« Je suis content de voir de mes yeux que le rap en est arrivé là. Je n’aurais jamais pu penser qu’un jour, on terminerait au théâtre du Châtelet », confie avec beaucoup d’émotion Mac Tyer, figure emblématique du rap français. À raison, car il y a encore quelques années, une telle cérémonie semblait inenvisageable.

Pourtant, c’est bien ce qu’il s’est produit le 11 mai à quelques encablures du Forum des Halles. Les artistes et personnalités du hip-hop se sont présentés en tenue de gala sur le tapis rouge du théâtre du Châtelet, suscitant la curiosité de quelques badauds.

L’idée est venue de Hamadou Ba, co-fondateur du site Booska-P et Yoan Prat  à l’origine du média Yard. « Il m’a appelé en début d’année 2020, car il souhaitait mettre nos forces en commun pour monter une cérémonie d’envergure autour du rap français », explique le premier. « Pendant le confinement, les équipes de Yard et Booska-P n’ont pas cessé d’être en contact et c’est de là qu’est née l’idée », relate-t-il.

SCH, déclencheur des Flammes

La mise en place de la cérémonie a quelque peu été ralenti par la crise sanitaire. «  C’était compliqué de se remettre dedans après la crise du Covid. Les partenaires n’étaient plus chauds pour nous suivre sur l’organisation d’un événement en physique », se souvient Yoan Prat. Mais un acteur inattendu va accélérer le processus, en la personne de SCH. En effet, lors de son discours aux Victoires de la musique l’an passé, le rappeur marseillais avait souligné l’absence de grands noms de la scène rap qui aurait selon lui mérité une récompense.

« Le lendemain du discours, je lance sur notre conversation de groupe qu’il faut publier le teasing de la cérémonie sur les réseaux sociaux. À ce moment-là, nous n’avons encore aucun partenaire », se souvient le fondateur de Booska-P. « Après la publication des premiers teasers, tout le monde est immédiatement venu toquer à nos portes pour s’associer. » 

Un show d’envergure honorant la nouvelle et l’ancienne génération

Il va sans dire que l’annonce de la cérémonie a suscité un grand enthousiasme auprès du public. D’autant plus que les auditeurs ont été appelés à voter pour certaines catégories dont celle l’album rap de l’année. Les spéculations allaient bon train quelques heures avant la cérémonie, quant à savoir quel artiste repartirait avec le plus de récompenses.

C’est l’occasion de dévoiler au monde de quoi la France est capable en termes de musique urbaine

Néanmoins, ce soir, l’essentiel était de rendre hommage à une culture longtemps ostracisée dans l’espace médiatique français. C’est dans une salle comble et devant un public surchauffé que quatorze artistes de l’ancienne et de la nouvelle génération se sont succédé sur scène. À l’image de Prince Waly, Doria, ou encore Mac Tyer.

« C’est magnifique de pouvoir être ici. C’est l’occasion de dévoiler au monde de quoi la France est capable en termes de musique urbaine, donc ça me rend fier de faire partie de ce mouvement », a déclaré Prince Waly sur scène.

Au cours de la soirée, un prix d’honneur a été décerné au Rat Luciano. Le membre de la Fonky Familly introduit par SCH, a été consacré pour son impact incontestable dans la culture.

Tout au long de la soirée, les spectateurs ont pu être témoin du respect de jeunes artistes envers certains pionniers. Gazo a salué Stomy Bugzy et le Ministère A.M.E.R après avoir reçu le prix du meilleur album rap de l’année. Damso et Dinos n’ont pas tari d’éloge envers Disiz, qu’ils ont tous deux cités comme source d’inspiration.

Les Flammes tenaient également à faire la part belle aux femmes de l’industrie, encore trop invisibilisées aujourd’hui. Ainsi, Pauline Duarte fut récompensée pour son travail de management d’artistes. Aya Nakamura, grande absente de la cérémonie, a remporté sans surprise le prix de l’artiste féminine de l’année.

Le sacre de Tiakola

Le fait marquant de cette première édition restera sans nul doute le sacre de Tiakola. Lui qui avait été snobé aux Victoires de la musique dans la catégorie « révélation de l’année », est reparti ce soir avec trois récompenses. Une belle revanche pour le natif de Bondy, dont l’album « Mélo » sorti l’an passé s’est écoulé à plus de 200 000 exemplaires.

Vainqueur à l’applaudimètre, William de son vrai prénom, a offert un medley d’anthologie de ses hits. « Il est trop fort ! Il m’étonne de jour en jour. Quand je me dis qu’il n’arrivera pas à faire un meilleur morceau, il arrive à en sortir d’autres beaucoup plus puissants. » salue H.K, son comparse du groupe 4keuss, avec fierté.

J’espère qu’on aura une salle plus grande, plus de shows et un public encore plus satisfait !

Assurément, cette première édition des Flammes restera dans l’histoire tant le show était d’une grande qualité et le spectacle au rendez-vous. De quoi nourrir des espoirs pour la seconde édition : « Ça a été tellement compliqué à mettre sur pied. Aujourd’hui, tout s’est bien passé donc je suis soulagé », confie Hamadou. « Il n’y a eu aucun heurts, tout était dans un bon esprit, même les artistes qui n’ont pas gagné ont félicité les vainqueurs, c’est ce qu’on voulait. J’espère qu’on aura une salle plus grande, plus de shows et un public encore plus satisfait ! »

Félix Mubenga

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