Du talent, des contacts, mais surtout de l’audace. Voilà les ingrédients à réunir pour mettre un pied dans le monde fermé du journalisme, selon les deux correspondants parisiens du New York Times, présents lors de la dernière Ecole du blog, samedi 15 décembre.

Maya de La Baume, française d’origine est fille de diplomate. Elle vit durant cinq ans aux Etats-Unis, un périple qui lui permet de devenir bilingue. Puis elle entame des études d’histoire et de droit international. Intéressée par le voyage, l’ouverture au monde et aux autres, Maya cherche à faire de sa qualité linguistique un atout et aspire à se tourner vers un travail à l’international. Après un passage éclair par la rédaction du guide touristique Fayard puis du Monde version web, Maya rencontre l’éditrice du New York Times. Une rencontre déterminante. Après avoir été fixée pour elle pendant deux ans, une sorte de « job de super assistante« , selon ses dires, Maya finit par écrire pour le New York Times. Journaliste depuis six ans à la cellule parisienne du quotidien, la journaliste fait figure d’exception. Elle est la seule Française à travailler pour le journal. Elle, qui n’est jamais passée par une école de journalisme, se dit ravie d’avoir appris son métier via le New York Times, qui est pour elle est « l’école de l’excellence« . Maya considère que le caractère et l’audace sont déterminants dans la réussite ou l’échec d’un journaliste en herbe, même si la chance s’avère parfois cruciale.

Venu pour un stage au New York Times, Scott Sayare, 27 ans, n’en est jamais parti depuis. Cela fait maintenant plus de trois ans. Le journaliste est un self-made-man. Né à New York, il grandit sur la côte Est, du côté de Boston. Au cours de ses études, Scott passe par un lycée où est enseigné le latin et le français. Des enseignements qui lui serviront lorsqu’en 2008 la presse américaine est en pleine crise. Les journaux déclinent, certains titres disparaissent, Scott décide alors d’aller tenter sa chance en France. Dans la vie de Scott Sayare, le journalisme n’était pourtant pas une évidence. Jeune homme, il part faire ses études en Californie sans trop savoir ce qu’il allait y faire. Le new-yorkais pense d’abord vouloir être scientifique dans l’environnement, jusqu’à ce qu’il se retrouve en stage. L’idée lui vient alors de traduire la pensée scientifique pour des non-spécialistes. Puis sa rencontre avec un ancien du Washington Post l’oriente définitivement vers le journalisme, il est alors en quatrième année dans le supérieur. A peine sorti de la fac en 2008, avec pour seules expériences deux cours de journalisme et quelques papiers écrits, il opte pour le call-calling (appeler les gens sans les connaître), une tactique payante puisque Scott est pris à l’AP (Associated Press). Après quoi il atterrit au New York Times à Paris. « Pisque » au lieu de « puisque », voilà la seule expression qui trahit l’origine non-francophone de Scott, lui qui parle un français impeccable et sans accent.

Deux destins croisés qui se rejoignent au New York Times, dont l’antenne parisienne se situe non loin de l’esplanade de La Défense. Deux parcours différents, deux expériences, mais un même point de vue : devenir journaliste ne se résume pas seulement au parcours classique. Ne pas passer par une école de journalisme reconnue n’est pas forcément rédhibitoire. Il faut être capable de faire une force de ce qui apparaît comme une faiblesse. Scott le résume en une phrase : « Notre réussite dépend en grande partie de nous« . Et Maya de compléter : « Vous vous révélez par ce que vous êtes« .

Ce jour-là, l’école du blog résonne de questions. Avoir deux regards croisés est une vraie chance pour pouvoir appréhender les différences de pratiques journalistiques entre la France et les Etats-Unis et saisir le métier de correspondant. Seuls quelques journalistes composent la cellule française qui correspond chaque jour avec le journal new-yorkais. Ils travaillent dans un petit bureau, mais partagent les locaux des salariés du Herald Tribune, un journal qui a été racheté par le New York Times et qui contient une grande partie de sa rédaction à Paris. La cellule française du New York Times rédige au moins deux papiers par semaine. Véritable luxe, ce rythme leur permet de réaliser des sujets plus fouillés sur l’actualité. Les sujets sont d’abord soumis à la rédaction new-yorkaise qui leur donne le feu vert, ou pas. Leurs papiers doivent pouvoir éveiller l’intérêt des lecteurs américains pour des contenus qui ne concernent pas leur pays. Rendre proche une information lointaine nécessite une véritable prise de recul, notamment pour Maya qui a vécu une grande partie de sa vie en France. Il faut pouvoir apporter un regard neuf sur l’actualité et remettre en contexte chaque article. Contrairement à la presse française qui joue beaucoup sur l’info-feuilleton (le lecteur suit au jour le jour l’évènement), le correspondant doit condenser en un papier l’affaire, quand bien même elle est complexe. D’abord parce que ce qui peut passionner le lectorat français n’intéressera pas autant un public qui habite loin de là. Ensuite, parce que le lectorat demeure justement lointain du pays dont on parle, il n’est pas acquis qu’il puisse saisir ce qui est dit dans l’article.

Dans le quotidien, sept pages environ sont réservées à l’international. Parmi elles, il faut compter les publicités et le fait qu’elles englobent l’actualité de tous les pays. Autant dire que le choix est drastique et que la France ne constitue qu’un grain de sable. Être correspondant français pour l’étranger nécessite donc de penser pour le lectorat visé, tout en se servant de l’ancrage dans le pays duquel on parle. « Nous jouons le rôle de prisme d’abord pour l’étranger mais aussi pour les Français« ,  affirme Scott. En tant que français, lire la presse étrangère qui traite de sujets touchant à l’hexagone peut permettre une prise de recul sur les évènements mais aussi de reprendre le fil d’un évènement que le lecteur aurait manqué. « Souvent dans les médias français, si on prend l’histoire en route, on ne saisit pas forcément tout, on est dans le feuilleton qui se déroule jour après jour« , confirme Maya.

Sur ces mots, l’exercice du jour pour les élèves de l’école du blog est lancé : se mettre dans la peau d’un correspondant du New York Times en traitant d’un sujet français. Au menu : Depardieu et son exil fiscal ou bien la crise à l’UMP. Les consignes sont claires, écrire à l’américaine c’est donner les informations importantes dès le début de l’article par un « lead » (qui répond aux questions : qui, quand, où, comment, pourquoi?) suivi d’un « sublead » (une continuation du « lead » qui rajoute des informations utiles) et du « notegraph » qui explique l’intérêt du sujet. L’exercice du jour s’arrête là, c’est parti pour une vingtaine de minutes de réflexion qui doivent déboucher sur un début d’article qui accroche, en anglais ou en français, au choix. Une fois rédigés, les travaux sont lus devant tout le monde et corrigés.

Pourvus d’une gentillesse extrême qui n’a laissé personne indifférent, Maya de La Baume et Scott Sayare sont restés encore longuement à discuter avec les élèves du Bondy Blog, laissant à leur départ un vent d’espoir et de belle béatitude. « Croyez en vous« , un beau message qui n’aura jamais été aussi bien délivré.

Exemples de deux travaux : 

Celui de Cyrielle qui s’est occupée du cas Depardieu :

Gerard Depardieu heads to Belgium

Since last Thursday, French actor Gerard Depardieu officially lives in Nechin, a small Belgian town close to the French borders, according to Nechin’s mayor Daniel Senesael. The 63-year-old actor, one of the richest one in France, presumably left his home country to avoid paying heavy taxes in his own country.

In France, public view was shocked at the announce of this moving, considering the importance the population gives to the duty of paying taxes, especially in this times of crisis.

-Celui de Lansala Delcielo qui s’est chargé de la crise UMP :

La droite est en plein champ de bataille ! Six mois après l’élection du nouveau président français François Hollande, le patron des Socialistes, l’opposition de droite représentée par l’UMP ( Union pour un Mouvement Populaire) est en pleine crise. Ces deux représentants se livrent, depuis plus de 3 semaines, une bataille sans merci. Il y a d’un côté Jean-François Copé ( la force brute ) face à François Fillon ( la force tranquille). Nous sommes en plein dans une lutte fratricide semblable aux emblématiques Romulus et Rémus, nous rappelant, par la même occasion les films hollywoodiens, tels « Le Secret de Brockeback Mountain » .

Ils s’admirent, mais ils se déchirent ! Cette saga épisodique fait le bonheur des médias mais le résultat est en suspens. L’enjeu reste tout de même important car ils devront élire ensemble leur prochain candidat pour les futures  présidentielles.

Amandine Liard

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