Retour au début du mois d’octobre 2006. Nous sommes à Dugny, petite ville relativement tranquille, sorte de pont entre la misère de La Courneuve et les Jets privés du Bourget. Ce soir-là, Dimitri T., probablement en manque, violente sa compagne, sort sa carabine et menace à tout va. Il fracture la mâchoire de son beau-père et s’enfuit dans le Nord, son département de naissance. Toute la famille porte plainte contre lui. La police, qui le connaît pourtant, ne l’interpelle pas.

Le 16 octobre, Dimitri T. revient à Dugny pour récupérer des « affaires » avec deux copains. Il fanfaronne avec sa carabine. Voyant la police arriver, il refuse de se laisser appréhender. Il s’enferme dans le logement et contraint Aurélie, la sœur de son ex-compagne, à rester avec lui. L’affaire tourne mal, il la prend en otage, la pose sur le rebord de la fenêtre du 4e étage et menace de la lâcher si la police intervient.

Deux heures passent : les forces de police entourent le périmètre. Aucune mesure de sécurité n’est prise pour parer à une chute, l’accès en est interdit aux pompiers, la demande d’intervention du Raid n’est pas confirmée. Les voisins et les jeunes venus des cités voisines qui assistent impuissants au drame sont violemment repoussés. La tension monte avec les CRS, manifestement plus habitués à ce genre d’échanges.

La commissaire du secteur (La Courneuve / Dugny) avait pris ses fonctions juste la veille. L’ancien commissaire, comme d’habitude, n’est pas resté plus de douze mois en place. La police semble considérer que le « gamin » bluffe, qu’il n’osera jamais mettre à exécution sa menace. Alors que les deux jeunes restés dans le logement supplient de ne pas intervenir, la police force la porte. Dimitri T. pousse Aurélie, qui meurt sur le coup, puis saute à son tour.

Lui a survécu. Il est incarcéré à Fresnes, après un passage à l’hôpital. Comme il n’était pas transportable, il n’a pas été surveillé. Cela lui a permis d’inonder sa belle-famille de messages venimeux et de coups de fil agressifs.

Le jour de la cérémonie funèbre, célébrée dans le Pas-de-Calais, la police locale, décidément très en forme, appelle directement la maman d’Aurélie : « On nous a dit que des jeunes de la Seine-Saint-Denis vont venir aujourd’hui. Mais vont-ils tout casser ? » Réponse de la maman : « Non, Monsieur, dans le 93, nous sommes respectueux. »

Aurélie R avait 19 ans, elle était belle comme un rayon de soleil et venait de trouver un poste d’esthéticienne. Pour sa mère dévastée mais incroyablement forte, cette histoire terrible est loin d’être terminée : Trois procès sont prévus, celui du meurtrier évidemment suivi de celui des deux jeunes copains et enfin, celui des policiers.

Ariane

Ariane

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