L’ambiance d’une piscine de banlieue est sympa quand on a entre 14 et 20 ans. Drague et bikinis flashy sont de rigueur lorsqu’on s’y rend en bande. A Bobigny, le lieu de repérage c’est la pelouse extérieure. Ça papote, ça rit, ça écoute de la musique et ça bronze au soleil en cachant la direction de ses yeux derrières ses Gabanna. Chacun se mate et quand on a un ou une ami(e) un peu siphonné(e), on peut être sûr qu’il ou elle ira nous balancer auprès de la personne repérée.

Depuis deux ans, la mode sur la pelouse, c’est le narguilé. Pas une après-midi sans que la fumée parfumée ne flotte dans l’air aux heures de pointes. Les mecs savent que les parfums nouveaux sont des attrape-filles. Ces petites jeunes abonnées aux salons de thés orientaux équipés d’une salle de chichas. Du coup, ça drague et sa se taquine aux yeux des mamans qui râlent car les jeunes sont trop bruyants. En même temps, en pleine journée en piscine extérieure, il ne peut y avoir un silence d’église…

Les derniers modèles de maillots de bains sont de sortie. Les trikinis dorés et les bikinis sans bretelles sont nombreux. Il y a même eu des filles qui ont quitté subitement les lieux sans expliquer pourquoi. Après enquête auprès de leurs copines, j’ai pu comprendre qu’elles avaient vu une autre fille avec le même maillot de bain. Sacrilège ! Ici, c’est demi-baignade, ces jeunes filles très pointues sur leur apparence, ne s’aventurent pas dans l’eau, surtout qu’il faut porter un bonnet. Elles vont simplement à la douche, se passe de l’eau sur le corps en faisant extrêmement attention à ne pas mouiller leurs cheveux. Brushing oblige…

Mais quand les garçons sont touchés par la chaleur, ils se mettent à deux, attrape une de ces minettes, qu’ils connaissent bien sûr, et alors, soit elle atterrit dans le bassin, soit sous la douche toute entière. Merci à eux de nous faire entendre ces cris de filles, stridents comme comme si elles étaient plongées dans de l’eau à moins 10 degrés.

Et puis, il y a les rendez-vous cabines. Quand un mec repère une fille, il envoie son pote ou une amie (si elle est sympa) dire à la jeune fille qu’il aimerait parler avec elle. Si elle est d’accord, elle le rejoint au fond des cabines des vestiaires. Et là, à l’abri des regards jaloux et curieux des jeunes, ils peuvent discuter et plus si affinités. Les filles ne se gênent pas non plus pour envoyer leur copine ou carrément se déplacer elles-mêmes et dire « t’es mignon toi, t’as quel âge ? » avec le chewing-gum bien en évidence. Mon petit frère en a souvent fait les frais. Il me demandait de dire que j’étais sa petite amie car il a la sienne et en est fou amoureux (il me tuerait s’il lisait ça…). Manque de pot, les ragoteuses (celles qui passent leur temps à piailler sur la vie des autres) disaient à haute voix : « Pourquoi tu mens c’est ta sœur ! » J’ai voulu en balancer des gifles…

Mais bon, ce n’est qu’une ambiance estivale. Après c’est école et boulot. On se recroise dehors, on s’ignore et puis l’année suivante, sur cette même pelouse, on se fait la bise comme si on se connaissait depuis toujours et rebelote, brushing, cris, chichas et compagnie. Bonne baignade et attention à ne pas rester trop longtemps dans l’eau, mesdemoiselles, votre verni risquerait de s’écailler…

Inès El Laboudy

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Inès El Laboudy

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