L’AN I DU CALENDRIER HOLLANDE. Dimanche 6 mai 2012, la Place de la Bastille faisait vibrer des dizaines de milliers de personnes venues célébrer la victoire socialiste. Un an plus tard, l’aile la plus à gauche de l’échiquier politique a pris la place pour faire sa fête à la politique du premier gouvernement Hollande.  

Et en ce début d’après-midi, ils sont massés par milliers pour soutenir et porter les messages de leurs leaders qui, avant la grande marche, se succèdent sur scène, comme Pierre Laurent (PCF), Eva Joly (EELV) et, surtout, le tribun aux sonorités gaulliennes, Jean-Luc Mélenchon, l’ex candidat Front de gauche à l’élection présidentielle, qui galvanise la foule avant de lui faire entonner l’Internationale et la Marseillaise.

« Aucun monarque, fût-il républicain, ne nous imposera jamais sa loi », vient-il de déclarer dans son discours. Pourtant dans le carré VIP où se pressent élus et personnalités sous les feux de la rampe médiatiques, le roi thaumaturge de la popularité retrouvée, c’est bien lui. A son passage, les journalistes se bousculent et les bras se tendent sous les acclamations : c’est la cohue !

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Derrière ce chahut, goûtant la météo radieuse et regonflés par cette foule massive, les militants telle Corinne, 59 ans, agent d’accueil en Saône-et-Loire portent haut balais et pancartes contre l’austérité avec un seul mot d’ordre « 6ème République ». Elle en donne sa définition : «On veut en finir avec la 5ième République ! Actuellement, nous sommes dans des institutions donnant la prédominance au Président de la République. C’est une espèce de monarchie constitutionnelle où les représentants du peuple ne peuvent pas le remettre en question alors que lui peut dissoudre l’Assemblée Nationale. Nous ne sommes donc pas dans une démocratie comme nous l’entendons, où le peuple, c’est à dire nous tous, a les moyens de donner son point de vue sur les politiques qui le concernent en dehors des moments électoraux… »

BBCorinne 6repCorinne précise son raisonnement : « En gros, on élit des gens, puis on doit rentrer sagement à la maison en attendant la prochaine élection… Ce que nous voulons, c’est tout remettre à plat en désignant une assemblée constituante, à savoir élire des gens non élus au préalable et qui ne le seront pas ensuite, avec pour fonction de recréer la constitution et redéfinir les institutions pour le bien du plus grand nombre et non au bénéfice de quelques uns… ». Corinne, plus convaincue que jamais, reprend sa place dans le cortège auprès de ses amis qui chantent « L’Humain d’abord », leur création originale sur l’air des « Copains d’abord » de Georges Brassens.

BBPereEtFille6repRobert-André, 50 ans exerçant une profession libérale et Lucie, 15 ans, lycéenne, venus spécialement des Deux-Sèvres, défilent «contre l’austérité, la finance et pour la 6ème République» également. Père et fille veulent en finir avec « la République Monarchique pour vraiment donner la parole au peuple. » Un exemple : « Alors que le Sénat a voté pour l’amnistie des syndicalistes, notre Président dit qu’il faut voter contre et elle sera sûrement abandonnée… »

Inadmissible pour ce poitevin qui a fait plus de 5 heures de route pour manifester. Il avait voté François Hollande au second tour, « surtout contre Nicolas Sarkozy », et ressent aujourd’hui « une grande désillusion et un grand sentiment de trahison. Pour l’instant, c’est une politique de droite qui est menée… Entre autres avec l’ANI (Accord National Interprofessionnel) qui va conduire à plus d’emplois précaires et des CDI intermittents, on se rend bien compte qu’on n’est pas du tout dans une politique de gauche ! ». Selon Robert-André, un seul remède pour une vraie politique solidaire : « Mélenchon ou un leader du Front de Gauche Premier ministre du gouvernement ! »

Encore plus loin derrière, Romain et ses camarades du FDG Montreuil (93) jubilent. Après trois heures à piétiner Place de la Bastille sous le soleil qui a rougi leurs visages, ils peuvent enfin marcher vers la Place de la Nation et agiter leur banderole… Le succès de la manifestation leur redonne moral et espoir et les convainc plus que jamais de se battre pour les valeurs auxquelles ils croient : celle de cette 6ème République qui les fait tant rêver.

Sandrine Dionys

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