À l’occasion du Art Paris Art Fair, au Grand Palais, Guillaume a rencontré Fadi Yazigi. Ces sculptures ont évolué depuis la guerre, prenant d’autres formes et soulevant d’autres questions.

Fadi Yazigi est un artiste reconnu de Syrie, à Damas précisément. Il a commencé la pratique des arts à partir de l’âge de cinq ans, il a débuté par « un dessin sur une feuille au crayon de papier et crayons de couleur ». L’art est son activité professionnelle à plein temps. Son atelier est situé « dans le vieux Damas depuis 1998 », vivant « dans une zone en sécurité de Damas ». Damas était une place active de l’art. Ses parents sont décédés, mais l’ont beaucoup soutenu dans sa démarche artistique et il doit à sa grande soeur la découverte de la littérature et de l’univers féériques.

A 50 ans, il crée principalement des sculptures. Il se souvient de sa première réalisée durant ses années d’études à l’université d’art de Damas, c’était la reproduction d’un visage. Avant la guerre ses sculptures présentaient des courbes, mais depuis la guerre son expression artistique se traduit par des cubes, des boules, des murs… D’une manière globale, ses œuvres véhiculent le message de l’interrogation : « qu’est-ce qui se passe ? ». « Pourquoi ce sang se répand-il sur terre » en cette période de guerre, tout en visant à sonder les cœurs. Sa création du cube a pour objectif de représenter la dualité, « la séparation entre l’intérieur et l’extérieur ». Son cube symbolise également le dé du jeu des destins, faisant que « vous êtes tué ou vous n’êtes pas tué ». Son expression à travers le mur sculpté dans le bronze cherche à montrer le « mur existant entre les sentiments ».

Depuis le début de la guerre, Fadi Yazigi n’a pas changé les matières qu’il travaille artistiquement. Cependant, les personnages qu’il façonnent ont désormais les yeux fermés. Désormais, dit-il, « il n’y a plus le temps pour rire. Plus aucune réalité ne peut être vue. Plus personne ne veut voir la réalité. »

Chacune de ses œuvres demande près de trois mois de travail. Utilisant aussi la céramique, son matériau de prédilection est le bronze pour ses sculptures.Il façonne tout d’abord un moule, qu’il amène dans une fonderie pour faire couler à l’intérieur le bronze en fusion à environ 700 °C. Puis, par exemple, pour la boule d’art abstrait comme toutes ses œuvres, sur laquelle diverses représentations reposent un phénix, un canard pour enfant, un homme, un chien, un éléphant, il pratique la soudure à oxygène pour fixer ces parties prenantes de sa sculpture ainsi que des vis plantées depuis l’intérieur. La boule fondamentalement « fait référence au passage du temps, aux cycles de la vie, à la Terre-mère, mais aussi à une mine de la Deuxième Guerre mondiale qui pourrait exploser à tout moment ». De plus, les représentations abstraites soudées à la boule « nous représentent, elles détiennent nos rêves, nos tragédies et nos destins, et espèrent un peu de lumière et d’amour ». Dans son œuvre cette permanence de la représentation de la « Terre-mère », exprime-t-il, lui « permet de se rappeler qu’il a un sens à sa vie ».

Guillaume Montbobier

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