Depuis près de deux mois, la cité scolaire Jean Renoir, qui fait figure de bon établissement dans le département, est en lutte contre la dernière dotation horaire qui rogne les heures d’enseignements. Récit.

En février dernier, les lycées et collèges de toute la Seine-Saint-Denis recevaient avec la dotation horaire globale (DHG), les heures dont les établissements disposent pour réorganiser la rentrée prochaine. La dotation horaire globale est établie par le rectorat de chaque académie, en l’occurrence celle de Créteil pour la Seine-Saint-Denis. La cité scolaire Jean Renoir à Bondy s’est donc vue attribuer les heures dont le lycée et le collège disposeraient pour la rentrée 2014. Cette dotation horaire est fortement contestée et jugée insuffisante par rapport aux besoins du collège et du lycée.

Le lycée Jean Renoir comptait, pour l’année 2013/2014, environ 1250 lycéens. Pour l’année 2014/2015 le lycée prévoit d’accueillir 1330 lycéens, soit 80 lycéens en plus. Pour répondre à un effectif plus important, la DHG prévoit d’ajouter 80 heures de cours au lycée. Mais le nombre d’heures proposées n’est pas suffisant en rapport au nombre d’élèves. Si on calcule le lycée perdrait environ 60 heures de cours.

CAM00391Le lycée Jean Renoir connait un taux de réussite au baccalauréat de 84% et un taux d’accès de la seconde au bac de 70%, ce qui lui vaut la 10e place au classement des lycées du département. En dix ans, le lycée a augmenté son taux de réussite au bac de 13%, le taux global de réussite au baccalauréat de Jean Renoir est même supérieur aux pronostiques du Ministère de l’Education, lui permettant d’accéder au titre de Lycée Performant. Cette réussite est due à un travail minutieux et rigoureux des enseignants, de l’engagement de toute l’équipe pédagogique et de l’implication des étudiants dans tous les projets de la cité scolaire. C’est cette réussite tant félicitée qui est mise en danger aujourd’hui par le projet de la dotation horaire globale.

Les mesures prises par la DHG auraient diverses répercutions sur le système éducatif. Marie-Cécile Michalet, professeur documentaliste au lycée Jean Renoir depuis 18 ans, l’explique « Nous sommes acculés à un choix pour l’an prochain qui est indéfendable. Soit nous défendons nos activités facultatives : Sciences Po, l’atelier cinéma, théâtre et sciences. Soit les ateliers s’arrêtent pour financer la préparation des élèves au baccalauréat : bac blanc, devoirs surveillés, préparation aux oraux« . Sinon, le lycée devrait supprimer une classe pour que chaque élève continue à bénéficier d’un emploi du temps complet, aux dépens d’être en sureffectif.

M.Eveillart, professeur au lycée Jean Renoir témoigne « Ce surreffectif va, à terme, empêcher le redoublement de certains élèves. C’est un ‘petit détail’ des conséquences de ces effectifs, mais qui à terme retire aux élèves le droit au redoublement« . Dans les deux cas, le lycée perdrait en sa qualité et en sa capacité de faire réussir ses élèves dans leurs parcours scolaire.

C’est pourquoi depuis déjà plus d’un mois, la cité scolaire c’est fortement mobilisée. Les lycéens, parents d’élèves, professeurs et toute l’équipe pédagogique défendent les heures prisent au lycée et au collège, sans relâche. Les mouvements de grèves ont commencé dès le retour des vacances de février avec des blocus organisés par les étudiants presque tous les matins, mobilisant environs 250 personnes.

Journées désertes et nocturnes

Les enseignants ont organisé plusieurs marches, l’une en direction des Services départementaux de l’éducation nationale (DSDEN) à Bobigny et plusieurs jusqu’au siège de l’académie de Créteil. Une délégation d’élèves a été reçue par la maire de Bondy ,Sylvine Thomassin, qui a adressé une lettre au rectorat. La Fédération du conseil des parents d’élèves (FCPE) a appelé à faire « journée déserte » au collège et lycée. Parents d’élèves et professeurs ont même mobilisé le lycée, en organisant des nocturnes.

« Pourtant le rectorat refuse toujours de nous recevoir pour discuter de la situation de la cité scolaire Jean Renoir. Cherche-t-on a décourager équipes et élèves dans les bons résultats que leurs reconnaissent l’institution et les journaux ? » peut-on lire dans l’article de 24 mars dernier sur Mediapart. Le rectorat a finalement cédé 25 heures au lycée, mais il en faudrait encore 30 de plus, et rien n’a été fait pour le collège. Professeurs, élèves et parents ne baissent pas les bras et continuent la lutte pour que la cité scolaire Jean Renoir de Bondy garde son dynamisme, sa compétitivité et son bien-être. L’école est un des symboles majeurs de la démocratie, si l’éducation nationale met en péril son bon fonctionnement, c’est la démocratie elle même qui est mise en danger.

Je suis en terminale, et normalement je quitte le lycée cette année. Je ne serais donc pas touchée par cette dotation horaire. Néanmoins, je tiens à souligner la qualité des enseignements que j’ai reçu depuis 7 années à Jean Renoir. C’est à la fois l’engagement des mes professeurs, la pluralités des options facultatives ou encore des classes à petits effectifs ou parfois en demi-groupe qui ont participé à ma réussite. Aujourd’hui je m’inquiète pour les générations à venir, et je souhaite sincèrement qu’ils puissent bénéficier d’un lycée aussi exemplaire que je l’ai connu.

Jasmin Nahar

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