SAMEDI. Je suis allée voir un film d’horreur. Quelque chose d’horrible avec des scènes traumatisantes, des créatures monstrueuses. Sans parler du sujet du film, une fête, la Saint-Valentin. D’après mes sources, ce serait la fête des amoureux. Ce concept dont je n’ai jamais entendu parler doit venir d’un monde merveilleux où l’amour est roi, à l’image du wonderful world chanté par les jeunes de l’UMP.

En fait je suis allée voir un film de filles, avec pleins d’histoires d’amour qui se terminent bien, des couples sans surcharges pondérales et boutons sur la figure. C’est sponsorisé par Christian Louboutin, le créateur des fameux escarpins à semelles rouges à one million dollars. Toutes les filles sont juchées sur ces vertigineux talons, un véritable appel à la cheville cassée.

Aller voir ça avec une amie, elle aussi célibataire, c’est aussi incongru que d’organiser une réunion des Alcooliques anonymes dans un bar. Les acteurs de « Valentine’s Day », l’œuvre dont je vous parle, n’étaient pas du tout monstrueux. Comme par hasard, le beau-gosse ultime a développé une allergie au tee-shirt. Quel spectacle désagréable que cet étalage de muscles et de tablettes de chocolat parfaitement dessinées. Si désagréable que j’aurais même aimé jouer dans le film, mais d’après certaines personnes de mon entourage, sûrement des aigris, je n’ai aucun talent de comédienne. Certes, certaines scènes auraient surement requis des répétitions approfondies histoire de bien rentrer dans le personnage. Je n’aurais pas eu de mal à rentrer dans l’un des personnages féminins, une accro au sucre, célibataire endurcie, qui déteste la Saint-Valentin.

DIMANCHE. La communication par la parole c’est has been. Chez moi, ce n’est pas un tripot clandestin mais plutôt un taxiphone. Maintenant que nous sommes tous iphonisés ou blackberrysés, impossible de décrocher de la vie numérique. On est tous des drogués d’Internet. Alors que je discute au téléphone avec une copine, je regarde autour de moi. Dans le salon, tout le monde est hypnotisé par son écran, comme un ado qui découvre sur son ordinateur des filles dévêtues pour la première fois. Personne ne se parle de vive voix, le seul bruit dans la pièce c’est celui des touches lorsqu’on pianote sur le clavier.

De temps en temps, pour se dire quelque chose, on s’envoie un sms alors qu’on est dans la même pièce. « Ramène un verre d’eau stp », ça va plus vite de l’écrire que de se lever. Ça fait peur je sais. Mais maintenant qu’on a tous les SMS illimités et le pouce aussi musclé qu’un champion du monde de bras de fer chinois, faut bien que cela serve. L’exemple vient d’en haut. A l’Elysée réside le plus grand des junkies, notre maître à tous sms-addict. D’ailleurs en 2012, si on pouvait envoyer des sms comme dans les télés-réalité, ça serait plus marrant. Pour que Nicolas Sarkozy arrête la politique taper 1, pour que Nicolas Sarkozy arrête la politique taper 2. J’hésite entre le 1 et le 2.

LUNDI. C’est dommage, cette histoire de tempête Xynthia (mais que fait la Haute Autorité de lutte conte les prénoms ridicules?). Elle a tout ravagé sur son passage comme un invité indésirable qui aurait englouti tout le repas. Le problème, c’est que les sinistrés vont avoir du mal à nettoyer les dégâts. On m’a toujours dit que les immigrés étaient venus en France pour réparer et nettoyer la France après la guerre. Eh bien, justement, aujourd’hui, c’est la journée sans immigrés. Non, cette opération n’est pas une ode au chômage ou à l’inactivité. Quoique, si c’est ça le concept, je peux participer et même gagner. Pour la peine, je fais grève aussi et je ne vais pas plus loin.

MARDI. Je vais finir par énerver Nadine Morano avec mes multiples casquettes. Encore heureux qu’elles ne soient pas à l’envers… C’est les vacances scolaires et l’occasion pour moi de vérifier si je n’ai pas raté ma vocation de prof. Instit’ en l’occurrence. L’élève c’est mon neveu. Un peu réfractaire à l’école, footballeur en puissance. S’il devient professionnel, je préfère qu’il sache s’exprimer correctement parce que vu le niveau intellectuel de certains, on peut conclure que c’est vrai que faire des têtes ça détruit les neurones. Quand je vois David Trézéguet, je bave. Mais dès que je l’entends parler, ça se gâte. J’ai juste envie d’hurler : « Tais-toi, laisse-moi être la tête pensante du couple. »

Donc j’ai décidé de faire une dictée. Mon neveu me rend son travail. Perfide comme je suis, je m’attendais à pire. Sa copie est conceptuelle. Albert Cohen, dans son chef-d’œuvre « Belle du Seigneur », écrit des pages et des pages sans ponctuation. Mon neveu, lui, a préféré faire un génocide des accents. Quelques fautes m’ont agressé les yeux. Le petit filou a essayé quand même de m’arnaquer en inventant des lettres. En cas d’hésitation entre le « m » et le « n », faire un gribouillage hybride. Il me soutient qu’au collège, le prof compte juste ces fautes.

Je crois qu’à force de me shooter à l’odeur du feutre rouge, j’ai la tête qui tourne. Je m’emballe sur les corrections. Sa copie au gamin, c’était la fête du stylo rouge. Tant et si bien qu’il était traumatisé. J’aurais dû faire comme en prison et lui confisquer son téléphone, j’ai été bien laxiste. Ce petit traître a envoyé un SMS-SOS à sa mère : « Au secours, Faïza est méchante avec moi. C’est Guantanamo. » Rien n’est perdu, il fait quelques fautes d’orthographe mais au moins il a de la culture générale.

MERCREDI. Une semaine ne serait pas une vraie semaine sans mission kamikaze. Bizarrement, le plan galère émane toujours de la même personne. Starsky et Hutch ont Huggy les bons tuyaux, moi j’ai ma-sœur-aux-plans-foireux. Donc, ma dorénavant célèbre sœur a voulu qu’on fasse un remake de « Cocktail », le film avec Tom Cruise. Elle a eu la brillante idée de confectionner un punch pour ses collègues pour son pot de départ. Je ne cautionne pas cette idée tordue sachant que ni elle ni moi ne buvons de l’alcool.

Tout ça se fera donc à l’aveugle. Nous avons une recette sous les yeux avec les proportions idéales. On mélange les ingrédients consciencieusement. La partie rhum est venue corser les choses. Les vapeurs qui s’échappent du saladier m’ont dissuadée à vie de succomber à la tentation de la boisson. N’est pas Sue Ellen qui veut.

On rajoute du sucre, en oubliant que j’en avais déjà ajouté au début. Le goût de l’alcool sera masqué par le sucre. Les collègues risquent de se soûler à l’insu de leur plein gré. Sans scrupules, je me dis que ça les déridera un peu, à la banque… Transvaser ce liquide sans entonnoir, sinon il n’y a pas de défi, dans les bouteilles a été une aventure périlleuse. A force d’en verser à côté (et surtout par terre), le chien a voulu se mettre à la mode des Antilles. Et a allégrement lapé la flaque de punch. Elle était toute sage après. Note pour plus tard, voir si ça marche sur les enfants aussi. Comme ça, à la prochaine dictée, ça filera droit.

La leçon de cette aventure proto-éthylique, c’est qu’on peut n’avoir aucune compétence préalable et réussir une mission. Ceci ne s’applique pas à Raymond Domenech, parce que lui c’est vraiment un indécrottable incompétent.

JEUDI. Je ne serais jamais mannequin ni top-modèle. Je ne devrais pas l’annoncer aussi abruptement pour éviter une vague de suicides parmi les lecteurs masculins du Bondy Blog. Aujourd’hui, j’ai eu l’occasion d’expérimenter la séance photo avec Widad. Même que le photographe avait un vrai appareil photo et non pas un iPhone et qu’il ne faisait partie de la famille d’aucune de nous deux.

On a été dociles et souriantes. Sourire sur commande pendant une demi-heure en faisant semblant de n’avoir pas froid, sans claquer des dents, ce n’est pas si évident. Regarder dans le vague sans avoir l’air idiote l’est encore moins. Même si on est en plein Salon de l’Agriculture, l’œil bovin, y’ a plus sexy. Ce qui est dommage quand même, c’est qu’avec Widad, l’air de rien, on avait mis des vêtements qui nous mettaient en valeur. Finalement, ne voulant pas faire les kamikazes du froid, on a gardé nos manteaux. Widad avait son imper façon inspecteur Columbo, mais elle n’a pas fait comme les pervers des parcs, elle avait mis quelque chose dessous. Et elle a surtout pris la mission à cœur.

C’est dans ces moments-là qu’on regrette s’être moqué des Miss France. Widad a pris goût à l’exercice. Elle s’est alors mise en tête de remplacer Malika Ménard, Miss France 2010. Sa justification ? Miss France veut devenir journaliste. La guerre est déclarée. Si Malika veut piquer la carrière de Widad, ma chère collègue ne se laissera pas faire. Et veut faire des photos comme Malika. Elle oublie juste qu’elle n’a pas quinze ans, qu’elle n’est pas russe et ne pèse pas 32 kilos ni mesure 2 mètres 18. Mais à part ces détails, elle a toute ses chances. Elle a sûrement raison, mannequin, ça mène à tout

Je vais alors peut-être reconsidérer mon choix. En revanche épouser Nicolas Sarkozy je ne suis pas sûre que cela figure dans mes projets immédiats. Je peux accepter à la condition qu’on ne communique que par sms.

VENDREDI. Les chiffres sont tombés. En France, il y a 2,7 millions de chômeurs. Pour eux toute l’année est une journée sans immigrés. Le refus de toute activité économique c’est facile quand on le pouvoir d’achat d’un Zimbabwéen. Ces 2,7 millions de chômeurs seront rejoints par Raymond Domenech. Le sélectionneur masochiste de l’équipe de France, qui va bientôt devoir porter une armure anti-insultes, a encore été mis en cause pour ces compétences plus que contestables. La secrétaire d’Etat aux sports, Rama Yade a même déclaré qu’il aurait dû être gentiment poussé vers la sortie après l’énième fiasco de l’Euro, en Suisse-Autriche. Et niveau incompétence sportive, Rama, elle s’y connaît.

Va juste falloir trouver une reconversion Raymond. Je veux bien l’adopter et le prêter à ma sœur pour qu’il exécute les basses œuvres dont elle me charge souvent. Qu’il se console, après la Coupe du monde, quand il se fera virer, je pourrai l’aider à préparer son pot de départ, je suis devenue une pro du punch.

Faïza Zerouala

Faïza Zerouala

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