Giuseppe est en classe de troisième, il a une idée précise de ce qu’il aimerait faire plus tard. Mais, en additionnant les études et les années de cotisation, l’âge de la retraite lui semble bien lointain.
J’ai 14 ans. Et en calculant bien, je devrais, si rien ne change, être à la retraite en 2069. J’aimerai devenir avocat. Comme ce ne sont pas les études les plus courtes, je devrais finir, si je ne redouble pas, à 27 ans. Ce à quoi on ajoute 43 années de cotisations, et me voilà à la retraite à 70 ans. Si tout se passe bien.
Même si tout ça, c’est dans 55 ans, je suis tout de même allé manifester en septembre dernier, contre le projet de réforme des retraites. Plaider des causes au tribunal jusqu’à 70 ans me semble impensable. Et pour mes camarades, même son de cloche.
Yasmina, 13 ans, ne sait pas encore quel métier faire, mais elle « pense que cotiser 43 ans c’est bien trop long, à moins que j’aime vraiment mon travail ». Tandis que Mathilde, 12 ans, qui veut devenir vétérinaire, est impressionnée de savoir qu’elle sera à la retraite à 68 ans, encore une fois si tout va bien.
Mais quand je demande pourquoi ils ne sont pas venus manifester contre le projet de réforme des retraites, Marco, 13 ans, répond que « la retraite est loin et que ça ne nous regarde pas », d’autant plus qu’il ne sait pas encore quel métier faire. Parler à des jeunes de la retraite quand ils ne savent pas encore quel métier ils exerceront plus tard leur semble abstrait.
Pour certains jeunes de mon âge, la politique se résume au journal télévisé. Comme Julie, 13 ans : « le soir j’écoute avec mes parents les informations et je pense que les politiques racontent beaucoup de choses avec des mots compliqués ».
C’est peut-être pour cela aussi que certains jeunes sont déconnectés de la politique. Le langage et le vocabulaire ne sont pas adaptés. Et aucun effort n’est fait dans ce sens. Ce qui est une erreur, certainement, parce que l’implication de cette génération, des 13-14 ans sera inévitable dans le futur, un futur assez proche même. Les seniors resteront sur le marché du travail, de plus en plus tard, mais pour ceux qui en sortiront, quel employeur voudra bien embaucher un homme ou une femme de 66 ans ?
Quant aux jeunes, ils commenceront à travailler de plus en plus tard, car les seniors seront toujours en poste. Cela dit, d’ici 55 ans, j’ai le temps d’en voir venir de nouvelles réformes et de grandes avancées médicales sur l’espérance de vie, mais d’ici là, je préfère aller manifester.
Giuseppe Aviges