Reynaldo Guerra, 34 ans, Houston, ingénieur et militant démocrate. Né aux États-Unis, d’origine mexicaine.

« Mes parents étaient des paysans venus travailler dans les champs de maïs aux États-Unis. Depuis quelques années, les discours et les sentiments anti-Latino sont de plus en plus fréquents, dans la rue, mais au plus haut niveau, notamment dans les rangs des Républicains. Il est encore très difficile pour les Hispaniques de franchir les échelons de la société. Ils sont sous-représentés politiquement : beaucoup travaillent dans l’agriculture, sont cols-bleus mais dès qu’ils ont des ambitions, on leur met des bâtons dans les roues.

J’ai été plusieurs fois victimes de stigmatisation et de racisme. Un jour, un policier m’a mis son arme sur la tempe uniquement parce que la vignette de ma voiture avait expiré… Sur les terrains de basket, lorsque j’étais étudiant, j’entendais certains m’appeler « clandestin ».

Je me considère à la fois comme Hispanique et Américain. Je pense que l’on peut très bien être les deux en même temps, qu’il n’y a pas d’incompatibilité. Cette possibilité est due à l’histoire de notre pays, une nation construite par les immigrés. »

Pablo Perez, 40 ans, Austin, manager d’hôtel.
Né aux États-Unis, d’origine mexicaine.

« Je suis d’origine mexicaine mais je me sens avant tout Américain. Je n’ai jamais été victime de racisme, ni de stigmatisation. Parfois, on me demande d’où je viens, ou depuis quand je vis aux États-Unis alors que je suis Américain, mais c’est tout.

Concernant la dernière mesure d’Obama sur les jeunes en situation irrégulière, je pense que le président devrait plutôt se concentrer sur le vote de la classe moyenne car les Latinos sont déjà acquis à sa cause. De plus, je pense que c’est une erreur de croire que les Hispaniques sont une masse d’électeurs homogènes, qui votent de la même façon. Il y a tout un tas de nationalités : des Cubains, des Mexicains, des Porto-ricains par exemple qui ont des comportements politiques différents.

J’ai quelques amis qui sont en situation irrégulière. Ils tentent de vivre normalement, même s’il sont payés bien moins chers que le reste de la population et qu’ils ne peuvent pas voyager en dehors des États-Unis.

J’attends d’Obama, pour qui j’ai voté en 2008, de ne pas trop s’attarder sur les questions d’immigration et de plus se concentrer sur le front de l’économie et de l’emploi en particulier. C’est là que tout le monde l’attend, Latinos ou pas ».

Francisco Castro Junior, 24 ans, étudiant à l’université de Texas, Austin.  Né aux États-Unis, d’origine mexicaine.

« Ma mère est née à Houston, au Texas, mon père à Reynosa au Mexique. Pour cette campagne, je ne vois pas le même enthousiasme chez les Latinos que lors de l’élection de 2008. Il y a quatre ans, nous avions envie de voter contre Bush et nous étions tous séduits par Obama. Cette fois-ci, je ressens moins d’intérêt pour cette élection au sein de la communauté hispanique.

En tant que Latino, j’espère qu’Obama avancera sur le dossier du Dream Act. Ces dernières années, Obama a très peu avancé sur le sujet alors qu’il en avait fait une promesse de campagne. Beaucoup de Latinos ont d’ailleurs été déçus par ce manque de courage politique. Certains, jusqu’à récemment, pensaient même ne pas voter pour lui à la prochaine élection. Avec l’approche du scrutin, Obama a enfin bougé les lignes, et j’en suis très content car beaucoup de mes amis sont concernés par cette décision. L’un d’entre eux,  diplômé en ingénierie aérospatiale, avait peur de ne pas pouvoir travailler en raison de son statut. Dès que j’ai entendu la nouvelle, j’ai tout de suite pensé à lui.

J’espère également qu’il mettra en place des taxes plus élevées parmi les plus riches et améliorera la couverture sociale des plus modestes. Je suis persuadé que des efforts doivent être faits envers la classe moyenne. Je soutiens le président depuis le début. Je trouve qu’il dirige très bien le pays. Et ce qu’il a accompli jusqu’ici me persuade à continuer de le soutenir et de voter pour lui en novembre. Beaucoup parmi mes proches et mes amis sont déçus et regrettent qu’il n’ait pas fait plus, notamment sur l’immigration. Je pense que la majorité d’entre eux votera de nouveau pour lui car ils n’ont pas le choix. Autour de moi, personne ne pourrait voter pour un candidat républicain, qui plus est Romney, dont les positions sur l’immigration sont insoutenables ».

Propos recueillis par Nassira El Moaddem ( Austin et Houston, Texas)

Lire le dossier spécial USA

Aux États-Unis, les jeunes sont de retour au bercail

Anacostia, quartier des Invisibles

Aux États-Unis, les Latinos, objet de séduction massive

Articles liés