Marie-Françoise Colombani serait fan du Bondy Blog. Cette surprenante rumeur pouvait facilement se vérifier en participant à l’Ecole du blog, le samedi 12 décembre. La célèbre journaliste du magazine Elle devait venir donner un cours sur une de ses spécialités, l’éditorial. On verrait bien. Pour l’occasion, la salle de réunion de rédaction du mardi s’est transformée en salle de conférence. Après l’installation de la trentaine de participants et une rapide présentation, Marie-Françoise Colombani (au centre de la photo) ne perd pas de temps et attaque bille en tête.

La couleur chaude de son bandeau dans les cheveux assorti à son pull fait ressortir son regard clair. Le débit de sa voix est rapide. On imagine en écoutant ses paroles une « executive woman » à l’agenda aussi chargé que celui d’un ministre à la condition féminine avec une vie au pas de course. « Un édito, ça déclenche les passions. On ne reçoit jamais de compliments mais les critiques… énormément. C’est très engageant. Mon éditorial sur l’affaire Polanski est celui qui a déclenché le plus de réactions… On est aussi jugé par ses pairs. »

Puis, viennent les conseils techniques. Les stylos des blogueurs grattent sur les blocs-notes que dans un édito réussi, il faut une bonne attaque, une bonne chute, être ancré dans l’actualité mais surtout, surtout, n’avoir qu’une seule idée punchy à dérouler et pas une de plus, pour ne pas se disperser. « Et n’oubliez-pas que les meilleurs éditos, on les fait avec les tripes, on s’investit, on donne de soi-même », convainc la rédactrice.

Elle livre aussi à son auditoire très attentif ses secrets de fabrication avec parfois ses doutes et ses galères : « Je me lève très tôt et je travaille entre 5 heures et 10 heures du matin pour être tranquille. Ce qui est terrible, c’est les éditos prévus pour la période de Noël, le jour de l’An, ou l’été. C’est l’horreur. Et tant que vous n’avez pas l’idée, vous ne pensez qu’à ça. Si le papier est à rendre pour le lundi, vous n’imaginez pas le week-end de merde qu’on peut passer… »

Marie-Françoise Colombani évoque les débats internes parfois très vifs et passionnés à la rédaction de cette « bible » de la presse française. Car Elle est bien plus qu’un magazine féminin. Engagé dans la lutte pour les droits des femmes depuis 40 ans, il lui arrive de provoquer les débats de société comme celui sur la parité, les mères-porteuses ou le port du voile pour les mineures scolarisées.

L’heure tourne, place à l’exercice pratique. Rédiger un édito en 1500 signes qu’il faudra lire à haute-voix. « Tout le monde a une idée, c’est bon ? » Faïza répond qu’elle n’en a pas. « Mais, vous êtes la Faïza de la photo avec le grand chapeau ? » La journaliste la taquine gentiment en lui disant qu’elle n’a qu’à reprendre une des nombreuses idées de sa chronique. Elle appellera d’autres blogueurs par leur prénom : Medhi, Widad, Idir… Non seulement elle connaît ses interlocuteurs mais aussi leur plume et leurs textes. Le doute est levé : Marie-Françoise Colombani est bel et bien une lectrice assidue du Bondy Blog.

Une heure plus tard, la séance de lecture commence. Le sommet de Copenhague, Noël, le lip dub de l’UMP, Johnny Halliday forment la matière principale des éditos choisis. L’éditorialiste professionnelle félicite et critique. Pas de langue de bois mais de la critique utile et constructive pour guider les apprentis journalistes. Beatriz, une étudiante madrilène tout juste débarquée à Paris récite le premier texte en langue française de sa future carrière de journaliste. Abel, un monsieur qui a découvert le Bondy Blog la veille en surfant sur le net et qui est venu voir ce qu’était cette drôle d’école, n’ose pas se lancer. Sous les encouragements, il accepte finalement de déclamer son récit sur l’enseignement de l’histoire en terminale.

Quant aux trois collégiennes qui ont écrit un papier à six mains, elles donneraient presque des idées à Marie-Françoise pour son propre édito de Noël. Après la lecture, il est déjà temps de se quitter. Antoine donne les dernières consignes : « Je veux tous les textes pour demain 10 heures. Vous les retravaillez en suivant les conseils de Marie-Françoise et vous me les envoyer. ».

Une photo de groupe clôt la rencontre. Ces (bons) moments passent toujours trop vite : surtout quand la classe et la manière sont au rendez-vous. Car l’Ecole du blog a beau être associative et gratuite, le cours donné ce matin-là était de qualité. Une énième université populaire à Bondy ? Non. Juste une master class en toute simplicité.

Sandrine Dionys


Et maintenant, les éditos

Non, Johnny ne peut pas mourir

Johnny ne peut pas mourir. Pas maintenant, pas comme ça. Pas en pleine montée de la grogne sociale. Si le French Elvis comme l’appellent les Américains décédait demain, on peut parier qu’on ne passerait pas loin du décret officiel de deuil national. Qu’on adore ou qu’on déteste, Johnny fait partie du patrimoine populaire français. Vedette numéro 1 de l’Hexagone, proche de la droite, sa disparition soudaine provoquerait un tsunami médiatique qui recouvrirait en une seconde l’ensemble des mauvais indicateurs économiques et sociaux du pays comme de minuscules grains de sables.

Le président de la République très affecté par la perte d’un ami si cher, recevrait d’emblée l’empathie d’un grand nombre de Français eux aussi accablés par cette terrible nouvelle. Des larmes sincères à des obsèques peut-être nationales ne pourraient que « revitaminer » les chiffres en berne des sondages sur la popularité du chef de l’Etat. Et la sonnette d’alarme que tirent les associations comme Caritas ou les Restos du cœur sur l’augmentation et l’installation de la pauvreté en France, que pèserait-elle médiatiquement face à la mort de l’idole des jeunes ? Rien. C’est Johnny, quand-même ! Étonnamment, la gauche risquerait de pâtir du décès anticipé de l’exilé fiscal le plus célèbre de France et du rouleau compresseur informationnel qui l’accompagnerait.

A trois mois des élections régionales, non, décidément, Johnny, ce n’est pas un bon moment pour partir. Alors longue vie à toi et attends au moins 2043 pour mourir paisiblement dans ton sommeil et voir les portes du pénitencier des célébrités célestes enfin se refermer.

Sandrine Dionys

Lettre à Johnny

Malgré les liftings qui te font paraître plus jeune qu’il y a dix ans et que peu à peu tu as les yeux aussi bridés que tes filles, on oublie que tu n’es pas un surhomme. Depuis que tu as été plongé à deux reprises dans un coma artificiel, le monde, enfin la France, tremble. Bien sûr, tu devrais survivre, tu es hospitalisé au Cedars Sinaï, la clinique des stars à Los Angeles, plus classe que l’hôpital de Berck, quand même. Après l’évasion fiscale, l’évasion médicale. Allez, Johnny, avoue, c’est une mise en scène, tout ça pour échapper aux sbires d’Eric Woerth qui traquent les dissidents du fisc.

Allez, reviens à Gstaad, c’est bientôt Noël, tu auras de la compagnie avec Polanski. Peut-être même qu’en désespoir de cause, il te fera tourner dans l’un de ses films. D’accord, ton jeu d’acteur n’est peut-être pas à la hauteur. Joue la carte « je suis malade », peut-être que le cinéaste reconsidèrera ton talent, et verra que les spots Optic 2000 sont une vraie performance d’acteur.

Que dire de cette France qui se sentira orpheline si jamais le pire se produisait ? On savait que tu étais un bad boy avec tes incitations à la pyromanie dans ton célébrissime « Allumez le feu », désormais tes fans t’emboîtent le pas. Fébriles, ils avaient besoin de se défouler. Ton chirurgien en a fait les frais. Quel bel élan de solidarité, lui aussi, grâce à toi, il va connaître les joies de l’hôpital. `

Accroche-toi, Johnny, le président est ton plus grand fan. Imagine le désespoir au sommet de l’Etat. Ce n’est pas Carla Bruni qui pourra te ravir ton statut d’idole nationale. Et ce même si vous partagez le même amour de la chirurgie esthétique.

Faïza Zerouala

D’autres éditos à venir, dans un prochain post.

Sandrine Dionys

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