L’état des lieux de de l’Ecole en Seine-Saint-Denis est alarmant! Hier matin, enseignants, parents d’élèves et élus de Saint-Denis sont allés au Ministère de l’Education Nationale pour dénoncer le manque de moyens. Les inégalités flagrantes ne cessent de croître mais jusqu’à quand?!

CRSCRSLa colère s’accentue chez les professeurs de Seine-Saint-Denis. Pour dénoncer le manque de moyens, une délégation d’enseignants, de parents d’élèves et d’élus de Saint-Denis – dont le maire communiste Didier Paillard- s’est rendue en masse devant le ministère de l’éducation nationale hier matin. Ils souhaitaient remettre officiellement à Vincent Peillon un manifeste intitulé « L’égalité pour nos enfants ». En plein débat sur les rythmes scolaires, lancé par le ministre de l’Education nationale, se pose la question cruciale de l’inégalité des moyens alloués aux écoles. C’est sur ce point qu’insistent les professeurs qui sont venus réclamer hier matin plus de moyens pour « réduire les inégalités inhérentes à ce département ». Stupeur dans les rangs quand le groupe se rend compte qu’il est accueilli par une quinzaine de CRS. « Finalement, ils nous considèrent », ironise l’un des professeurs. « C’est à la hauteur de notre mobilisation », commente un autre. En effet, une quinzaine de CRS barrent la rue de Grenelle qui mène vers le ministère de l’éducation nationale.  Même le maire Didier Paillard doit user de négociation pour traverser le barrage. C’est donc accompagné d’un parent d’élève et d’une enseignante, que l’élu a pu remettre son manifeste. Déçu de ne pas voir été reçu par le ministre en personne,  Sid-Ali Lounis, parent d’élève, membre de la FCPE et  du collectif des parents d’élèves de Seine-Saint-Denis raconte : « un secrétaire nous a reçus devant le ministère pour recevoir nos 2000 premières signatures du manifeste.»

Cet accueil froid les a d’autant plus déçus qu’ils estiment avoir des revendications justes. Catherine Da Silva, enseignante aux Francs-Moisins, dresse un tableau noir de la situation : « A Saint-Denis, on est les premiers à subir les inégalités. On a 59 écoles dans la ville, on se bat depuis 2008 pour avoir des remplaçants. Sur une même journée, il peut y avoir jusqu’à 50 profs non remplacés, ce qui fait qu’au total près de 1200 élèves n’ont pas cours. C’est inadmissible! » Elle dénonce des inégalités territoriales « scandaleuses ». Sid-Ali Lounis surenchérit, pour lui, c’est maintenant qu’il faut agir, pour le bien-être de ces enfants fragilisés par l’absence des professeurs et le décrochage scolaire qui en découle : « Ce sont les citoyens de demain dont on parle, ou alors les élèves de Seine-Saint-Denis ne sont pas les citoyens de demain? Mais dans ce cas, il faut le dire! C’est pour ça qu’on est en colère! » Didier Paillard, maire de Saint-Denis partage le ressentiment des parents d’élèves : « La bataille sur l’école fédère parce qu’elle concerne nos enfants, et les gens modestes, leur seul bien, c’est leur enfant alors c’est crucial de parvenir à offrir à leurs enfants un enseignant par classe tous les jours».

Souad, qui accompagne la délégation en tant que parent d’élèves, a pu mesurer la différence de traitement entre les écoliers parisiens et dionysiens : « Ma fille a été scolarisée à Paris, aucun cours n’a jamais été manqué pour une absence de professeurs. D’ailleurs, l’école avait même prévu un planning avec les absences et les remplaçants prévus à l’avance. Mes fils, eux, sont scolarisés à Saint Denis, celui qui est en CM1 n’a eu cette année que des remplaçants et a connu des périodes de 3 semaines sans cours! » Souad a tenu à être présente aujourd’hui car elle ne comprend pas dit-elle « Pourquoi un enfant de Paris a-t-il plus de valeur qu’un enfant de Saint-Denis? C’est quoi le slogan de la République? Et ça c’est aussi une question de moyens. »

Didier Paillard regrette que le ministre d’un gouvernement socialiste ne prenne pas la mesure du malaise : « c’est un peu décevant de ne pas être reçu par le ministre, je ne sais pas s’il se rend bien compte de la gravité de la situation en Seine-Saint-Denis. On sait dans quel état se trouve l’éducation nationale après les années Sarkozy mais on veut un engagement ferme car les enfants ne peuvent pas attendre ».

En début d’après-midi, Bernard Lejeune conseiller de Vincent Peillon, reçoit une délégation réduite composée du maire, de l’un de ses adjoints Antoine Bussy, de 4 enseignants et de 2 parents d’élèves. « La délégation a été écoutée mais aucun engagement précis n’a été pris », explique l’adjoint du maire : «  Le ministère nous a fait comprendre que la dégradation de l’école ne touchait pas seulement la Seine-Saint-Denis et a pris en compte l’urgence des remplacements. » D’autant plus que la rue de Grenelle précise qu’il leur est difficile aujourd’hui d’aller plus vite en termes de recrutements, qui sont déjà prévus pour la rentrée 2013. « On est à la limite de ce qu’on est capable de faire en terme de ressources humaines et de concours », conclut le ministère.

Peu de changements donc, en ce qui concerne le plus jeune département de France, qui souffre aujourd’hui des conséquences des inégalités territoriales. En attendant des mesures fermes et concrètes dans l’éducation nationale, les professeurs de Saint-Denis, les élus ainsi que les parents d’élèves, restent mobilisés et espèrent que leur manifeste ne finira pas au fond d’une corbeille au ministère.

 

Widad Kefti

 

 

 

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