Dix ans après les révoltes, le constat des jeunes du Bondy Blog est pessimiste. La situation en banlieue ne semble pas avoir changée. La politique de la ville peine à porter ses fruits. L’école n’est pas la même dans tous les territoires. Les rapports entre les jeunes et la police, si tendus en 2005, restent aujourd’hui complexes.
Patrick Kanner « La politique de la ville est longue à avoir un effet sur le terrain »
Invités : Mohamed Mechmache, Renaud Epstein
Le reportage réalisé par Nassira El Moaddem dénonce les conditions d’insalubrité dans lesquelles vivent les habitants de la cité du Chêne-Pointu, à Clichy-Sous-Bois. La situation est d’autant plus difficile à vivre que ces derniers se trouvent précisément en face d’un quartier entièrement rénové. Le bonheur des uns participe au malheur des autres, qui se sentent légitimement lésés. Le ministre se justifie. Il reconnait sans mal qu’il existe une « urgence sociale », mais souligne que « la politique de la ville est longue à avoir un effet sur le terrain ». C’est d’autant plus vrai selon lui pour le cas bien précis du Chêne-Pointu, il souligne la difficulté des « opérations de rénovations des copropriétés dégradées ».
La politique de la ville doit se faire avec les habitants. Renaud Epstein, sociologue, rappelle que ce fut rarement le cas. Pour lui, les portes de la démocratie participative « s’ouvrent timidement puis se referment brutalement ». Mohamed Mechmache, porte parole du collectif « AC Le Feu » interpelle le ministre, considérant que « tant qu’on ne mettra pas les citoyens au cœur des politiques publiques, on n’y arrivera pas ».
Enfin la question de la mixité sociale est abordée. Le ministre de la ville revient sur la loi SRU, qui impose des quotas de logements sociaux dans toutes les municipalités de France.
Patrick Kanner : « La fuite des écoles publiques est un échec pour la république »
Invités : Son-Thierry Ly, Camille Bedin
Nouveau dossier, autre problématique. La question porte sur les stratégies d’évitement de la carte scolaire dans les quartiers populaires. Certaines familles se serrent la ceinture pour envoyer leurs enfants dans le privé. La solution du ministre est dans les moyens. Pour lui, « la fuite des écoles publiques est un échec pour la République » et se solutionne par l’investissement : « il faut rendre ces établissements attractifs ». Selon Camille Bedin, élue d’opposition (LR), l’école est « la seule question ». Les échanges entre le ministre et cette dernière sont houleux, Patrick Kanner rappelle que lorsque l’actuelle majorité arrive au pouvoir en 2012, l’éducation nationale a été amputée par le gouvernement Sarkozy de « 80 000 postes », et « a vu supprimer les Instituts Universitaires de Formation des Maîtres ». Il conclut par la nécessité de « rattraper ce massacre ». Son-Thierry Ly, économiste, tempère considérant qu’il ne faut pas « attribuer à l’école tous les échecs de la société ».
Sihame Assbague : « La gauche a échoué sur le rapport police/citoyen »
Invités : Sihame Assbague, Erwan Guermeur
En présence d’un policier également délégué syndical (SGP-FO) et de Sihame Assbague du collectif « Stop contrôle au faciès », ce débat est probablement le plus animé de l’émission. La promesse du candidat Hollande de la délivrance d’un récépissé de la part des forces de l’ordre lors de chaque contrôle d’identité n’a pas été tenue, et Patrick Kanner affirme que cette mesure « n’est plus à l’ordre du jour ». Pour Sihame Assbague, « la gauche a échoué sur le rapport police/citoyen », et le problème est justement « le manque de traçabilité lors des contrôles ». Le port de caméra embarquée par chacun des agents de police, promis par le ministre, ne constitue pas, selon elle, d’une garantie, car « il est très difficile aujourd’hui pour les citoyens d’obtenir les images ». D’autant plus que l’agent choisit le moment où il lance la vidéo. Pour Erwan Guermeur, il s’agit cependant d’un facteur d’apaisement, car « quand le policier annonce que le contrôle est filmé la tension redescend tout de suite ». Malgré cela, Sihame Assbague note que cela ne change rien à « la charge de la preuve » qui incombe au citoyen dans le cadre de litiges, dans la mesure où cette preuve reste excessivement difficile à fournir. Les rapports entre les gens et la police dans les quartiers populaires semblent donc toujours tendus.
Mathieu BLARD
Soirée spéciale sur France Ô, diffusion du BBC, L’écho de la révolte, les émeutes 10 ans après, à 22h20

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