Depuis 15 heures un message se propage comme une trainée de poudre entre les grenoblois. Un rendez vous est donné. « Le club de la Presse appelle à un grand rassemblement à 18h à Grenoble place Félix Poulat. La mobilisation doit être exemplaire, en réponse à l’horreur de cet attentat perpétré au sein des locaux de Charlie Hebdo, contre la presse, contre la démocratie » pouvait on lire d’une part. D’autres plus succincts, mais tout aussi poignants se composaient d’un « Venez à 18 heures place F.P. Le plus grave attentat depuis 1961…Je crois qu’il faut être là ».

Les messages envoyés, les gens ont commencé à se rassembler. A partir de 17h les rues menant à la place se sont doucement noircies. Pour qu’à 18h la place ne soit plus qu’un immense foisonnement. Si bien que les trams ne pouvaient plus circuler. On pouvait apercevoir au loin de la place Victor Hugo, un cheminement interrompu de chenilles mécaniques. Même les vélos n’étaient plus en mesure de rouler.

Des stylos se sont levés, quelques mains fébriles ont initié un mouvement, puis des dizaines et finalement une bonne partie du rassemblement. Les hommes étaient comme mus par un désir de justice et un vent de solidarité. Tous avaient à cœur de soutenir ce cri humain contre la barbarie, pour la démocratie et la liberté d’expression. Sur un landau un panneau disait : « Dis papa, dois je mourir pour tout ce que je dessine ».

Soudain les premiers vers de la marseillaise ont retenti. Un vent d’indignation a aussitôt soufflé. Certains y virent un élan de chauvinisme. La foule est restée divisée. Mais les chants se sont tus. Au profit d’un mot lentement scandé. Ce mot qui s’est rependu sur de nombreuses bouches pour finir par être crié. Charlie.

Le ton est monté, puis a désenflé. Il s’est enfin fait couvrir par des sirènes de pompier. Rien de grave , sinon une poussée d’unité et de fraternité. Plus de peur que de mal. Mais les manifestants restaient sans voix, comme dans l’expectative d’un signe, d’une indication de la marche à suivre. Mais rien ne vint.

Tout le monde avait néanmoins son mot à dire.

Le mot solidarité fut néanmoins lancé. Les portables sonnent régulièrement. Des messages s’y affichent. « Un message à faire passer. Ce soir une bougie aux fenêtres pour Charlie Hebdo…A propager le plus possible. Qu’une belle chaine se crée. Paix et liberté. »

A une autre échelle, les drapeaux seront en bernes durant trois jours. Et sur un escabeau, le plan Vigipirate « alerte attentats » a été annoncé, le niveau le plus élevé d’après Matignon. Le président vient de déclarer une journée de deuil national.

Des mesures relatives. Mais des mesures accompagnants bien une idée : « Personne n’a tué Charlie Hebdo »

Lola Colombier

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