Négocié depuis le mois de juillet 2013, le Tafta, pour TransAtlantic Free Trade Agreement, vise à libéraliser le marché entre les États-Unis et l’Europe. Une menace pour les règles commerciales et l’équilibre économique de la zone euro. 

L’économie n’est sans doute pas votre tasse de thé et malheureusement, ceux qui la manient en profitent bien. Dans ce monde de capitalisme sauvage, ces économistes sont « présentement au volant de nos sociétés, alors qu’ils devraient être sur la banquette arrière », comme l’a si bien inscrit John Keynes. Ce qui se joue bien loin de nous citoyens de banlieues, dans les salons dorés du Quai d’Orsay, ou dans les confins des bureaux chromés de Bruxelles entre financiers, actionnaires et bureaucrates, alerte peu notre attention. Alors que l’on imagine souvent les traités et alliances internationales bien loin de nous, ces derniers ont en fait une véritable mainmise sur nos choix d’achats les plus ordinaires.

Alors que le traité de Lisbonne en 2009 (européistes, passez votre chemin!) avait déjà bafoué la majorité du « NON » du peuple Français, une autre signature est aujourd’hui en cours menaçant tout aussi sérieusement nos habitudes alimentaires et notre chère Sécu. Vous n’êtes absolument pas au courant ? Rassurez vous, vous faites partie du plus d’un tiers des Français non avertis. On pourrait bien se retrouver avec une invasion de nourriture américaine bourrée d’OGM. Proféré en jargon très juridique, les textes de loi officiels qui fuitent sur le net restent de valeur peu sûres. La discrétion est donc de mise, et peu d’informations quant à l’avancement des négociations depuis 2013, sont divulguées.

Le Traité transatlantique, encore en cours de négociation depuis 2013, veut faire de l’Union Européenne une zone commerciale de libre échange, par l’effacement des barrières douanières et donc de leurs taxes, mais surtout des réglementations sanitaires concernant les produits propres à l’Europe. Bon c’est dit en langue de bois, sur le site de la Comission Européenne.

Ce n’est pas qu’une simple coïncidence, si prononcé en français, l’acronyme TAFTA (TransAtlantic Free Trade Agreement) se révèle être l’homophone du terme « taffetas », qui désigne une étoffe de soie. Un ornement donc, attrayant au premier abord, mais qui dissimule sous sa toile, des projets bien plus fallacieux qui nuisent à la démocratie et qui détruisent la souveraineté populaire déjà bien fragilisée dans notre pays.

En effet, ce traité, signé sans aucun contrôle démocratique, (négocié au total par seulement deux pays), permettrait aux multinationales américaines de pouvoir implanter leurs sites de production, où bon leur semble, donc là où les réglementations seraient les moins contraignantes, et par conséquent moins protectrices pour les travailleurs. En bref, ce sont en fait les principes du Pacte Relatif International aux droits économiques, sociaux et civils de 1966 si chèrement acquis (qui concerne les droits des peuples à disposer d’eux­mêmes, le droit égal de l’homme et la femme, le droit au travail, le droit de conditions de travail justes et favorables, le droit de s’affilier à un syndicat, le droit de grève, le droit à la sécurité sociale etc…) qui seront alors libéralement bafoués. Et pour plus de compréhension, des enjeux économiques internationaux, allez voir la chaine DataGueule, dont voici une vidéo :

httpv://www.youtube.com/watch?v=VtssDE7sfWI

Dans la continuité d’un capitalisme sans gêne, cette forme d’État-providence qui subsiste en France sera occultée par une instance supranationale, qui supervisera tous les secteurs et qui privatisera même les services publics. De quoi, faire retourner dans sa tombe les héros du Front Populaires des années 50 ! Ce traité signe donc l’impossibilité pour les peuples de choisir librement leur mode de consommation, face à l’invasion des produits américains, néfastes pour l’environnement mais surtout pour la santé. On connait déjà bien les problèmes alimentaires des Américains, leurs poulets au chlore et autres OGM. Une constante casse du droit du travail et l’instauration d’une société totale de marché seront les conséquences, d’une mise en place d’un tribunal arbitral qui autorisera les entreprises privées à attaquer en justice les États, si elles considèrent leurs conventions comme contraignant leurs possibles gains et investissements, tout cela devant des avocats très intéressés par le profit, recrutés et payés parmi les plus grandes firmes internationales. Outre tout cela, l’instauration d’un « Conseil de Coopération Réglementaire », composé d’un parterre d’experts, aussi méconnus du public qu’à la solde des lobbies, qui seul dictera et validera les futures lois sans aucune considération pour les assemblées locales et autres communautés d’agglomérations concernées, représente une réelle menace. Le débat sur de nombreux sujets essentiels et l’opinion publique s’en trouveront donc muselés.

Si Alexis Tsipras a bien déclaré qu’il n’accepterait jamais le traité (or, la ratification des 28 pays est essentielle), dans la continuité d’une gauche de plus en plus droitisante qui sévit en Europe, ce traité ne pose pas grand problème à beaucoup d’autres pays.

N’hésitez plus à aller signer la pétition sur le site Collectif Stop TAFTA, pour faire entendre (puisque c’est encore possible) votre voix !

Ikrame Ezzahoui

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