Lundi 10 décembre. UGC Ciné Cité Rosny. Centre Commercial Rosny 2. Le parking est rempli. Du monde devant les affiches de cinéma à l’entrée. Presque un lundi normal pour ce cinéma ouvert 365 jours par an et 7 jours sur 7. Ce soir, au programme, il y a une avant-première, et ça se voit vu le monde présent devant le cinéma. Ils sont pratiquement tous venus pour voir Omar Sy et certains pour assister à la projection spéciale de De l’Autre côté du Périph, le nouveau film de David Charhon avec Omar Sy et Laurent Lafitte sorti mercredi 19 décembre. Le film est projeté dans deux salles. Les acteurs sont présents. Pour ce cinéma de banlieue, recevoir les stars vedettes des films à l’affiche est devenu banal.  Encore plus pour ce film-là, qui comme son nom l’indique, se passe de l’autre côté du périph. Exactement comme ce cinéma du 9-3. Choc des cultures et des milieux sociaux, De l’Autre côté du Périph fait se télescoper deux mondes : celui d’Ousmane Diakité, policier de la section financière de Bobigny et celui de François Monge, capitaine de la police criminelle de Paris.

Le hall d’entrée du cinéma est bondé. Le tapis rouge a été placé à l’entrée. Les fans sont présents, les photographes également prêts à attendre toute l’équipe du film.  Tout comme eux, je patiente autour d’un bon chocolat viennois à la chantilly, une spécialité du comptoir où je me trouve, le Ciné-café. J’observe les clients présents dans le cinéma. Il y a de tout : des couples, des cinéphiles solitaires, des potes.

Le staff UGC s’active pour préparer l’avant-première du soir. Au fond du cinéma, responsables et personnels UGC commencent à mettre au point une sorte de carré VIP pour recevoir les acteurs du film ainsi que l’équipe de production. Ce soir, ce n’est rien comparé aux récentes avant-premières qu’a organisées l’établissement. Magali et Lamia, deux employées du site se sont transformées pour l’occasion en magnifiques hôtesses, derrière un buffet digne pour servir et accueillir toute l’équipe dans l’espace privé créé pour l’évènement. Cyril Mizrahi, chef d’équipe confiserie, s’occupe lui, d’immortaliser l’évènement, il accueille les journalistes et cadreurs qui arrivent au compte-gouttes.

Dès 20 heures, les bruits et les cris commencent à se faire entendre dès l’arrivée des acteurs. Les journalistes immortalisent l’évènement, les flashes fusent. « Omar, Omar, Omar……..On t’aime… » La grande star, ce soir, c’est lui, le chouchou de la banlieue. Et vu son sourire, il a l’air heureux d’être-là, se sent comme à la maison. Toute l’équipe est présente, y compris l’actrice Sabrina Ouazani. Ils se rendent dans le carré VIP, pour ensuite aller rendre visite aux spectateurs pour discuter avec eux avant le début de la projection. Dans la salle, c’est la folie. Tout le monde hurle. Spectateurs, amis et proches des acteurs. Chacun leur tour, ils se présentent et évoquent une anecdote du film. Omar Sy prend la parole pour répondre aux spectateurs qui lui crient leur amour.  » C’est moi qui vous kiffe ! J’espère que le film va vous plaire. C’est le premier film qu’on présente en banlieue. Et c’est pas un hasard si on a choisi que ce soit ici, attention vous êtes nos parrains. Si vous n’aimez pas le film, ben vous le gardez pour vous, en revanche si ça vous plaît, on compte sur vous pour le dire. » Omar Sy anime l’avant-première en faisant son show, des spectateurs lui demandent de faire ses imitations cultes du SAV. « Omar, tu viens plus aux soirées ? Non j’ai plus le temps » répond-il en rigolant.

Cyril Mizrahi, responsable, est aussi présent dans la salle. Il observe Omar en action, « C’est là qu’on voit qu’il a du talent, c’est un show qu’il nous fait, il est l’aise avec le public, il est à l’écoute. Le public de Rosny se sent proche d’acteurs comme lui. » Il y a même certains réalisateurs de films qui se rendent parfois à l’improviste pour faire des surprises aux spectateurs. C’est le cas de Djamel Bensalah, lors de la sortie de son dernier film, Beur sur la ville, avec  l’acteur Booder. Ils étaient venus présenter en avant-première le film à Rosny quelques jours avant la sortie nationale, avant de revenir à l’improviste le jour même de la sortie.

Dans l’ombre, le Monsieur cinéma du 9-3

Parmi toute cette foule, il y a un homme, vêtu d’un costume noir. Cet homme, c’est Olivier Févin, 42 ans et directeur du complexe-cinéma, le quatrième multiplex de France en terme de fréquentation (plus de deux millions de visiteurs par an. Olivier Févin n’est pas stressé du tout, pour lui c’est devenu un rituel. Car il n’en est pas à son coup d’essai : c’est lui qui avait déjà fait venir John Travolta en février 2010 pour la sortie du film From Paris With Love, La première grosse star américaine débarquée sous la direction d’Olivier. L’acteur avait été acclamé par des centaines de spectateurs ici-même. Si l’acteur s’est déplacé à Rosny-Sous-Bois, c’est que le tournage du film devait y avoir lieu. En octobre 2008, après l’incendie de dix voitures devant servir aux cascades et aux décors du film, produit par sa société Europacorp, Luc Besson avait annoncé aux habitants de Montfermeil, recrutés comme figurants, qu’il annulait le tournage. Le producteur considérait que les conditions de sécurité n’étaient pas réunies. Le tournage avait pourtant suscité un grand enthousiasme dans la ville et notamment dans le quartier difficile des Bosquets, où des scènes devaient être tournées. Celles-ci avaient finalement été tournées dans les Yvelines. Et c’est Olivier Févin, passionné du septième art, qui avait eu cette folle idée de faire venir les stars du box office international en banlieue parisienne. « La banlieue était principalement le public de ce film. C’était donc un juste retour des choses que de leur offrir le plaisir de pouvoir recevoir ces stars dans leur cinéma. Faire venir Travolta à Rosny a été mon premier grand coup« .

Une partie de ce travail s’est jouée au festival de Cannes. Chaque saison, ce directeur de cinéma y descend pour y faire des rencontres « Je n’ai pas lâché. A Cannes, chaque fois que je les croisais, je harcelais les distributeurs. » Après le succès de la venue de John Travolta à Rosny, Olivier a voulu monté la barre plus haut. A force de conviction et d’acharnement, il a su convaincre attachés de presse et dirigeants. Il a commencé par contacter le grand groupe américain Métropolitan, séduit par le coup de grâce d’un John Travolta en Seine-Saint-Denis. La tâche avec Metropolitan Film a été plus rude qu’avec EuropaCorp, qui distribuait le film de ce dernier. Il a fallu les relancer au festival de Cannes. C’est comme ça qu’il a réussi le coup de poker qui a propulsé son cinéma en plein cœur des médias en août 2010, lorsque Sylvester Stallone et Jason Statham sont venus présenter en avant-première mondiale le blockbuster The Expandables. « Je les ai harcelés pendant six long mois, je ne les ai pas lâchés et finalement on l’a fait ! «  se souvient Olivier Févin. Près de 3 000 personnes s’étaient déplacées pour voir en chair et en os les stars américaines.

Pour Olivier Févin, fan de la première heure de Stallone, c’était un rêve et un défi que de faire venir la star à Rosny. C’est aujourd’hui une fierté pour celui qui est arrivé à l’âge de 9 ans d’Arras (Pas-de-Calais) à Noisy-le-Sec (93).  En débutant en tant que simple agent d’accueil au sein de ce cinéma, il a monté les échelons et s’est formé un peu partout dans les complexes parisiens pour revenir à la tête de l’UGC de Rosny en juin 2009, en tant que directeur . Aujourd’hui, il n’a pas trop de mal à vendre sa Seine-Saint-Denis, département qui pâtit pourtant souvent d’une mauvaise image dans les sociétés de distribution parisiennes. Depuis, tout un gratin de stars est passé par ce cinéma : John Travolta, Jet Li, José Garcia, Jean Dujardin, Michael Youn, Ramzi, Leila Bekthi, Stallone, Jason Statham, Liam Neeson ou encore Dany Boon. Le complexe est devenu une sorte de croisette des banlieues. Des stars dans une croisette du 93 : « Ce n’est plus Rosny-sous-Bois, avec le cinéma UGC, c’est Hollywood-sous-Bois » plaisante le directeur su site.

Avec De l’Autre côté du Périph, c’est encore une avant-première réussie qui s’ajoute au palmarès d’UGC Rosny Sous Bois. Olivier Févin compte malgré tout surprendre davantage son public. « Le public de banlieue, c’est un public comme les autres, qui aime les films qu’aime le reste de la France. C’est normal de les faire venir en banlieue puisqu’une grande partie de leur public se trouve en banlieue. A chaque fois que j’ai organisé une avant-première, c’était la liesse. Il y a toujours du monde, toujours content. Beaucoup me remercient, et sincèrement avec tous les sites UGC que j’ai faits, c’est ici qu’il y a le meilleur accueil. » Quand on lui demande qui sera la prochaine vedette qui foulera ce tapis rouge autodidacte, Olivier sourit.  » Je ne peux rien dire pour le moment. Tout ce que je peux vous dire, c’est que c’est du lourd, c’est de la grosse star américaine… » Coming Soon.

Mohamed Mezerai

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