Au milieu du square des Cardeurs, dans le XXe arrondissement de Paris, un rassemblement reproduisant en cœur une même et seule chorégraphie surprend les passants. Sous le soleil de midi, la curiosité de certains les poussent même à rester quelques instants. D’autres sautent même le pas en se mêlant à la joyeuse troupe. François Liu Kuang-Chi mène la danse. Il explique à ses élèves les mouvements tout en les exécutant. Le professeur, toujours à l’écoute, prend le temps d’articuler chacun de ses gestes minutieusement.

Respiration, concentration, exploration des sensations internes sont au centre de cet atelier de Tai Chi Chuan, qui s’inscrit dans le cadre du festival « Traditions en Mouvements ». Maître Liu indique aux participants que cet art martial a été conçu pour harmoniser l’état mental et physique de chacun, redonner du tonus. Le temps semble figé au rythme des exercices.

Comprendre les lois et les principes de ces danses dans l’espace et dans leur rapport avec nos corps

Ori Gershon est à l’origine de cette première édition. « Je viens de la danse contemporaine, j’ai découvert la danse turque il y a quelques années ici au théâtre CRT Saint-Blaise dans le XXe arrondissement dans laquelle je me suis sentie plus libre », se remémore la directrice artistique de l’association Artaxe qui est à l’initiative du festival. La danseuse et chorégraphe enseigne aujourd’hui différentes danses turques en France et en Turquie. L’idée du projet : mettre en avant les danses traditionnelles de différents espaces pour dépasser la dimension folklorique et « comprendre les lois et les principes de ces danses dans l’espace et dans leur rapport avec nos corps ».

Initiation au Tai Chi Chuan au milieu du square des Cardeurs, dans le XXe arrondissement de Paris

Créée en 2015 et basée dans le XIIIe arrondissement parisien, Artaxe est une jeune association « qui questionne les liens entre danse et théâtre dans les arts traditionnels, spécifiquement en Asie ». D’habitude concentrée sur la formation aux danses, Artaxe a, à l’occasion de cet événement, décidé de s’ouvrir au grand public. Et pour cela, l’association a pu bénéficier d’un coup de pouce financier : « Nous avons reçu des subventions de la Mairie de Paris et lancé un appel à projet », souligne Ori Gershon.

Je pratique les arts martiaux comme le Tai chi pour mes problèmes de dos

Tandis que l’atelier de Tai Chi se termine aux alentours de 14 heures, avant de partir les participants prennent le temps d’échanger avec leur professeur. « J’ai toujours fait de la danse pour mon plaisir, j’ai beaucoup pratiqué et dernièrement je pratique les arts martiaux comme le Tai chi pour mes problèmes de dos », décrit Régine Bourdon, ancienne professeure d’arts plastiques à la retraite. « Ce que j’aime bien dans le Tai chi, c’est le fait qu’on ne sent pas l’effort puisque c’est chorégraphié et en même temps on peut y trouver plusieurs bienfaits pour la santé », poursuit-elle.

Après une longue pause bien méritée, les participants reviennent au théâtre CRT Saint-Blaise mais cette fois pour assister à un atelier de danse autour des traditions des Amis, aborigènes de Taïwan, dirigé par le chorégraphe taïwanais Fangas Nayaw. Installé dans une des salles du théâtre, le groupe se réunit en cercle autour de leur professeur du jour, qui commence par une introduction générale, traduite en français.

Danse autour des traditions des Amis (aborigènes de Taïwan) au théâtre CRT Saint-Blaise

La danse, la marche, le chant, les rituels font partie intégrante du mode de vie des Amis, l’une des 16 ethnies aborigènes de Taïwan. « Il s’agit de chanter de danser et de faire de la musique », conclut le danseur. Le groupe s’exécute sous les directives du professeur et dans un très grand silence qui ne laisse entendre que le son de leurs pas sur le sol. Ces efforts nécessite une parenthèse hydratation. Fangas Nayaw propose aux participants de boire une gorgée d’eau et d’adresser une prière « pour remercier nos ancêtres » comme le veut la tradition à Taïwan.

Aurore Pegaz, 24 ans est comédienne et vient du Raincy, elle déclare ne pas avoir été dérangée par le fait que Fangas Nayaw ne parle pas en français. « Ce qui compte finalement, c’est le langage du corps que l’on commence à comprendre dès les premières minutes », affirme-t-elle avant d’ajouter : « Ce qui est vraiment intéressent dans la découverte d’une danse qui vient d’autre part que d’Europe, c’est que on se rend compte à quel point nos corps sont rigides et contrôlés par le monde qui nous entoure ».

Voir l’autre, découvrir l’autre et s’ouvrir au monde

La journée s’achève au théâtre CRT Saint-Blaise avec un spectacle de flamenco. C’est aux sons andalous de la guitare d’Hadrien Moglia que les plusieurs danseuses passent sur scène tour à tour sous les applaudissements du public. « On vient du XXe arrondissement aussi, et c’était très important de venir aujourd’hui parce que le flamenco est musique populaire et accessible, ça permet d’avoir des moments d’échange et de partage pour faire découvrir une nouvelle culture », raconte va Barthes de formation saxophoniste, est membre de l’association Artaxe.

Charlotte, habitante de Fontenay-sous-Bois, a assisté à chaque atelier de la journée. « Ça a été une très bonne journée, il y a eu des activités variées et puis on finit en beauté, j’avais jamais vu de spectacle de flamenco en vrai, ça change de regarder ça sur Youtube », plaisante-t-elle.

Ori Gershon et son équipe font le bilan de cette première journée. « Beaucoup de monde est venu. Les activités et le spectacle étaient complets. À travers cette première édition, la directrice artistique d’Artaxe souhaite faire passer un message : « voir l’autre, découvrir l’autre et s’ouvrir au monde ».

Fatma TORKHANI

Le programme du festival : https://www.artaxe.net/programme

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