Une actualité pleine de rebondissements à PSA Aulnay : un jugement sera rendu aujourd’hui par le tribunal de grande instance (TGI) de Paris car la CGT a attaqué le PSE (Plan de Sauvegarde pour l’Emploi) engagé à PSA. Malgré tout, peu d’espoir sur ce que cela va changer, d’autant que le processus de réorientation et d’information des salariés est déjà entamé.
Aujourd’hui, le tribunal de Grande Instance de Paris rend son délibéré suite à une plainte déposée par la fédération des travailleurs métallurgie CGT qui déplore l’insuffisance du PSE proposé par la direction de PSA Peugeot Citroën. « Le PSE n’est pas acceptable » : une des phrases répétées à chaque manifestation, à chaque action… Pourquoi est-il inacceptable pour les salariés d’ailleurs ? « C’est tout ce qu’il y’a dedans qui n’est pas acceptable, y’a rien, aucune garantie d’emploi », s’inquiète Abdallah, employé à PSA Aulnay depuis 1999.
Pourtant, à Saint-Denis, le PMP (Pôle de Mobilité Professionnelle) a ouvert ses portes depuis février dernier. Basé sur le volontariat, ce dispositif permet d’accueillir les salariés, une sorte d’espace pôle emploi : postes informatiques à disposition, entretien, conseil, orientation, offres d’emploi.
Un endroit calme, peu de monde le jour où j’y suis allée, quelques employés aux postes informatiques, d’autres en entretiens… Pour le moment le dispositif n’est qu’à la phase de réflexion, et d’orientation des salariés. Ces derniers ne pourront postuler aux offres qu’une fois le PSE validé et, l’entreprise ne peut pas vider l’usine avant la validation de ce plan de lienciement. Si aujourd’hui, la réponse du TGI est en faveur de la CGT, cela repousserait donc le délai pour postuler aux offres (la dernière réunion de validation du PSE étant prévue le 29 avril).
Dans les couloirs des locaux de la Plaine Stade de France, rencontre avec Laurent Vergely, directeur de PSA Aulnay depuis octobre 2010, puis accueil dans son bureau. Oui Laurent Vergely, que nous devions rencontrer lors du dernier Bondy Blog Café.
Vision optimiste de Monsieur Vergely sur ce dispositif qu’est le PMP qui « permet aux salariés de faire murir leur choix » et « d’aider, d’accélérer leur prise de conscience ». Il poursuit en évoquant des procédés d’aide aux ouvriers déjà mis en place, notamment le « dispositif fragile » pour personnel ayant la cotorep par exemple, qui les aide à se réorienter, à se préparer à aller vers des postes en adéquation avec leur restriction médicale. « Les salariés nous questionnent beaucoup, cherchent des réponses, ne les trouvent pas toutes », explique Laurent Vergely, qui avoue lui-même ne pas se préoccuper de son avenir après 2014 : « je fais confiance à mon directeur ». Les 2500 salariés du site n’ont probablement pas la « zen attitude » de leur boss…
Sur les 2500 salariés que compte l’usine actuellement, 800 salariés ont été reçus en entretien au PMP, selon la direction du géant automobile. Un tiers ne se sont pas encore exprimés et un tiers d’entre eux souhaitent la mobilité interne.
Côté salariés, les ressentis sont assez mitigés quant au PMP, pas de grand enthousiasme, voir quelques déceptions. « Tous ceux qui y sont allés m’ont dit qu’il n’y a rien de nouveau, ça sert à rien d’y aller, on apprend rien de plus, tu y fais rien de concret », explique Kash Leon (Franck de son vrai prénom), ouvrier et rappeur qui a sorti son dernier album « activiste » le 15 avril dernier.
Abdallah, n’est pas plus motivé à y mettre les pieds : « ça revient au même car c’est en fonction du PSE et comme on n’accepte pas le PSE… C’est juste une cellule pour calmer la crise et dire « on fait quelque chose pour les salariés.C’est pas eux qui vont t’aider à trouver un travail ».
Basé sur le volontariat, la plupart des grévistes ne s’y sont pas présentés, selon plusieurs employés. Les salariés ne peuvent pour le moment pas postuler aux offres, ce qui expliquerait, peut-être, cette déception. Des entreprises comme la SNCF, la RATP ou encore Roissy ont émis le souhait de reprendre certains salariés de l’usine d’Aulnay pour différents postes (logistiques, conducteur de bus) avec, au besoin, une formation dispensée par l’AFPA.
Tout cela ne sera possible qu’une fois le plan de licenciement validé, ce qui pourrait ne pas être le cas aujourd’hui. Mais, qu’est-ce que cette décision de justice pourrait changer concrètement ? « Si le tribunal nous donnait raison, ça bloquerait le plan de licenciement et on devrait refaire des négociations », explique Jean-Pierre Mercier, délégué CGT qu’on ne présente plus.
Peu d‘espoir de changement pour les employés, on ne se fait pas trop d’illusion. « Ça changera rien, on sait que c’est la direction qui va gagner. Même si c’est positif, c’est pas pour ça qu’on ira travailler. Si ça passe tant mieux pour nous, sinon, tanpis », explique Abdallah. Pareil pour Mohamed, lui aussi ancien d’une dizaine d’années : « pour moi, personnellement, ça ne changera rien du tout, même si c’est positif, ça va juste retarder le PSE de deux mois c’est tout ».
Soixante jours, c’est le temps que gagneront les salariés. Jean-Pierre Mercier n’exclut pas de faire appel si la décision de justice ne leur est pas favorable.
Hier encore, on apprenait la possibilité d’une fermeture en 2013 par le directeur financier de l’entreprise automobile, démentie ensuite par sa direction. « Les déclarations d’hier étaient avant tout d’impressionner les salariés et de leur faire du chantage, sauf que les salariés ne marchent pas au chantage », selon Jean-Pierre Mercier.
A la sortie d’usine, beaucoup moins de monde, plus autant de salariés qu’avant. « C’est vide, y’a plus autant de monde ,» pouvait-on entendre il y a quelques jours à 14h30, heure du changement d’équipe. L’usine se vide, et ça se voit !
Imane Youssfi