois, a capella et souvent en musique, les textes s’enchaînent.

L’homme raconte son quotidien mais aussi sa première soirée slam, « un soir d’octobre 2003 ». L’homme décrit sa ville, Saint-Denis, et son marché où « tu prendras des odeurs plein l’zen » (au plus grand bonheur des Dyonnisiens présents). Mais l’homme sait aussi être plus romantique. Ah, enfin un homme qui sait parler à sa femme, « la fée qui a des yeux même pas homologués ». Les oreilles sont grandes ouvertes, certaines paupières se ferment pour profiter de la douceur de la mélodie et de la poésie. Parce qu’après tout, c’est de la poésie, non ? Sans doute que oui, « mais ce n’est pas du rap, car les slameurs vont à l’école, eux », s’amusait le comte de Bouberbala, l’humoriste en première partie.

A chaque fin de texte, littéralement ébloui par la verve du Monsieur, on applaudit frénétiquement. Jusqu’à interrompre l’artiste, qui ne se laisse pas déstabilise pour autant. Le garçon a l’habitude des félicitations. Mais, tout en interprétant les titres de son premier disque, « Midi20 », et de son second, le nouveau « Enfant de la ville », Grand Corps Malade profite aussi de ce moment unique. Seul face à cette salle comble. Seul face à une salle debout, à la fin du concert. Il se dit fier. Fier d’être là, fier de « voir ses textes au bac français ».

A la sortie, les mots se mêlent et l’émotion est toujours présente. Regarde, cette dame a même les larmes aux yeux. Nous n’avons alors qu’une envie, prendre la plume. Un peu par devoir, nous nous mettons en quête d’avis critiques sur le spectacle, mais rien ! Ce ne sont qu’éloges. Revoilà Eljida. La dame, de Saint-Denis justement, retient le « message d’humanisme » mais regrette le morceau avec le rappeur Oxomo Puccino, invité sur scène. Et à propos de la star de la soirée : « Il a de l’avenir à condition d’avoir toujours autant d’inspiration ». Bravo l’artiste !

Mehdi Meklat et Badroudine Said Abdallah

Grand Corps Malade est en tourné dans toute la France jusqu’en 2009.

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