Le 12 juillet dernier, la direction de PSA Peugeot Citroën annonçait officiellement ce qui était devenue une évidence : la fermeture du site d’Aulnay-sous-Bois pour 2014.  Les syndicalistes et salariés sont toujours prêts à défendre le maintien de leur usine et de leurs emplois. Pendant ce temps, les projets fleurissent  autour de l’usine. La rénovation urbaine se poursuit dans les quartiers nord d’Aulnay et l’arrivée du Grand Paris  rendra la ville plus accessible et attractive.

L’usine est bien placée : elle est proche de trois autoroutes (A1, A3, A 104), le centre commercial Parinor est quasiment collé, l’aéroport de Roissy est à dix minutes et l’aéroport d’affaires du Bourget en est à quinzaine de minutes à peine. L’arrivée du  Grand Paris rendra cette zone beaucoup plus intéressante. Une gare de métro automatique sera implantée dans le Nord d’Aulnay-sous-Bois et devrait relier la gare du Bourget et Clichy-Montfermeil. Ces projets vont avoir un impact considérable sur la commune, comme l’explique la société du Grand Paris : « Le projet du Grand Paris et du réseau de transport public du Grand Paris auront des impacts majeurs pour la ville d’Aulnay en termes de développement local et d’attractivité territoriale, et de positionnement dans l’aire métropolitaine parisienne. Ils favoriseront le désenclavement de la partie nord de la ville et auront un effet levier en matière de développement et de redéploiement économique, d’accessibilité et de création d’emplois, d’aménagement urbain, d’amélioration du cadre de vie des habitants plus particulièrement, dans le cadre de la rénovation urbaine et sociale du quartier de la Rose des Vents. »

Le 8 décembre 2011, la ville a décidé par délibération le principe de cession du terrain qui accueillera la gare automatique, à la société du Grand Paris. Le projet d’acte de vente a lui été décidé à l’unanimité lors du conseil municipal le 5 juillet 2012 et a été annoncé par communiqué de presse, par la ville d’Aulnay-sous-Bois, le lendemain.  « Ce sont des investissements colossaux, des investissements en milliards » explique Gérard Ségura, maire socialiste d’Aulnay-sous-Bois à ce sujet.

Ce projet du Grand Paris à Aulnay, a un impact considérable sur l’usine PSA. Le terrain du constructeur automobile était estimé à environ de 300 millions d’euros avant la finalisation de cette initiative. Avec l’arrivée du Grand Paris, sa valeur va exploser.  Le maire d’Aulnay-sous-Bois est très explicite, « je le dis clairement, PSA veut spéculer sur le terrain ! » Pour lui, le constructeur automobile essaie de tirer profit d’une plus-value sur le terrain qui dispose « d’une position stratégique ». L’élu s’inquiète que la direction du géant automobile ait cessé toute discussion de mise à disposition de terrain, pour la municipalité, dès lors que le projet du Grand Paris se soit concrétisé.

Pendant ce temps, plusieurs entreprises françaises et européennes se sont montrées intéressées par le terrain de PSA à Aulnay, dont un opérateur logistique, une entreprise aéronautique (avec qui Gérard Ségura aurait déjà eu contact). Quelques rumeurs également concernant GEFCO (également filiale de PSA) et la Société du Grand Paris (pour des ateliers de maintenance des rames de métro). Mais cette dernière sèche quand la question lui est posée. La question du terrain est tabou, la reconversion du site aussi. La direction de PSA Peugeot Citroën avait évoqué un rassemblement de succursale, d’activité de regroupement. « Rien de solide » selon Gérard Ségura, qui est clair : « Ce que je souhaite c’est que le site ne ferme pas ».

« Ce n’est pas la première fois que PSA envisage de quitter Aulnay-sous-Bois »

 

« Gérard Segura travaille dans son coin, nous ne sommes jamais avertis de rien à part par voie de presse » accuse Franck Canarozzo, conseiller municipal d’opposition UMP (ancien adjoint au précédent maire d’Aulnay Gérard Gaudron avant 2008, en charge de la sécurité et de l’environnement).   Le politique pense que les positions de Gérard Segura restent floues. Sur la question du terrain, il y voit « une localisation intéressante » grâce au Grand Paris, mais l’intérêt des entreprises pour ledit terrain serait au stade des rumeurs, « on n’a pas d’élément pour le prouver ».

Franck Cannarozzo a fait partie de l’équipe municipale qui a précédé l’élection de Gérard Segura en 2008. Le cas PSA, il connait bien. « Ce n’est pas la première fois que l’entreprise envisage de quitter Aulnay ».  Pour lui, la situation automobile en France, expliquerait principalement la décision de fermer le site d’Aulnay mais pas seulement. Les relations entre la municipalité et la direction de PSA auraient motivé ce plan social. « Les relations de la mairie avec la direction de Peugeot n’ont pas été pour contrecarrer ce choix. La ville a pris parti pour des salariés à plusieurs reprises lors de conflits internes à PSA Aulnay. La ville a pris parti alors que ce n’est pas son rôle en tant qu’élu. » Des décisions qui ont été prises depuis l’élection de Gérard Segura selon lui. Pour autant, il ne cache pas que PSA envisageait déjà de partir et ce, même quand la droite étaient à la mairie. Il avoue qu’ « il y a toujours eu du répondant de la part de la ville».

Pour autant il encourage les salariés à se « battre pour que le site dure plus longtemps, que tout soit fait pour sauver les emplois mais aussi penser au reclassement à la hauteur des espérances des salariés ». L’ancien adjoint du maire reste plus pessimiste par rapport à l’action gouvernementale « le gouvernement n’empêchera pas PSA Aulnay de fermer », même avec des moyens de pressions. Pour lui, la situation économique aura le dessus, un argument qu’il appuie en évoquant la première prime à la casse datant des années 1990.  « Ne pas se battre serait impensable mais faire croire aux salariés que l’usine sera là dans dix ans, c’est utopique » ajoute-t-il.

Contacté à plusieurs reprises par le Bondy Blog, Jean-Pierre Mercier, délégué syndicale CGT de PSA Aulnay, ne s’est pas exprimé à ce sujet. La porte lui est toujours ouverte s’il le souhaite.

Imane Youssfi

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