Avec sa couleur rose qui tranche avec la grisaille du moment, impossible de le louper. Le Mammobus a marqué un arrêt, le 14 octobre dernier, sur la place du Damier, au cœur du quartier de la Grande Borne à Grigny en Essonne.

Durant toute la journée, plus de cent femmes se sont présentées devant ce bus destiné à la prévention et au dépistage du cancer du sein, dont Fatma, quarante-neuf ans et habitante du quartier : « En revenant des courses, j’ai vu les camions, ça a attiré mon attention. Je suis d’abord venue voir ce qu’il se passait et j’ai décidé de rester pour le dépistage », explique-t-elle.

Il y avait plusieurs freins au dépistage : tout d’abord la peur mais aussi le côté financier.

Lancé au sortir de la pandémie par Khalid Zaouche, président de l’association « Bus de la santé », le Mammobus est le premier bus mobile d’accès au dépistage du cancer du sein en Île-de-France. « Le constat était très simple. Après le Covid, nous avions eu une discussion avec les mamans dans plusieurs centres sociaux qui nous ont fait part de la difficulté de se faire dépister. Il y avait plusieurs freins : tout d’abord la peur, mais aussi le côté financier », retrace Khalid Zaouche.

Le cancer du sein reste le plus agressif pour les femmes

Chaque mois d’octobre depuis maintenant trois ans, cet habitant de Garges-Lès-Gonesse silionne les routes d’Île-de-France dans son bus rose afin de permettre aux femmes de quartiers populaire de bénéficier d’un dépistage du cancer du sein totalement gratuit.

Une entreprise salutaire au regard des données avancées par le site de l’Assurance Maladie : ce fléau demeure le type de cancer le plus fréquent chez les femmes. En octobre 2023, on dénombrait plus 61 000 femmes diagnostiquées avec un cancer du sein depuis le début de l’année.

À l’instar de la Ligue contre le cancer ou encore de l’agence Santé Publique France, l’Assurance Maladie rappelle que plus un cancer est détecté assez tôt, plus il pourra être facilement traité : 99 % de chance de survie pour un cancer détecté à un stade précoce, contre 26 % lorsqu’il est détecté à un stade tardif.

L’apprentissage de gestes auto-préventifs

Avant de consulter un médecin généraliste pour contrôler leurs antécédents médicaux, Fatma et les autres femmes présentes ce jour-là, se sont entretenues avec une infirmière pour le volet prévention. Elles ont ainsi pu manipuler une poitrine en silicone pour apprendre l’autopalpation mammaire et ainsi être en mesure de détecter une future quelconque anomalie sur leur poitrine.

Après un avis médical, les patientes ont également eu la possibilité de rejoindre la semi-remorque, véritable centre d’examens sur roues, afin d’effectuer une mammographie. Grâce au matériel présent à bord, les femmes ont pu passer radiographies et échographies, tout en obtenant les résultats dans la foulée.

Cette opération a été rendue possible grâce aux six personnels de santé bénévoles engagés aux côtés de Khalid : « On sait qu’avoir des médecins traitants dans nos quartiers est assez difficile. Aujourd’hui, ces femmes ont pu rencontrer des professionnels de santé bien formés et ça, c’est le plus important », rappelle Khalid.

Sensibiliser à la précarité menstruelle

La venue du Mammobus s’inscrit dans une série d’actions menées par les acteurs sociaux de Grigny. Alors même que le bus venait de se parquer à la Grande Borne, non loin de là, une marche solidaire des victimes du cancer du sein prenait place entre le gymnase et la piscine municipale.

De l’autre côté de la place, la mairie organisait un atelier visant à sensibiliser les passantes à la problématique de la précarité menstruelle qui touche aujourd’hui quatre millions de Françaises. Chiraz Sow, coordinatrice médiation et prévention santé au CCAS de Grigny, explique : « Il ne s’agit pas juste de distribuer un paquet de serviettes mais bien de travailler sur le tabou des règles en général. Quand on parlait de ce sujet-là aux habitantes, elles pensaient qu’elles n’étaient pas en situation de précarité alors que c’était le cas », explique la coordinatrice. Elle poursuit : « Il a également fallu travailler sur la formation de certains professionnels qui n’étaient pas formés sur la question des règles ».

Jusqu’à la fin du mois, le Mammobus va continuer d’arpenter les routes d’Île-de-France, en passant par Dugny, Chanteloup-les-Vignes ou encore Melun. Khalid a pour ambition de dupliquer cette opération afin que le bus puisse intervenir deux fois par an, et avoir ainsi deux fois plus de chances de sauver des vies.

Félix Mubenga

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