Souvenez-vous : c’était le soir du 24 décembre. Nawel Djerbi et sa famille, propriétaires d’un restaurant au Raincy (Seine-Saint-Denis), avaient offert le repas à tous les sans-abris qui le souhaitaient, parmi lesquels Guillaume, René et Bernard. Le Bondy Blog avait passé a soirée avec eux. Un mois après cette chaleureuse soirée, nous avons souhaité prendre de leurs nouvelles. Reportage.

Derrière le comptoir de son restaurant, Nawel Djerbi prépare de délicieuses pâtisseries dont l’odeur sucrée emplie la pièce. Des chansons actuelles diffusées à la radio créent une atmosphère joyeuse et festive. Un mois plus tôt, le soir du 24 décembre, les propriétaires de ce chaleureux établissement avaient offert le repas aux personnes dans le besoin. Nous y étions. Une soirée riche en émotion que ni les restaurateurs, ni les sans-abris n’ont oubliée. Ni nous d’ailleurs.

Travail et logement : un nouveau départ pour Guillaume

Coiffé de son chapeau melon, le regard lumineux, Guillaume Collet, qui vit dans la rue depuis six mois et qui était présent ce soir de réveillon, pousse la porte de l’établissement et salue chaleureusement l’équipe. Âgé de 40 ans, il est revenu deux fois discuter avec l’équipe d’Home’Lette depuis cette soirée. « J’ai une bonne nouvelle à vous annoncer, déclare-t-il, tout sourire. Je viens d’apprendre que Pôle Emploi m’a obtenu un emploi de coiffeur et un logement », à Saint-Ouen l’Aumône (Val-d’Oise).

Heureux, il se réjouit à l’idée « d’y accueillir son fils de 11 ans, Martin » et s’imagine déjà « manger un burger avant d’aller au cinéma« . Seule une inquiétude persiste : « Je redoute le moment d’annoncer la nouvelle à mon ami Amadou », avec qui il vit dans le rue. « Je travaillerai 20 heures par semaine. J’ai peur de le laisser seul et de ne plus pouvoir veiller sur lui ». Anxieux, il craint que celui qu’il considère « comme son frère » refuse d’habiter avec lui. « Il a tous ses repères dans le 93, alors je ne sais pas s’il voudra partir ».

Aidé par Nawel, René patiente pour un logement

Comme lui, René Vanelle, qui était venu avec son fidèle berger-allemand, a tissé des liens avec l’équipe d’Home’lette. « La soirée m’a aidé, surtout moralement, nous confie-t-il. Cette chaleur humaine m’a beaucoup touché ». Depuis le 24 décembre, il est revenu quatre fois, dont une avec des amis sans-abris, mais toujours accompagné de son chien. L’occasion de manger en bonne compagnie, des plats toujours offerts par le restaurant et de discuter de la vie quotidienne. Reconnaissant, il a même offert « une plante à Nawel, pour la remercier ».

S’il a trouvé du réconfort auprès des restaurateurs, sa situation a malheureusement peu évolué. Lui qui a passé huit ans dans la rue rêve toujours d’un appartement où il pourrait « recevoir son fils Matthias, dont il a peu de nouvelles ». Il espère aussi pouvoir trouver un emploi. « Je fais très bien le pot-au-feu, s’amuse-t-il. J’aimerais bien travailler dans le domaine de la cuisine ».

Touchée par son histoire et son incroyable gentillesse lors de leur rencontre, Nawel a décidé de l’aider. « Il a besoin qu’une personne le soutienne, surtout qu’il est handicapé et ne sait ni lire ni écrire », confie-t-elle avec émotion. Ensemble, ils ont fait une demande pour un logement social en Seine-Saint-Denis et doivent encore apporter quelques papiers dans l’espoir de la voir aboutir.

Une soirée qui a vu naître de belles amitiés

Après le réveillon, Nawel et sa famille sont ainsi restées en contact avec de nombreux sans-abris rencontrés ce soir-là. « Ils viennent souvent nous voir et sont parfois accompagnés de leurs amis, raconte Nawel. On leur offre ce qu’ils veulent boire ou manger, et on discute un moment« .

Bernard, un SDF de 63 ans d’origine égyptienne rencontré le 24 décembre également, est revenu deux fois, d’abord seul puis avec une amie. « Il est assez réservé et n’ose pas évoquer ses difficultés. Malgré tout, je pense que ça lui fait du bien de venir et de sentir un peu de chaleur humaine« , poursuit la jeune restauratrice.

Si certaines mauvaises langues les avaient accusées, elle et sa famille, d’organiser cet événement par intérêt publicitaire, les habitants du quartier reconnaissent aujourd’hui unanimement la sincérité de leur démarche. « Plusieurs personnes sont venues nous féliciter, s’amuse Nawel. On nous a même envoyé des cadeaux !« 

Au prochain Ramadan, soupe pour les sans-abris

« Très heureuse et fière » d’avoir organisé cette belle soirée, Nawel confie s’être « sentie utile. Nous étions contents de faire ce geste ». Ces généreux restaurateurs comptent même renouveler l’expérience. Ils ont décidé « d’offrir une soupe et des briques aux sans-abris chaque soir du prochain Ramadan » qui débutera à la fin mai. Bernard nous a demandé de le prévenir si l’expérience était renouvelée, poursuit la jeune femme. De même, la Croix Rouge nous a dit de la tenir au courant. Elle pourrait alors transmettre l’information à des personnes dans le besoin ». Le Ramadan, un mois d’échange et de partage » pour les musulmans.

Maéva LAHMI

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