Après trois heures de car, nous voici dans Soweto. Une ville anciennement habitée par des orpailleurs. Des maisons minuscules de toutes les couleurs à notre droite droite. De riches demeures protégées par des barbelés à notre gauche. Des minis salons de coiffures, des mécaniciens improvisés au coin de la rue, des aires de jeux pour enfants, des sculptures sur le trottoir. Et quand on s’enfonce dans la ville, on découvre un bidonville géant, insalubre et gorgé de monde. Le South West Township. Taule, plastique et bois. Les visages sont pourtant joyeux.

A chaque coin de rue, des signes de la main fusent. Les enfants du bidonville sont ravis de voir notre bus arrêté au dessus de leurs habitations. Une femme en coiffe une autre dans une sorte de cour au milieu du fer et des planches en bois. Des cabines vertes font office de toilettes. Arrêt dans un quartier animé de la ville. Les touristes mitraille avec leur appareil-photo, nous également.

Face à nous, l’ancienne demeure de Nelson Mandela, devenu un musée. Un groupe de Zoulous vêtus de tenues traditionnelles dansent tout en chantant. Quelques pas plus loin, je me fais arrêter par des gamins des maisons voisines. Ils proposent des chants moyennant quelques rands (argent local). D’autres veulent être pris en photo et ensuite prendre eux-mêmes des photos. Je laisse un petit garçon me prendre en photo, le voilà ravi et me fait un énorme câlin. Après le déjeuner, visite du musée de l’Apartheid.

Pour nous mettre dans l’ambiance ségrégationniste de naguère, à l’entrée, nous sommes divisés par nos couleurs de peau, les « Whites » et les « No Whites », appelés aussi Blacks ou Colored. Les entrées se rejoignent après un long couloir dans lequel, chacun, selon sa file, peut apercevoir des grandes photos de pièces d’identités de l’époque avec nom, prénom, photo, date de naissance, origine, tribu d’appartenance (zoulou, swazi…), etc. Tout le musée regroupe des photos de l’époque de l’Apartheid ainsi que de la révolution, de Mandela, d’une reproduction des prisons des Noirs de l’époque.

De la ségrégation à l’union en passant par les larmes et les révoltes. Les images sont fortes. Certaines filles du groupe ne peuvent retenir leurs larmes en voyant la photo d’une infirmière tenant un bébé dans ses bras, maigre jusqu’aux os, tant la faim pouvait toucher les Noirs en ce temps-là. Des films en anglais sont diffusés dans différentes salles expliquant l’histoire du pays et les actions de ses grands personnages.

A la fin, notre guide nous explique la signification des couleurs du drapeau sud-africain. Le Noir, symbole de la population africaine, le jaune, celui des Asiatiques installés de longue date dans le territoire, jaune comme l’or aussi, une grande richesse du pays. Le vert représente l’agriculture du pays, ses forêts, ses espaces verts. Le blanc, la population européenne ainsi que la pureté du diamant, autre richesse du pays. Le bleu, c’est le ciel ainsi que les deux océans qui bordent le pays : Indien et Atlantique. Le rouge, enfin, est le sang versé par la nation.

A la sortie du musée, un grand drapeau accompagné d’un tas de gros galets, pour rappeler que les Sud-Africains ne disposaient que de leurs mains et de ces pierres pour se battre contre les colonisateurs anglais. Le message que Mandela veut transmettre via ce musée, c’est qu’il faut pardonner, et que le régime de la séparation raciale, avec son cortège de haine, n’advienne plus jamais. Mandela dit : « Oublier, on ne pourra jamais, mais pardonner on le peut. »

Les sept mots qui résument l’histoire de ce pays sont accrochés aux murs intérieurs et extérieurs : Liberté, Egalité, Respect, Responsabilité, Démocratie, Diversité et Réconciliation des différents peuples. « Mandela c’est le héro du pays », me confie la serveuse de notre hôtel. Le libérateur, comme l’appellent certains.

Inès El Laboudy (Soweto)

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Inès El laboudy

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