MONDIAL 2014. En voyage au pays de la samba, Ines et les élèves qu’elle accompagne suivent une formation de percussions avec Pacote. Rencontre avec un musicien des favelas, qui revient de loin.

Qui n’a pas vu tous ces reportages sur les favelas brésiliennes à la télévision ? Ce genre d’endroit aux rues tellement étroites qu’une voiture doit presque rabattre ses rétroviseurs pour pouvoir passer, ces quartiers à l’atmosphère si tendue qu’ils sont considérés comme “zones dangereuses” par les touristes ? Difficile de se dire qu’on peut s’en sortir quand on est né là-dedans et qu’on a toujours vécu dans la précarité.

Quand on marche dans les rues de Salvador de Bahia et que l’on voit ces enfants vivant dans la misère, à moitié habillés, souvent pieds nus, on prend conscience du privilège que nous avons. La plupart mendie, vole, se drogue et boit pour oublier le quotidien. Mais certains arrivent à s’en sortir, à prouver que tout le monde n’est pas mauvais dans ces coins obscurs de la ville. Dans le quartier du Pelourinho, un homme a su démontrer qu’on peut se relever. Pacote le professeur de Batucada, un des fondateurs du groupe Olodum est d’ailleurs très connu dans la ville. En 1996, Michael Jackson était là pour tourner son célèbre clip They don’t care about us dans le Pelourinho. Il portait même des t-shirts Olodum. Une fierté pour ces Brésiliens qui ont vu dans ce clip, une façon de montrer qu’ils existent. Et Pacote en a fait partie. Il était parmi les musiciens et est aujourd’hui une star reconnue.

Comme chaque matin de notre séjour, Pacote donne de son temps pour apprendre aux Pierrefittois, Lyonnais et Grenoblois à jouer des percussions locales. Souriant même quand personne ne suit le rythme demandé, il inculque son savoir dans une ambiance unique. Il marque d’ailleurs l’esprit des jeunes ce matin de juin, en fin de séance de répétitions. Installé face aux 38 enfants venus des quartiers sensibles français, il s’ouvre, se confie. Pas pour qu’on aie pitié de lui, mais pour ouvrir les yeux des jeunes et leur rappeler une règle : « quand on veut, on peut. »

DSC_0183Pacote a vécu dans la misère, a subi beaucoup d’épreuves, la pauvreté, les violences, et des problèmes familiaux. Dans la musique, il a su trouver une issue. En fondant ce groupe, il y a vu une façon de s’en sortir mais surtout d’aider les enfants des favelas à voir le bout.  “J’ai aidé des enfants à sortir de leur galère et aujourd’hui ils sont dans mon groupe et sont avec moi tous les matins pour répéter. Je suis un peu comme leur second père”, raconte ce misanthrope. Avec un local en plein coeur du quartier historique, personne ne peut le rater. Il suffit de regarder “l’homme que tout le monde salue”. Il connaît presque tout les Brésiliens des environs, et n’hésite pas à s’arrêter pour poser avec les touristes désireux d’avoir un souvenir imprimé avec lui, même en plein défilé de Batucada dans le Pelô. Après deux semaines de formation, il présente un défilé dans le quartier avec les jeunes français et les membres de son groupe.

Personne n’oubliera cet homme qui a été protecteur, à l’écoute et très attentionné malgré la fatigue de chacun certaines matinées. Toujours motivé et plein d’énergie, il a su booster chacun de nous, même quand les bras devenaient lourds à force de frapper sur les instruments. Un simple signe de la tête et un sourire jusqu’aux oreilles, nous étions repartis pour un tour. A chaque voyage, il faut quelqu’un qui redonne le sourire et nous donne la force de relativiser sur tout. Et au Brésil, c’était Pacote !

Ines El laboudy

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