Dès les petites classes, notre scolarité est rythmée par des sigles aussi significatifs que des formules mathématiques : CE1, CM2, ES, S, ST2S, STAPS, STEPS, L3, UE, ECTS, BU, et j’en passe. Parmi toutes ces abréviations, il y a les lettres STMG. Anciennement nommée STT puis STG, la filière STMG (Sciences et technologies du management et de la gestion) est accessible à partir de la classe de Première dans la plupart des lycées généraux et technologiques. Elle se veut plus « professionnalisante » que les autres sections d’études proposées dans ces mêmes établissements puisqu’elle permettrait de comprendre le fonctionnement des entreprises. Elle prépare notamment aux métiers liés au secteur du marketing, de la communication ou encore de la gestion par des voies relativement courtes, bien qu’il le soit rarement rappelé, mais l’accès aux études supérieures dites longues leur est bien entendu possible.
Screenshot_2015-04-27-02-16-35-1 On croirait presque qu’il s’agit là d’un copier-coller de l’Onisep (l’Office national d’information sur les enseignements et les professions), encore un sigle aussi simple à retenir qu’une identité remarquable en math. Depuis plusieurs années, cette filière est vivement critiquée. Les lycéens la pratiquant sont souvent considérés par leurs camarades comme des « sous-lycéens », des élèves moins intelligents que les autres.
Au point que certains professeurs insistent souvent sur l’importance de la STMG. Au deuxième trimestre de la seconde générale, on réalise un choix d’orientation. Il nous est demandé d’effectuer et de hiérarchiser trois vœux. Je me souviens que ma prof principale nous avait demandé de ne pas mettre systématiquement la STMG en troisième position : « ce n’est pas une roue de secours, mais une filière à part entière » s’était-elle exclamée.
Je me souviens aussi que beaucoup de mes camarades de classe qui avaient opté pour cette orientation étaient sûrs de leur choix. Souvent celui-ci résultait d’une longue réflexion philosophique et stratégique concernant leur avenir potentiel sur le marché du travail. Et finalement, la plupart avaient vu juste puisque deux ans après ils arrivent déjà à la fin de leur BTS ou DUT (les sigles, encore et toujours) leur promettant des belles perspectives d’avenir. La plupart ayant déjà mis un pied dans le marché du travail grâce à des stages en entreprises, ou des contrats d’alternance.
« STMG : Salade Tomate Mayo Grec »
Certains titulaires de bac L, ES ou S regrettent presque de ne pas être passés par un bac STMG : « je me suis vue refuser l’accès au BTS que je convoitais parce que j’ai un bac L. L’accès à ce diplôme exigeait un bac STMG. Avec du recul, j’aurais mieux fait d’y réfléchir dès la seconde » constate Léa.
Screenshot_2015-04-27-02-09-37-1-2Le problème c’est qu’à 15 ans, peu nombreux sont les lycéens qui envisagent leur orientation en adéquation avec leurs futures études supérieures. Alors ils écoutent d’une oreille les conseils de leurs proches, de leurs profs, mais sans grande conviction. Donc oui beaucoup cochent la case STMG parce qu’ils ne savent pas vraiment quoi faire d’autre, parce que tout le monde ne cesse de leur répéter que le bac est plus facile à obtenir et puis aussi parfois parce que l’idée de s’habiller en tenue professionnelle le jeudi peut être plaisante.
Qu’importe la raison qui a poussé ces jeunes à choisir cette filière, ils sont constamment pointés du doigt, surtout sur les réseaux sociaux. En tapant l’acronyme « STMG » sur Facebook, Twitter ou Instagram, on tombe sur des posts aussi délirants les uns des autres. D’après ces publications l’élève de STMG ne serait qu’un débile mental, un futur candidat à la télé-réalité, un fainéant, un analphabète.
Maïssane, titulaire d’un bac STMG depuis bientôt deux ans s’amuse de ces publications : « que ce soit pour les élèves concernés ou ceux qui voient ça de l’extérieur, ces posts sont à prendre au second degré. Les intéressés en rient le plus souvent et les autres qui voient ça de l’extérieur doivent comprendre que cette filière porte de gros clichés sur son dos, mais qu’elle est aussi formatrice qu’une filière générale ».
Bien que Maïssane affirme le contraire, plusieurs lycéens m’ont avoué avoir été contrariés par ces blagues perpétuelles à l’égard de cette filière : « je veux faire un bac STMG, mais tout le monde dit que c’est un bac en carton, un bac facile. Sauf que moi c’est un bac qui a de la valeur que je veux, pas un bac bas de gamme » s’indigne Thomas, 15 ans.
Screenshot_2015-04-27-02-10-14-2Pour du bas de gamme, le programme est bien chargé : les enseignements généraux se poursuivent avec des mathématiques, du français, de l’histoire-géo, de la philosophie, des langues ; s’ajoute à cela de la gestion, du management des organisations, de l’écodroit. Le lycéen doit également choisir une spécialisation : gestion-finance, mercatique ou bien ressources humaines et communication. Apprendre comment fonctionne le milieu professionnel dès l’âge de 16 ans ne serait pas finalement un gage de maturité ?
Les punchlines sans cesse lancées sur les réseaux sociaux sont finalement de bonne guerre, mais elles prennent des proportions différentes quand on voit que l’orientation de certains lycéens s’effectue en fonction de l’opinion de la communauté numérique.
La figure de l’élève qui vient au lycée avec une boîte de grec en guise de trousse, qui s’exprime aussi bien que certains joueurs de football et qui joue au Uno en cours de maths existe peut-être, mais pourquoi serait-il forcément rattaché à une classe de STMG, puisque cette classe est aussi légitime qu’une autre ? Au fond, les lycéens sont généralement adeptes du ridicule et le ridicule n’a pas de limite. Que ce cliché soit vrai ou pas, le stéréotype du STMG fait sourire les internautes, au risque d’en blesser certains.
Sarah Ichou

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