Tout a commencé à Lisbonne, en cette matinée du 25 Avril 1974. La ville aux sept collines se réveille au son des chars, pénétrant dans la ville. Des troupes envahissent les rues. C’est un coup d’état entrepris par l’armée. Le but est de mettre fin à une dictature sans fin. Kévin nous retranscrit cet évènement en s’appuyant sur les souvenirs de son père. 

Dans la mémoire de mon père, restent encore bien lisibles les souvenirs d’un enfant de dix ans, assistant à la révolution portugaise. «Ma mère me réveilla en me disant : «e a revoluçao» : c’est la révolution. Voilà comment cette journée a débuté pour lui.

Le MFA (Mouvement des Forces Armées) incite la population à rester chez soi et à garder son calme par des annonces sur certaines radios de Lisbonne. Les chansons émises à l’antenne sont, en fait, des messages codés pour permettre aux militaires de se tenir au courant de leurs ordres de mission.

« Je suis bien sûr sorti dans la rue, comme beaucoup d’entre nous. Au début, personne ne savait ce qu’il se passait, ça a été si rapide. Nous sommes tous partis au centre de la ville et c’est à ce moment-là que j’ai aperçu, pour la première fois, les blindés, les soldats et leurs fusils. Ils nous ont demandé d’évacuer les lieux. »

 En effet, le pouvoir, encore en place, a encore, à sa disposition, dans la capitale quelques troupes et des chars prêts à faire feu contre ses soldats. Ceux-ci, avec l’aide de quelques capitaines, ont l’intention de renverser, par un coup d’état, Marcelo Caetano. Ce dernier est le successeur d’Antonio Salazar, l’homme qui a débuté dans les années 30 une politique ferme dans le pays et que Caetano n’a fait que prolonger.

Nombreux militaires ne veulent plus aller perdre leurs vies inutilement dans des conflits coloniaux en Angola, Guinée-Bissau et Mozambique. Ils veulent, par la même occasion, réinstaurer la démocratie et la liberté d’expression au Portugal. Heureusement, aucun coup de feu n’a été tiré et même plusieurs des soldats pro Caetano ont fini par rejoindre les révolutionnaires.

« Ils ont pris le contrôle de la ville, sans tirer le moindre coup de feu. Je me suis rendu sur la place du Rossio, en plein cœur de Lisbonne. Le peuple se confond avec les militaires qui sont applaudis. Certaines personnes, n’imaginant pas que cela aurait pu se produire un jour, sont en larmes. Je suis monté sur un char avec mon frère, les gens ont commencé  à hurler « liberdade, liberdade ». Il y avait habituellement sur cette place quelques  fleuristes et c’est de là que l’idée leur est venue de mettre au bout de leurs canons des œillets, d’où le nom de la révolution

Ce symbole a été celui du renouveau, du coup d’état pacifiste, qu’a réussi l’armée portugaise. Le jour même, Marcelo Caetano, président du Conseil a été démis de ses fonctions et la dictature, qui durait depuis 1933, a pu cesser d’exister. Le pouvoir a enfin été rendu au peuple.

« Nous étions tellement heureux, tellement contents. Nous pouvions enfin dire ce que nous pensions, sans la peur d’être mis en prison pour nos opinons politiques ou simplement pour avoir dit que nous n’aimions pas notre gouvernement. Fini les mensonges, Fini la censure et Fini la guerre. »

La révolution des œillets restera dans l’histoire pour avoir été l’exemple parfait d’une révolution pacifiste, orchestrée par la junte militaire. Elle a permis au Portugal de changer radicalement sa structure au niveau politique, social et culturel.

« Je me souviendrai longtemps de ce jour du 25 Avril 1974, où la liberté avait pour la première fois un sens ».

 

Kévin Vaz

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