A Bobigny, après trois semaines de grève, les élèves du collège Auguste Delaune ont repris les cours ce lundi 25 novembre au matin. Mais la mobilisation continue sous une autre forme. Parents et  enseignants ne faiblissent pas : ils veulent faire connaître leurs actions au plus grand nombre et poursuivre la mobilisation jusqu’à janvier 2014.

Jeudi 21 novembre, à 19 heures s’est tenue une réunion au sein du hall du collège Delaune à Bobigny à l’initiative des parents grévistes. Ils se mobilisent depuis trois semaines pour obtenir un deuxième CPE (Conseiller principal d’éducation) à temps complet dans l’établissement de leurs enfants. Mohamed Afoukh, CPE, travaille depuis cinq ans dans ce collège classé en Zone d’Éducation Prioritaire. Il gère 574 élèves au quotidien. Pour le même nombre d’élèves, il faudrait deux CPE. Il rencontre de plus en plus de soucis de gestion, notamment au niveau du suivi des élèves, malgré le nombre d’heures supplémentaires qu’il effectue : au total 1 400 heures non payés entre 2009 et 2013.

Il a donc une importante charge de travail. Il faut compter, à ce jour, trois conseils de disciplines, six conseils de prévention, mais aussi sept situations graves, ce qui veut dire que la situation s’aggrave dans cet établissement dû à  l’augmentation d’élèves (les années précédentes, les élèves étaient seulement de 400) et du manque d’un deuxième CPE . Il a pour seule aide dans cet établissement, un autre CPE, mais présent à temps partiel (deux fois par semaine). Les parents et les enseignants ne tolèrent plus cette situation et ne veulent pas attendre plus longtemps qu’un incident grave arrive dans l’établissement  pour se mobiliser. Ces derniers veulent que leur revendication soit entendue et prise en compte par le rectorat de Créteil. Lundi 18 novembre parents et enseignants ont obtenu un rendez-vous à 14 heures auprès de la direction.

Le rectorat leur a proposé un poste d’un assistant pédagogique pour cette année.
Pour  Mohamed Afoukh, « le demi-poste d’assistante pédagogique n’a pas les mêmes responsabilités que celui d’un conseiller principal d’éducation. Il ne peut pas assumer des charges de travail inhérentes à la mission du CPE, à savoir accueillir les parents d’élèves dans le cadre des difficultés scolaires des élèves ou des absentéistes. Il ne peut pas assister aux instances alternatives au conseil de disciplines. Il ne peut également pas assister aux conseils de classe ».

Les parents et les enseignants sont déçus et en colère. Le rectorat leur a expliqué que le budget était déjà décidé une année auparavant et qu’il ne pouvait pas revenir sur le budget de 2013. Cependant, le rectorat envisagerait peut-être, pour la rentrée 2014/2015, de créer un deuxième poste de CPE pour ce collège balbynien. Mais, il y a rien de concret, simplement des « peut-être ». Les enseignants et les parents connaîtront la décision au mois de janvier 2014. Durant l’assemblée générale de jeudi dernier organisée à la demande des parents d’élèves au collège Delaune, des parents ont pris la parole, et parmi eux, certains ont expliqué leur inquiétude sur les études de leurs enfants qui n’ont eu pas cours depuis trois semaines, en raison de cette mobilisation. Alors que les uns souhaitent continuer cette grève, d’autres parents ont l’impression de n’avoir rien obtenu de la part du rectorat.

Arezki, père d’un enfant en classe de 6e dans cet établissement, affirme : « J’ai voulu radicaliser le mouvement pour être entendu car il y a rien de concret. Les propositions de la part du rectorat restent dans le flou. Durant quinze jours de grève personne n’a bougé. Si ça s’était passé dans un collège à la Défense, Puteaux ou à Courbevoie, ça aurait été différent, ils auraient obtenu de suite un deuxième CPE. Ils n’auront même pas eu besoin de faire grève. Ça me révolte, car à chaque fois dans l’histoire de Bobigny, il faut lutter pour aboutir à quelque chose. » Il ajoute, « Nous nous sentons marginalisés du fait que nos enfants n’ont pas les mêmes droits donc pas les même chances pour leur réussite scolaire ».

Les enseignants ont rappelé l’état des lieux en rappelant aux parents que la mobilisation a permis, quoi qu’ils en pensent, des avancées, et que le rectorat ne pouvait pas donner plus. Lors de la réunion de vendredi au collège Delaune, une question s’est posée : les professeurs sont-ils capables de maintenir cette mobilisation à la longue en bloquant totalement le collège ? Un enseignant  intervient en prenant le micro pour interpeller les parents : « peut-on prendre le risque de tout perdre et que finalement, on n’obtienne rien du tout de la part du rectorat ? » En fin de réunion, les parents ont donc voté pour décider de la reprise des cours dès lundi 25 novembre. Le « oui » l’a emporté avec 47 votants, contre 5 « non ». Le blocage du collège a continué jusqu’au vendredi 22 novembre, les enseignants craignant un essoufflement de la mobilisation au-delà.

Toutefois, les professeurs, ainsi que certains parents, ont réfléchi à d’autres modalités pour continuer la mobilisation, sans priver les élèves de cours. Ces propositions d’action ont été faites lors de la réunion de vendredi 22 novembre.Parmi elles : la mise en place d’un compteur de jours, des prises de rendez-vous avec les députés et sénateurs, la production de tracts mais aussi la mise en place d’un système de déblocage qui constitue à faire reprendre les cours aux élèves tout en faisant une fois par semaine grève.

Quoi qu’il en soit, parents et enseignants ne lâcheront pas la pression et continueront la mobilisation jusqu’en janvier 2014 pour obtenir enfin, un deuxième CPE pour la rentrée prochaine. Tous comptent bien obtenir gain de cause et aller jusqu’au bout pour que les élèves aient les mêmes chances de réussites scolaires que dans les autres départements.

Hana Ferroudj

Photo : Equipe Delaune mobilisée

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