Sept semaines que certains salariés de l’usine PSA d’Aulnay-sous-Bois font grève. Hier, fin du mois, jour de paye : 260 000 euros à répartir entre tous les salariés grévistes. Somme récoltée durant leurs nombreuses actions et grâce aux dons. Et le mouvement continue…
Un froid glacial, un parking toujours aussi rempli, les va-et-vient des salariés à la sortie de l’usine, une journée banale. Pareil lors du changement d’équipe. Vers 14h, les bus stationnent dans le parking du constructeur automobile. Les employés descendent du bus, sortent leur badge et rentrent pour aller travailler, sauf que la chaîne ne tournera pas aujourd’hui, comme c’est le cas depuis sept semaines. On peine à croire que cette entreprise va vraiment fermer, vu de l’extérieur.
Hier, les salariés grévistes ont réussi à collecter 260 000 euros lors de leurs actions. Une somme qui satisfait Jean-Pierre Mercier, délégué syndical CGT : « on apporte la preuve que cette grève est populaire, c’est le résultat du soutien et de la solidarité des gens. » Le salaire versé grâce à cette collecte est proportionnel aux jours non travaillés. « Plus le salarié a fait grève, plus il est indemnisé. C’est 80 € pour une semaine de grève, 200€ pour deux semaines, 500€ pour trois semaines et 800 € pour quatre semaines », explique le syndicaliste.
Ces salaires devraient être complétés par une aide financière d’une dizaine de communes voisines. Cette somme qui avoisinerait les 100 000 euros sera reversée à l’association « Soutien aux salariés de l’automobile du 93 ». A titre d’exemple, la commune d’Aulnay-sous-Bois a voté lors de son dernier conseil municipal, l’octroi d’une subvention de 8 000 €. La ville de Tremblay-en-France participera à hauteur de 20 000 € et le conseil général de Seine-Saint-Denis a attribué 10 000 €.
800 €, pas vraiment suffisant pour boucler ses fins de mois ? « 1500 € c’est pas suffisant non plus ! », répond Ahmed Berrazzel, qui soutient le mouvement social depuis ses débuts.
La grève continue, les collectes aussi. Hier matin encore, des employés du constructeur automobile se sont mobilisés à Saint Lazare. En fin de matinée, ils ont pu récolter près de 2 000 €.
Retour à l’usine. Les salariés sortent au compte goutte, tracts à la main. Ils rangent précieusement leur chèque dans leur poche, dans leur sac. Parmi eux, un petit groupe : deux femmes et deux hommes, qui s’apprêtent à rentrer chez eux. « On est soudé entre grévistes, ce ne sont plus les syndicats qui se battent, ce sont plus les ouvriers. Maintenant notre priorité, c’est de renforcer le mouvement », explique l’une d’elle, 15 ans d’ancienneté et qui travaille en bout d’usine.
Pour d’autres, il faudra attendre pour avoir son salaire. C’est le cas de ces deux intérimaires qui soutiennent la grève : « on est payé le 12 du mois, va donc falloir attendre ». Grève ou pas, les intérimaires sont payés. Intérimaires ou pas, les employés viennent à l’heure, participent « au débriefing » et attendent (ou pas) la fin de la matinée ou de la soirée en fonction de l’horaire.
Le mouvement social est bien loin d’être terminé, toujours en grève, aucune date de reprise n’est envisagée. « On revendique toujours de véritables négociations », insiste Jean-Pierre Mercier. Quant aux discussions avec le gouvernement, elles sont « au point mort total ».
« L’Elysée nous avait promis un médiateur, on nous a envoyé un facilitateur. On va devoir forcer la main au gouvernement, d’autant que nous sommes en pleine négociation avec le ministère du travail pour qu’il nomme un médiateur. Et même pour ça, le gouvernement traîne des pieds alors que c’est une mesure classique lors d’un conflit social dans une entreprise », explique le syndicaliste.
Le syndicat Sud a réclamé lundi dernier la « suspension du plan social » de PSA Peugeot Citroën au tribunal de grande instance de Bobigny. Le juge des référés de Bobigny a mis sa décision en délibéré à lundi prochain, le 4 mars. Cette décision pourrait-elle vraiment avoir des conséquences sur le plan social, décidé en juillet dernier ?
Imane Youssfi