À Chanteloup-les-Vignes, c’est l’accalmie après un dimanche et une nuit agités. Certains immeubles portent encore les stigmates des heurts qui ont agité le quartier de la Noé. Le déluge de violences a marqué petits et grands.

A quelques mètres de l’endroit où tout a commencé la veille, des jeunes, excédés, témoignent volontiers du climat délétère qui règne entre eux et les forces de l’ordre depuis plusieurs semaines, et surtout de ce qui s’est passé dimanche 16 mars dans l’après-midi durant laquelle six policiers ont été blessés. Nordine, d’abord, raconte : « Tous les dimanche on se réunit là-bas, après le foot, on se pose, on discute on rigole. Puis hier, la police est passée une fois, deux fois, trois fois. Puis ils se sont mis à charger un gamin de 15-16 ans, parce que sois disant il aurait volé un sac. Mais s’il avait fait quelque chose, il aurait essayé de fuir je sais pas, il les a vus arriver, il a rien fait. Ensuite ils ont commencé à frapper un grand de 30 ans, ils lui ont cassé son épaule. Après, ils nous ont braqué alors qu’il y avait des enfants. Ils viennent pour nous provoquer, nous insultant de sale Noir et de sale Arabe. Ensuite ils ont tiré sur des femmes et des enfants avec des Flashball. Ils ont même tabassé quelqu’un qui filmait. Hier ce qu’ils ont fait, ça s’appelle une bavure, ils ont dépassé les limites, ils sont partis trop loin ».

Ce climat de tension, les jeunes du quartier l’ont constaté depuis l’arrivée d’une nouvelle brigade, départementale, qui patrouille à Chanteloup. Une présence policière que les jeunes, mais également les plus âgés, ne comprennent pas tant ils jugent leur ville calme. Ainsi, M. Osben, habitant du quartier âgé d’une cinquantaine d’années et candidat sur une liste citoyenne pour les municipales comprend les jeunes, « on commence à en avoir marre, on envoie les flics mais est-ce qu’il ne vaudrait pas mieux leur trouver des formations, aux jeunes ? C’est inadmissible ce qui s’est passé, la maire veut juste montrer qu’elle sait faire le ménage à quelques jours des élections, mais tout le monde peut se promener ici, aujourd’hui je suis heureux d’habiter à Chanteloup. Les policiers nous traitent comme si on était des voyous lorsqu’ils nous contrôlent. Les parents en ont marre et ils comprennent très bien la colère des jeunes, ils les ont même défendus hier. »

Du côté des pouvoirs publics, les réactions ne se sont pas faites attendre. Les habitants du quartier ont été reçus lundi par le préfet et le commissaire, mais l’un d’entre eux est déçu : « Ils n’ont fait que rappeler nos droits mais nous, on attendait des réponses par rapport à ce qui s’est passé. Mais on n’en a pas eues, qu’est-ce que que vous croyez qui va se passer si on n’a pas de réponse ? » Les autorités de la ville sont également mobilisées, ainsi la maire UMP Catherine Arenou et le candidat socialiste, Youssef Abdelbahri se sont rendus au commissariat et ce dernier nous a informés qu’une enquête était ouverte par l’IGPN (Inspection Générale de la Police Nationale) suite aux événements de dimanche 16 mars.  Tous deux ont appelé au calme et à la patience mais les jeunes sont excédés, « y a eu cinq personnes interpellées, on nous demande d’être patients, mais allez arrêter des personnes en colère, on a tiré sur nos mères, nos sœurs, nos petits frères quand même ».

Pour la maison locale brûlée, l’école maternelle endommagée, les jeunes savent bien que les habitants sont les premiers lésés, que « c’est bête » mais c’est la colère, les humiliations qui s’accumulent qui les ont poussés à ça. « J’ai honte de ce qui s’est passé, j’ai honte de mon pays. Les agents ils devraient être impeccables parce que les gens paient des impôts pour eux et là, ils nous massacrent avec nos impôts. On en a ras-le-bol. »

Latifa Oulkhouir

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