Lors de mes recherches de témoignages concernant l’arrestation des Maliens dans la petite bourgade de Monfort-sur-Meu, plusieurs personnes m’ont conseillé d’aller voir le curé de la ville. Je sonne au presbytère, le père Desmots m’ouvre. Je me présente et lui explique la raison de ma visite. Peut être allait-il m’envoyer paître, il avait sans doute autre chose à faire, mais comme dans les films, le père Desmots est d’une sérénité exemplaire. Il me propose de rentrer. Nous arrivons dans la cuisine; autour de la table, deux sœurs et un Africain. « On en a planqué un ici ! » me dit-il en rigolant. Mais il plaisante, bien évidemment, cela m’aurait fait un scoop vraiment top ! L’Africain, c’est Patrick, un ami de la maison.
On s’assoit et on commence à papoter. Patrick est originaire de Centre-Afrique; étudiant en droit, il s’est installé à Paris en 2000 pour continuer ses études, mais les choses se compliquent financièrement, il doit donc travailler pour vivre. Il trouve des petits jobs dans des magasins, et finit par atterrir en 2004 à Rennes où il s’engage dans une formation pour devenir conducteur de poids lourd. Il échoue à cause de la partie informatique. Il entend dire qu’à 25 km de Rennes, à Monfort-sur-Meu, un abattoir recrute du personnel. Une fois embauché, il s’installe dans la ville, et un beau jour il sonne chez le Père Desmots pour demander si quelqu’un pouvait l’aider en Français. L’oral était bon, mais c’est à l’écriture que Patrick est aidé par une sœur, qui est également ancienne institutrice et secrétaire du presbytère. C’est ainsi que l’amitié s’est créée entre eux. Il y a 6 mois, Patrick est retourné pour une visite familiale en compagnie du Père Desmots.
Patrick me raconte ensuite le jour de l’arrestation des Maliens. Lorsqu’il est sorti de chez lui, il a vu un Malien menotté par les policiers. Patrick est passé devant les policiers qui l’ont tout de suite arrêté. Il propose aux agents d’aller chercher ses papiers à la maison, ces derniers ne veulent rien savoir. Les policiers décident de l’embarquer de force, Patrick s’est mis à crier. Les policiers ont finalement laissé Patrick aller chercher ses papiers chez lui. Et après présentation, tout est rentré dans l’ordre. Mais une fois arrivé au travail, tous ses collègues Maliens étaient absents !
Aujourd’hui, Patrick continue de travailler à la COOPERL où le patron a annoncé une baisse de cadence depuis le départ des Maliens. Le curé et les sœurs continuent leur mobilisation. D’habitude, je ne prends jamais parti, mais j’espère que Montfort-sur-Meu récupérera ses Maliens.
Chou Sin
Chou Sin –