A quelques mètres du lieu du drame où Laramy et Moshin ont trouvé la mort à l’âge de 16 ans, des jeunes de Villiers-le-Bel se sont réunis samedi dans le silence afin de protester contre plusieurs choses : la médiatisation à outrance des interpellations ; l’utilisation exclusive de témoignages anonymes pour inculper des individus, sans preuves matérielles ; les images dégradantes parues dans Paris Match ; la lenteur de l’enquête sur les circonstances de la mort de leurs amis en novembre 2007.

Parmi ces jeunes, certains ont passé une partie de la semaine en garde-à-vue. C’est le cas d’Abderrahmane, qui a été retenu deux jours dans le commissariat de Cergy-Pontoise, avant d’être innocenté. Il a été mis en cause par des témoignages anonymes, qui l’ont « formellement identifié ». Ces accusations ont vite été défaites, car le jour des émeutes, ce jeune homme ne se trouvait pas à Villiers-le-Bel et pouvait le prouver par un alibi.

Un alibi, quelle chance ! Car d’autres aujourd’hui croupissent en prison, après avoir été dénoncés, là aussi, là encore, par des témoins anonymes, alors que les auteurs de violences contre les forces de l’ordre étaient pour la plupart cagoulés. Le fait d’avoir proposé de l’argent en contrepartie de témoignages à des personnes qui, pour beaucoup, sont dans des situations précaires, n’incite-t-il pas à porter des accusations mensongères ?

Sur la place des Burteaux, les jeunes recueillis en silence ont affiché des slogans comme «  y a-t-il une justice en France ? » ou « justice pour Laramy ou Moshin ». Ils ont parsemé les murs du quartier de dizaines de slogans. A l’issue de ce rassemblement, certains ont pris la parole pour demander l’arrêt des violences et le retour au calme dans la ville. Les gens ont applaudi et ont ensuite quitté la place avec calme, loin des clichés et des stéréotypes.

Notre chère Montesquieu serait aujourd’hui abasourdi en voyant comment le gouvernement a fait fi de la séparation des pouvoirs dans l’affaire de Villiers-le-Bel. En effet, le pouvoir exécutif n’a-t-il pas instrumentalisé le pouvoir judiciaire en lui imposant un calendrier et une obligation de résultats, à trois semaines d’une échéance électorale, les municipales ? L’Etat et les individus concernés ne sont pas à l’abri d’une erreur judiciaire.

Chaker Nouri

Chaker Nouri

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