Lors d’un séjour touristique au Maroc, Joshua Asen découvre dans la médina de Rabat que de nombreux jeunes Marocains vouent une passion sans bornes au hip hop, aussi bien américain que marocain. Ses recherches universitaires (dont le sujet est justement le hip hop) le conduisent à revenir avec une bourse d’études. Il sillonne alors le Maroc où il apprend l’arabe dialectal pour pouvoir comprendre ces jeunes passionnés de rap et de hip hop et les interviewer. Muni d’une caméra, de son étude nait un projet de documentaire (voir la bande annonce ci-dessous) quand il décide de les aider à mettre sur pied un festival dans les villes natales des principaux protagonistes, devenus pour certains très célèbres au Maroc, à l’instar du groupe H-Kayne.

Du rêve à la réalité le chemin est rude, la résistance est forte et l’argent manque. Les rappeurs et Joshua se mettent en quête de financements et commencent un voyage qui les mènera in extremis au festival « I Love hip hop in Morocco » pour trois concerts fin mai et début juin 2005 à Meknès, Marrakech et Casablanca et qui réunira plus de 36000 spectateurs enthousiastes.

Si de nombreux plans et images nous rappellent qu’il s’agit d’un film d’étudiant non professionnel, il s’y dégage une telle énergie que les imperfections techniques sont reléguées au second plan. Qu’il s’agisse des jeunes ou de leurs parents, le film montre des personnalités attachantes avec une grande soif de liberté. Les interviews de ces apprentis rappeurs qui ne peuvent s’exprimer directement dans leurs chansons, mais par insinuations pour éviter les représailles, renvoient un écho tout particulier aujourd’hui, 6 ans plus tard, où un vent de révolte a soufflé et souffle encore sur de nombreux pays du Maghreb et du monde arabe. « La liberté d’expression, pourquoi vous l’avez et pas nous !» s’insurge alors face caméra, un membre du groupe Fnaïre à Joshua, capteur de cette grande frustration.

« Le hip hop a foutu ma vie en l’air ! C’est dur » lance DJ Key, un jour de découragement (dans une société où le roi et la religion sont sacrés et le hip hop mal considéré) mais dont la passion pour sa musique sera la plus forte. Et puis il y a cette toute jeune fille de Fez, FatiShow, à la détermination farouche, qui rappe envers et contre tout, et dont l’activité est soutenue par ses parents à condition qu’elle ramène de bonnes notes à la maison…

Loin des sentiers touristiques battus, Joshua Asen aura permis aux spectateurs du cinéma L’Etoile de La Courneuve, des jeunes pour la plupart, de découvrir une autre facette du Maroc. Et d’expliquer lors de son échange avec la salle que le rap a été la bande sonore des récentes révolutions et qu’une des chansons,« Rais le bled » (vidéo ci-dessous), du rappeur tunisien El Général a précédé la révolution tunisienne (avant de devenir l’un des hymnes de la jeunesse Place Tahrir au Caire)…

Sandrine Dionys

Pour en savoir plus sur I Love hip hop in Morocco : ici

Bande annonce de I love Hip Hop in Morocco

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