Ah les vacances ! Normalement juste à prononcer ce mot, un moment de détente se distille dans nos pensées. Calme, farniente et volupté. Que nenni ! Lorsque le handicap frappe à votre porte, c’est autre chose. Pour nous, les vacances c’est plutôt : stress, plan D comme débrouille-toi pour le faire garder et recherches intenses d’activités adaptées. En 2018, les familles d’enfants en situation de handicap doivent toujours affronter un parcours du combattant. Parce que même si nos enfants ont le droit comme les autres de décompresser du rythme de l’école ou de l’IME (institut médico-éducatif), dans les faits cela reste très très compliqué.

Difficultés pour les enfants, parcours du combattant pour les aidants

Selon le Comité interministériel du handicap, 380 000 enfants en situation de handicap sont scolarisés, premier et second degré confondus, avec souvent de grandes difficultés du ministère à les prendre en charge.

Quand le métier nous le permet, on prend nos vacances en même temps que nos enfants. Mais même lorsqu’on est disponible pour s’en occuper, cela n’empêche en rien la difficulté et la complexité à sortir avec des enfants qui ont des troubles cognitifs et souvent des troubles du comportement. Et surtout cela pose le problème du répit pour les aidants (souvent la maman).

Pour les centres de loisirs, certaines villes proposent la mise à disposition d’un animateur supplémentaire. Objectif : renforcer l’encadrement pour s’occuper de l’enfant en situation de handicap. Bien que cela ait le mérite d’exister, il y a un bémol : l’absence de formation de ces jeunes animateurs sur le handicap.

Lorsqu’il n’est pas adéquat, le milieu collectif peut se montrer violent pour les enfants en situation de handicap

Autre gros souci : le rythme de l’enfant en situation de handicap n’est pas respecté. Comment intégrer et faire participer un enfant à des jeux collectifs, avec des règles bien précises, alors qu’il est dans un langage non verbal et qu’il ne comprend pas ? Comment est-il possible de ne proposer qu’une activité perle alors que l’enfant présente de gros troubles de motricité fine ?Pour toutes ces raisons, nous, mamans d’enfants en situation de handicap, nous avons tendance à écarter la piste du centre de loisirs classique. Une fausse solution qui ne serait pas source d’épanouissement pour eux. Effectivement, entre le bruit, la fatigabilité liée au rythme de la vie en collectivité, les activités non-adaptées, tout ceci créé un sentiment d’échec… Lorsqu’il n’est pas adéquat, le milieu collectif peut aussi se montrer violent.

Nous nous substituons aux accueils de loisirs

Nous nous substituons donc à ces accueils de loisirs, nous tentons de proposer le maximum d’activités à nos enfants : cinéma, bowling, patinoire, piscine, voyages… Tout est plus compliqué, plus agité, plus risqué mais parce que ce sont nos enfants, nous tenons à ce qu’ils puissent accéder à un maximum de loisirs, sportifs et culturels au même titre que les autres. Cela demande une énergie considérable et il faut renoncer à la facilité ! Oubliez la bronzette à la plage ou au bord de la piscine ! À nous les cris, les gros pâtés de sable, la mission commando au musée, le sauvetage dans le toboggan du Mc do… Et lorsqu’ils ont 13-14 ans, il n’est pas évident d’avoir maman sur le dos mais il n’y a pas tellement d’alternatives.

Pour un allongement du temps de travail des AESH et des centres de loisirs adaptés

Pourquoi n’allonge-t-on pas le temps de travail des AESH, les accompagnants des élèves en situation de handicap durant les vacances scolaires ? Cela aurait le mérite de proposer un accompagnement plus adapté par un encadrant familier de l’enfant qui connaît déjà ses troubles et qui répondrait à cette valorisation des salaires souhaitées.

Des personnes plutôt bienveillantes et soucieuses de la qualité de vie de ces enfants ont pensé à quelque chose de dingue : (roulement de tambours!) des centres de loisirs… adaptés ! Soit des centres de loisirs qui accueillent des enfants en situation de handicap et valides. Eh oui messieurs dames non seulement cela existe et en plus cela fonctionne très bien !
Ces structures innovantes « loisirs pluriels » permettent un accueil en faveur des enfants en situation de handicap, promettent un projet éducatif adapté et leur permet tout simplement de s’épanouir. A Rennes, par exemple, il existe des centres de loisirs de ce type. Les animateurs sont recrutés pour leur bienveillance, leur énergie et leur patience. Ils sont formés aux premiers secours. Les activités sont adaptées à tous, les sorties aussi. Anouk et Amaya adorent y aller à raison de deux mercredis après-midi par mois et quelques jours pendant les vacances. Nassim qui habite en Seine-Saint-Denis lui n’a pas pu bénéficier de cette structure inexistante dans ce département, c’est donc ses parents qui organisent et gèrent ses loisirs et vacances.

Aujourd’hui il est impensable qu’un enfant ne puisse pas être accueilli en raison de sa pathologie. Et pourtant, vous le voyez, c’est encore très compliqué. Nous rappelons que ces enfants sont aussi des enfants de la République et qu’il serait grand temps de passer des mots aux actes, car ces maux, nous ne les supportons plus.

Bonnes vacances, bien sûr !

Fadila Debbouza
Membre-fondatrice de l’association Epi-Idf qui lutte pour promouvoir les besoins des personnes atteints d’épilepsie sévère avec troubles associés

Mathilde Boumpoutou
Membre de l’association Alliance Syndrome de Dravet

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