Un documentaire sur le « choc des cultures » intitulé Passe le périph’ d’abord, un titre accrocheur, des lycéens naturels ou parfois chiants. Le but : montrer la rencontre entre des ados de Paris et de banlieue dans le cadre d’un projet pédagogique commun à leur lycée. Le documentaire passe vite. Deux lieux symptomatiques : Alfred Nobel de Clichy-sous-Bois, et le lycée Jean Racine de Paris. L’objectif étant de reconstituer un procès d’assises afin de faire comprendre aux jeunes le fonctionnement de la justice française. Leur montrer aussi qu’on ne peut juger une personne sans connaître l’environnement dans lequel elle évolue. L’avocat le plus célèbre du 93, Jean-Pierre Mignard, est de la partie. Trois jeunes filles de chaque établissement participent à l’aventure, en passant chacune leur tour le périph’. Alison, élève de terminale ES au lycée Alfred Nobel va chez Alix, élève au lycée Jean Racine. Un peu simplet, mais il fallait y penser.

Elle est étonnée au premier abord de se balader dans les rues de Paris à minuit sans aucune peur au ventre mais comprend vite que le quartier ne craint pas autant que son Clichy. Elle suit son amie malgré tout. Wafae, la meilleure amie d’Alison se rend chez Carlotta, qui souffre qu’on la traite de « fille à papa » alors qu’au bout du compte, même son ami à la casquette à l’envers la voit ainsi. Ambiance chicha dans l’appart parisien, avec un magnum de Champagne en guise d’accompagnement. Le décor est planté. Wafae se rend alors vite compte que la notion d’argent n’est pas la même partout. Enfin, il y a Tania, 17 ans, élève en terminale STG à Jean Racine, d’origine portugaise qui elle se déplace à Pavillons-sous-Bois, chez les Deguene, au sein d’une famille très conviviale. Elle assiste a une fête de famille dans la pure tradition sénégalaise ce qui ne va pas pour lui déplaire.

Chez Carlotta la parisienne, Wafae la banlieusarde est assénée de questions lors d’un repas. « Tu as peur quand tu déplaces à Clichy ? » Insécurité trafics sont les maîtres mots à table. Wafae tente de prouver qu’il ne faut pas généraliser le fait. Pendant ce temps, Alison se régale de la vie parisienne qu’elle aimerait tant avoir : les discussions entres filles dans un bistrot, le « tout-à-dix-minutes-en-transports ». Elle avoue à Alix, aux boucles parfaites et aux yeux trop bleus : « quand je pourrais quitter le 93, j’le ferais. »

Paradoxe souligné à l’image, le lycée Jean Racine situé dans le 8e arrondissement n’est pas un grand château comme le pensionnat de Chavagne. Au contraire, le lycée est beaucoup plus petit et moins moderne qu’Alfred Nobel, situé dans le 93. Alors qu’à Racine au joue au jeu du baccalauréat en cours d’anglais, à Nobel, on corrige un exercice dans le bruit. Pour Tania, il est vrai que les élèves sont plus agités que sur Paris mais « ça n’enlève en rien leurs capacités intellectuelles. » Encore heureux. Si l’ambiance est moins agitée sur Paris, les élèves sont autant en difficulté qu’en banlieue.

Mise en exergue, cette rencontre entre deux mondes différents met en lumière la distance et la proximité entre des adolescentes séparée par le fameux périphérique. Les jeunes sont investis à fond dans leur rôle, ce qui n’est pas pour déplaire à l’organisateur de l’expérience. Même si le décalage n’est pas générationnel mais social, ces jeunes ont su prouver qu’en découvrant un peu le monde de l’autre, on pouvait créer de forts liens et être solidaires au point de se soutenir.

Jessica Fiscal

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