Premier jour à la rédaction de Marianne. Tout le monde en parle… Du retour de DSK ? Des derniers rebondissements dans l’affaire Bettencourt ? Non… de La Guerre est déclarée, le film événement de cette rentrée, plébiscité par toute la presse. Pour une fois, même chez Marianne, le film fait consensus. Enfin presque… Une journaliste ose affirmer haut et fort qu’elle a détesté. Incompréhension générale, blasphème ! C’est pire que si elle avait dit qu’elle votait Sarkozy. Chez Marianne aussi, la guerre est déclarée ! Je décide d’aller voir le film pour me faire ma propre opinion.

Alors, a-t-on le droit de ne pas aimer ? Peut-on s’opposer au déferlement de louanges qui s’abat sur le film ? À vrai dire, on se demande surtout comment un spectacle aussi racoleur a pu susciter autant d’enthousiasme. Le conformisme de la critique parisienne est parfois désespérant. Le deuxième long métrage de Valérie Donzelli, qui s’inspire de sa propre expérience, aborde un sujet grave et sensible : la maladie d’un enfant. On aimerait avoir la gorge serrée, être dévasté par l’émotion. Pourtant on reste de marbre, incapable d’éprouver la moindre empathie pour les personnages.

Il faut dire que très vite le gamin passe au second plan, oublié dans sa chambre d’hôpital. Valérie Donzelli préfère filmer ses états d’âme amoureux avec une complaisance narcissique qui frise l’exhibitionnisme. Bienvenue dans le monde merveilleux d’un couple de bobos parisiens. Notre enfant a une tumeur au cerveau, mais pas de souci, la vie est belle ! On ne  s’engueule jamais, on reste unis et forts en toutes circonstances. On prend même le temps d’entretenir son look soigneusement négligé et d’aller faire la fête dans des soirées branchées. On est méga cools et c’est pour ça qu’on a gagné la guerre ! Le film vire à l’exercice d’autopromotion un brin obscène.

En tenant le drame à distance, Valérie Donzelli a sans doute voulu signifier que la vie et l’espoir pouvaient être plus puissants que la mort. Mais l’ennui, c’est qu’on n’y croit pas une seconde. D’autant plus que la forme est aussi maladroite que le fond. La réalisatrice confond inventivité visuelle et esthétisme tape à l’œil. Voix off irritante qui nous décrit ce qu’on est en train de voir à l’écran, intermède chanté et longues plages musicales pour masquer la pauvreté des dialogues, La Guerre est déclarée ressemble à un long clip publicitaire.

À la fin, la fameuse voix off nous apprend que l’épreuve a brisé le couple. Quoi de plus normal finalement. C’est peut-être ce film là qu’on aurait aimé voir, plutôt que ce trip nombriliste qui tient moins de l’œuvre d’art que de la télé-réalité un peu snob pour people de Saint-Germain-des-Prés.

Alexandre Devecchio

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