Les vacances. Pour beaucoup, ces mots ne sont qu’une vague chimère. C’est là que le Secours populaire intervient. Comme chaque année, l’association permet à des enfants de milieu populaire de découvrir un ailleurs. Le mois dernier, 93 familles en difficulté de Seine-Saint-Denis ont été conviées à une sortie sur la côte dieppoise. Reportage.

Il est très tôt ce matin. Les yeux s’ouvrent avec difficulté quand les bouches, elles, ne cessent de s’agrandir à longueur de bâillements. Les traces d’oreiller se lisent encore sur les visages de certains. Nombreux, ils sont. Pressés, aussi, malgré la fatigue. Sept heures trente sur les écrans des téléphones portables que l’on sort des poches toutes les trois secondes. Ils sont déjà tous là, enfants et parents côte à côte, au total plus de 400 personnes originaires de Seine-Saint-Denis qui trépignent d’impatience devant la grande porte d’entrée de l’Espace Lumière d’Épinay-sur-Seine, en Seine-Saint-Denis.

Sous les bras, des mini-parasols, à la main, les glacières, et des serviettes sur les épaules. Les ballons de football attendent près des sacs de voyage. Pas de doute, ça sent les vacances. Il suffit de les observer, à guetter et tourner la tête au moindre bruit de roue. Les autobus ne devraient plus tarder. Huit en tout. Départ à 7h45. Direction : Dieppe et sa plage.

« On se retrouve en famille loin de la cité, ça fait du bien »

L’été se rapproche. Il pointe le bout de son nez lorsque les cars font enfin leur apparition. 93 familles prennent place. Le trajet va durer plus de trois heures. Cette journée à la mer est organisée par le Secours populaire de Saint-Denis. C’est devenu une habitude puisque c’est la troisième année consécutive que la fédération se rend dans la ville de Dieppe. L’occasion de quitter routine et grisaille pour des foyers qui n’ont pas les moyens de voyager ni de permettre à leurs enfants de goûter aux joies des colonies de vacances.

Lunettes de soleil sur le nez, le chauffeur assure l’ambiance tel un DJ de mariage : les amplis crachent les sons du hit RnB du moment. « Cho-cho-cho-chocolat ! » reprend Aïcha, la petite dernière d’une fratrie de quatre. La gamine de 11 ans passera en classe de 5ème l’année prochaine. Accompagnée de sa mère, de sa sœur et de ses deux frères, elle ne tient plus en place. « Je vais me baigner et jouer avec mes copines toute la journée », sourit-elle, excitée comme une puce.

Le bus marque un arrêt. Pause pipi et café/clopes est accordée aux passagers. Fausse joie pour Aïcha et les autres enfants qui pensaient être arrivés à bon port. Un couple et leur fils de trois ans en profite pour prendre l’air. « C’est la deuxième année que l’on participe à cette sortie du Secours populaire. On se retrouve en famille loin de la cité, ça fait du bien. C’est convivial et familial. C’est vraiment génial ! » s’enthousiasme Haïtem.

« C’est au moins l’occasion de sortir avec ma fille »

Dieppe, enfin. Le soleil ne manque pas au rendez-vous, les rues pavées de la ville fourmillent de personnes. Les plus jeunes meurent d’envie de se jeter à l’eau, à quelques mètres de là, mais il faut patienter encore un peu rappellent les bénévoles accompagnateurs. L’un d’entre eux prend la parole pour donner les dernières consignes. À la main, il tient une liste des présents, leur nom est suivi de leurs coordonnées. « Au cas où, on ne sait jamais, précise Christian, du comité d’Épinay-sur-Seine. On vous rappelle qu’on se retrouve tous ici à la même place à 16h30. En cas de besoin, rejoignez le camping du Secours populaire ». Sa collègue prend le relais, elle indique les règles de sécurité et remet aux enfants un bracelet à enfiler au poignet sur lequel figure le numéro de téléphone de leurs parents.

Partie de rugby entre garçons, sur la plage de Dieppe.

Au programme : petit-déjeuner offert par la commune, qui installe aussi les tentes et les tables pour le pique-nique, découverte de la ville à vélo, manèges, cirque, dactivités sportives comme le rugby, le handball, le cerf-volant, le judo et la baignade bien sûr… De quoi bien s’occuper toute la journée « Cette année, j’ai enfin la possibilité de participer à cette sortie. J’en avais beaucoup entendu parler. Certains amis de mes enfants sont allés en colonies de vacances. Cette journée, c’est au moins l’occasion de sortir avec ma fille », raconte une mère-célibataire originaire de Villepinte, allongée sur une serviette de plage pendant que sa fille profite de la mer.

D’un côté, ambiance selfie et châteaux de sable sur la plage, de l’autre, rigolades et baignade dans l’eau turquoise. Chacun y trouve son compte. Hawa dégage ses longues tresses pour ramasser les coquillages, « des souvenirs pour décorer [s]a chambre », confie-t-elle. De l’autre côté de la plage, une partie de foot animée entre potes attire les regards des curieux. « J’attends toujours les vacances pour venir à la mer. C’est cool ! Après, on va se baigner et passer au-dessus des vagues », propose l’un des adolescents à son camarade.

16h30 sonne déjà la fin de la récré. Tout le monde se retrouve sur la grande place tandis que les bénévoles vérifient que le groupe est au complet. L’ambiance dans le bus est bien plus calme sur le trajet du retour. Les enfants, épuisés, ont fini par s’endormir. Avant de se quitter, les participants remercient une dernière fois les bénévoles du Secours populaire. Ils se retrouveront le 23 août prochain pour la Journée des oubliés des vacances.

Kab NIANG

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