Si les cas d’infanticide se comptent annuellement sur les doigts d’une main, les éléments du Groupement national des sapeurs pompiers et leurs collègues de la gendarmerie de Louga ne sont pas dupes. Il y a bien plus de cas d’infanticides que ceux consignés dans leurs registres. La loi du silence qui prévaut dans les familles dissimule beaucoup de petits cadavres aux autorités.

« De juin 2008 à nos jours, nous avons découvert des nouveau-nés enterrés, abandonnés dans des poubelles ou jetés dans des fosses septiques. Souvent aussi, des fœtus sont jetés dans les rues. Dans la majorité des cas, la gendarmerie n’arrive pas à trouver de coupables mais les soupçons se portent souvent sur les épouses d’émigrés que personne n’ose dénoncer », affirme l’adjudant-chef Cheikh Faye du Groupement national des sapeurs pompiers (Gnsp) qui précise que le nombre officiel de cas depuis juin 2008 est de six.

Mamadou Fall, officier de gendarmerie à Louga confirme les propos de M. Faye. Il n’oubliera pas l’enquête qu’il a menée au village de Ndiagouré. « Nous y avions constaté un cas d’infanticide. La femme était mariée à un émigré qui était depuis cinq ans en France sans donner signe de vie. La femme ne recevait ni mandat ni coup de fil de son conjoint. Voilà les raisons qu’elle a invoquées pour justifier son acte. » A en croire M. Fall, les habitants du village qui avaient remarqué la grossesse ont constaté que le ventre de la dame était redevenu plat. Ainsi, la rumeur publique a enflé à tel point que la brigade de gendarmerie de Louga a été saisie.

« Nous avons ensuite ouvert une enquête et avons effectué une descente, chez sa mère, à Kébendeute. En effet, elle s’y était réfugiée après avoir été répudiée de Ndiagouré suite aux soupçons d’infanticide. Je l’ai interrogée et, sans hésiter, elle a reconnu les faits. Elle a expliqué que comme son mari ne l’entretenait plus, elle s’est lancée dans le commerce de la chair pour subvenir à ses besoins. Après avoir accouché, elle a inhumé l’enfant dans sa chambre. Nous sommes partis avec les services d’hygiène pour déterrer le cadavre qui était en état de putréfaction avancée. Cette femme a été arrêtée et jugée par la cour d’Assises de Saint-Louis », raconte M. Fall.

Des cas de ce genre, l’officier à la mémoire prodigieuse en raconte à la pelle même s’il observe que de plus en plus de femmes ont recours à la planning familiale : « 90% des femmes qui font la queue pour se procurer des contraceptifs dans les hôpitaux sont des épouses d’émigrés. » Cause de l’infanticide, l’adultère est une réalité pour certaines épouses d’émigrés minées par la solitude et le manque d’affection. A D, 24 ans, avoue sans ambages qu’elle ressort avec son ex-copain des mains duquel son mari l’avait arrachée. « Il sait que je ne peux pas l’attendre longtemps. J’ai demandé le divorce à deux reprises mais ma famille est impressionnée par ses largesses de sorte que personne ne me soutient quand je veux me libérer et refaire ma vie. Alors, j’ai renoué avec mon ex », dit-elle, un brin cynique.

Le gendarme Mamadou Fall ajoute : « La majorité des épouses d’émigrés ne sont pas fidèles. Elles commettent l’adultère et multiplient les relations avec d’autres hommes. Parfois même avec leurs beaux frères restés au pays ou avec leurs anciens copains. On l’a constaté pour avoir dirigé des procédures d’infanticide, de violence, voie de faits dont l’origine est l’absence des émigrés. Comme la culture du « Kersa » (pudeur en Wolof) est très ancrée dans cette région, les gens rechignent à régler ce genre de problèmes au tribunal. Ils préfèrent laver le linge sale en famille. »

Khady Lo

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Khady Lo

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