Mardi 3 avril. Il est environ midi. Tolbiac, un des sites de la Sorbonne Paris-1, est noir de monde. Dans la fosse qui devance l’université, un attroupement s’est formé. Une centaine de personnes environ est massée. Curieux, je m’approche. Au moment, où j’atteins le groupe, un homme, le visage ensanglanté, me frôle, flanqué de deux agents de sécurité. Plié en deux, il se tient la tête entre les mains, d’où perlent quelques gouttes de sang. On m’apprend qu’il s’agit d’Antoine Dhiers, président du MET, le Mouvement Etudiant – un syndicat à tendance très droitiste.

Il vient d’être passé à tabac par des militants de SUD, le syndicat d’extrême gauche. Un des membres de SUD m’explique : « Il nous a lancé une provocation. Nous, on n’aime pas ces fascistes, on ne veut pas d’eux à la fac. Quitte à les faire partir physiquement. » Un discours que je retrouve sur leurs tracts.

Ce sont ces tracts qui sont à l’origine de la bagarre. Tolbiac est en période d’élections. Tous les jours, depuis deux semaines, de 8 heures à 18 heures, impossible de se déplacer dans la fac sans tomber sur des militants, qui viennent défendre leurs couleurs et leurs idées, afin de briguer des sièges aux conseils d’administration. C’est pour distribuer des tracts que le président du MET était venu devant l’université. Il en est reparti en ambulance.

Depuis, l’affaire a pris une tournure un peu particulière. Antoine Dhiers a porté plainte contre un de ses agresseurs – formellement reconnu sur l’une des vidéos de l’agression. Le lendemain, la police était aux portes de l’université, emmenant l’individu en question vers des déboires judiciaires.

Pourtant, ce n’est pas la première fois que de tels évènements se produisent. Election rime bien avec tensions et dans ces périodes, les plaies ouvertes ont tendance à s’élargir un peu plus encore.

C’est un peu ce qui se passe entre le MET – anciennement UNI – et SUD. La semaine dernière, déjà, des militants de SUD, postés sur les hauteurs de Tolbiac et armés d’œufs,  avaient mitraillé les militants du syndicat de droite. Avant de s’en prendre physiquement, un peu plus tard, à la responsable du MET pour Paris 1. Elle aussi a déposé une main courante. Les militants du MET ont également relevé « plusieurs menaces de mort » proférées à leur encontre.

Pour essayer de comprendre leurs motivations, j’ai cherché à contacter les syndicalistes de SUD. Malgré un premier espoir de réponse, la porte m’est finalement restée close. Silence radio.

Du coté du MET, en revanche, on donne de la voix et crie au complot. Pour Adrien, un militant, « SUD créé la provocation en arrachant nos tracts. Si on tire en retour, ils n’hésitent pas à mettre des droites. »

Et quand on s’étonne que la fac ne fasse rien, le voilà de rétorquer : « Un des dirigeants de Tolbiac a dit que notre présence à elle seule constituait une provocation. »

Entre temps, les résultats des élections sont tombés. Seulement deux sièges pour le MET, qui a demandé une révision des résultats, arguant du fait que deux jours de tractage leur ont été amputés. En somme, la démocratie à Tolbiac a de bien beaux progrès à faire.

Hugo Nazarenko-Sas

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