Après les multiples grèves d’enseignants de mon lycée, les professeurs ne baissent pas les bras. Ils changent de méthodes afin de se faire entendre sur la réforme des lycées (« le nouveau Lycée 2010 »). Lorsqu’ils nous avaient distribué des feuilles nous appelant à faire grève avec eux, peu d’entre nous s’étaient mobilisés. Soit parce qu’ils n’avaient pas compris le but et l’utilité de la démarche, soit parce que ce qui ne les concernent pas directement ne les intéressent pas outre mesure. Pour continuer à militer contre cette réforme, les professeurs du Lycée Parc des Loges à Evry (91) ont ainsi décidé d’arrêter de noter les élèves.

« Plus de notes à partir de maintenant », nous a annoncé la prof de maths. Cette nouvelle en a surpris plus d’un. Même les plus dissipés ont pris la peine de tendre l’oreille. Plusieurs élèves étaient mécontents et surpris. Si les profs ne notent plus, ce n’est pas par fainéantise mais plutôt pour interpeller les parents, disent-ils, avec qui ils comptent faire une réunion prochainement.

Près de la moitié des enseignants du lycée commencent à adopter ces méthodes. Notre professeur de mathématiques a, elle, décidé de noter avec des lettres : A pour très bien , B pour bien , C pour moyen et D pour mauvais. Elle nous a aussi expliqué entre quelle note et quelle note les lettres A , B , C et D se situaient. Par exemple B c’est entre 12 et 16 et A entre 16 et 20. Ce qui lui a valu des réflexions du genre : « Pfff c’est pourri votre truc, vous vous êtes crus aux States ou quoi ?! »

La professeur d’anglais participe elle aussi à cette « néo-rébellion » mais ne compte pas mettre des lettres. Pour elle, seules les appréciations sont utiles, elles permettent à l’élève de cibler ses lacunes ou de se sentir encouragé si l’appréciation est bonne. De plus, selon elle, les élèves se fixent trop sur les notes et oublient le reste. « C’est la course aux notes » dit-elle. Avec ce système de notation, il ne s’agit pas tant d’évaluer les connaissances à long terme, mais plutôt de réviser la veille au soir, à 22 heures, pour essayer d’obtenir un 14/20 le lendemain. Pourquoi les notes comptent-elles plus que le travail quotidien ?

Peut-être parce que ce que l’on nous enseigne est trop général. Les élèves ne voient sans doute plus trop l’intérêt d’apprendre des formules « qui ne leur serviront pas plus tard », alors ils s’empressent de les mémoriser la veille pour décrocher LA bonne note. Puis une semaine après les connaissances sont oubliées dans un coin de la tête, qu’on tentera de faire sortir lors des grandes épreuves comme le bac blanc ou le bac. Un parent d’élève m’a confié que les appels à la mobilisation des enseignants ne serviraient pas à grand-chose, car les parents, à l’entendre, ne leur manifesteraient pas leur soutien.

Silvia Sélima Angenor

Silvia Sélima Angenor

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