Découvert grâce à une vidéo tournée à sa sortie de garde à vue fin 2015, OhPlai est aujourd’hui connu pour ses storys humoristiques sur le célèbre réseau social Snapchat et ses expressions made in « Grigny ». Portrait. 

Quel bay chacal?” Cette phrase peut vous paraître incompréhensible, mais pour les quelque 200 000 abonnés qui suivent le compte Snapchat de OhPlai, les 189 0000 sur Facebook et ses plus de 22 000 abonnés Twitter, cela veut dire tout simplement “c’est comment mon pote?” Ohplai, son nom de scène sur les réseaux, de son vrai nom Plaisir Bahamboula, est un jeune homme de 25 ans originaire de Grigny dans l’Essonne. Sur Snapchat, il raconte sa vie en photos et vidéos éphémères depuis dix mois environ. 

C’est installé dans un canapé de la réception du chic hôtel Pullman à Bercy que nous le retrouvons. Style urbain chic, jean foncé, casquette noire vissée sur la tête, cet habitant du quartier de la Grande-Borne de Grigny vient de terminer sa réunion hebdomadaire du lundi avec son producteur Junior, “un grand du quartier”, dit-il. Pourquoi une réunion ici ?“Parce qu’on aime bien le secteur et que Junior n’habite pas loin”, répond l’humoriste des réseaux sociaux. A ses côtés, son attachée de presse. “Sur ma boîte mail, j’avais trop de sollicitations et je n’arrivais plus à gérer« . C’est sur Snapchat, forcément, qu’il a passé une annonce de recherche d’attaché de presse. « J’ai accroché avec Inès« . Parmi les demandes qui arrivent sur sa boîte mail : des propositions d’animations de fêtes d’anniversaires, des interventions à des mariages. « Des évènement trop intimes », argue-t-il. Il refuse ce genre de prestations. Il raconte même qu’une célèbre et grande marque de voitures lui a proposé de venir essayer un de leurs modèles et de le raconter en story Snap pour en faire la publicité. OhPlai monétise tout de même ses prestations dans des soirées chichas, dans des boîtes de nuit, mais aussi lorsqu’il mange dans un bon restaurant et qu’il en fait la publicité ensuite sur les réseaux. Quand on l’interroge sur les cachets qu’il touche pour ses interventions, on sent OhPlai gêné aux entournures, passant à autre chose. Mais OhPlai assure que l’essentiel pour lui est le « plaisir, faire rire et l’envie de partager sa joie de vivre même quand ça ne va pas” . Alors que notre entretien venait à peine de commencer, un jeune homme lui demande d’apparaître dans son Snap “pour un ami fan”. Sans hésiter et avec le sourire, il glisse un petit message face à l’écran qu’il termine par son célèbre “yiiiiii”.

Le « langage » de Grigny, « un pays à lui tout seul »

Dans une autre vie, Plaisir Bahamboula a été joueur de football professionnel, formé à Sochaux. « Le monde du football était trop faux« , déplore Ohplai qui dit en être sorti « dégoûté » sans vouloir donner plus de détails. Il est également passé par des clubs belge, finlandais et bulgare sans jamais avoir percé. Aîné de la fratrie, ses deux petits frères jumeaux, Dylan et Dolan, sont d’ailleurs eux aussi footballeurs, le premier joue en Ligue 1 à Dijon.

La vidéo qui l’a rendu célèbre c’est celle-ci. Décembre 2015, il sort de garde à vue pour conduite sans permis. Il scénarise tout : de son arrestation, les baskets sans lacets à refaire, l’attente de son beau-frère qui vient le récupérer, son retour à la maison avec un ton et les mots bien à lui. La vidéo postée début janvier 2016 a été vue plus d’un million de fois sur Facebook, 200 000 fois sur Youtube. OhPlai me raconte la vie dans son quartier à Grigny, « un pays à lui tout-seul qui a une fierté comparable à celle des Algériens pour leur pays”. Toujours le sens de la formule. Dans ses snaps, chaque jour, le Grignois utilise des mots que beaucoup n’ont jamais entendus auparavant. “Kill” (je bouge, je me tire), “sten” (le fait d’être posé), “bad wo” (très, très moche), “dead ça” (bien exécuter une chose), ou encore “un bay atroce”, sont des termes et des expressions propres à la ville de Grigny que OhPlai a rendus populaires notamment auprès des 10-20 ans. Et il le reconnaît.  “Quand je me déplace un peu partout en France, je suis heureux de voir des jeunes parler le langage de Grigny, surtout les plus petits car ils sont spontanés et ne réfléchissent pas. Ça me fait plaisir même si les grands de mon quartier ne sont pas contents. J’ai grillé leur couverture, ils me disent « on est cramé dans les autres villes maintenant« , s’amuse le jeune homme qui remercie souvent “sa OhPlai Family”. “Je n’aime pas dire « mes fans« , ça donne l’impression que je me mets en avant et je ne suis pas comme ça. Tous mes abonnés sont la famille”, confie-t-il, sans filtre.

“Je m’inspire des grands de mon quartier”

Les grands de son quartier, il les appelle “les anciens” dans ses stories et s’amuse à les imiter. Le personnage de « l’ancien« , qu’il incarne régulièrement en train de donner des conseils sur la vie, est en fait un mélange de plusieurs grands du quartier. « Je m’inspire d’eux. Ils existent vraiment et parlent tous de cette façon”, raconte l’humoriste. “Ils me disent, ‘t’as réussi à mettre en avant Grigny, chose qu’on a pas su faire avant’”, explique-t-il, sourire en coin. Même si pour certains dont Steve, qui a grandi rue Vlaminck, à Grigny centre, “OhPlai est devenu célèbre parce qu’il parle comme on a toujours parlé ici. Rien de nouveau”. Pour d’autres, le personnage est une dose quotidienne de fous rires. C’est le cas pour Jonathan Mahoto, coach de Double Dutch qui a animé une “double dutch party” à Grigny il y a quelques années. Il suit les histoires de OhPlai sur Snapchat tous les jours. “Il amène une addiction. Ce qu’il fait, comment il parle, ses conneries, t’as envie de les suivre au quotidien. Il a rien révolutionné, là-bas tout le monde parle de cette façon, mais ses snaps c’est de l’instantané, c’est frais. C’est un fou, partout où il va il ne respecte rien mais dans le respect, c’est à dire qu’il ne dépasse pas de limites avec les gens et il les fait sourire.”

Ses histoires sont intarissables. Dans les prochaines semaines, OhPlai compte faire intervenir des profils plus féminins dans ses snaps qui seront fait sous forme de scènes du quotidien comme une première rencontre ou une sortie au cinéma. Autre histoire à venir, l’explication de sa grande peur des chiens. Terrifié à chaque fois qu’il en croise, même les plus petits caniches qu’il qualifie “de pire espèce parce qu’ils sont sournois et te sautent à la cheville direct”, sa peur est telle qu’il est capable de grimper sur le toit d’une voiture. “L’histoire est très longue. Mais je prendrai le temps bientôt de la raconter”.  Son objectif :  faire une story d’une heure entière sur Snapchat. Il n’a pour le moment pas dépassé le quart d’heure.

Inès EL LABOUDY

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