Pour la deuxième Ecole du blog de la saison, le Bondy Blog a eu le plaisir d’accueillir Nora Hamadi. Celle qui est, aujourd’hui, rédactrice en chef et présentatrice des émissions « Europe Hebdo » et « Enquête d’Europe » sur Public Sénat est venue nous raconter ses expériences et son parcours atypique. 

Le 12 octobre dernier, Nora Hamadi, journaliste et présentatrice d’émissions sur la chaîne Public Sénat, débarque au Bondy Blog pour sa Master Class. Ses cheveux frisés, sa bonne humeur et son large sourire captent immédiatement son auditoire. « Je suis honorée d’être ici. Je suis le Bondy Blog depuis les débuts et je trouve que ce que vous faites est vraiment bien. C’est très intimidant d’être là devant vous », confie-t-elle, un peu gênée.

« Déjà à l’époque on nous disait qu’on était des bons à rien »

D’origine kabyle, Nora Hamadi est née et a grandi dans le département de l’Essonne. À Longjumeau (91160), une ville de 23 000 habitants partagée entre les quartiers sud et les zones pavillonnaires au nord. Aujourd’hui, la jeune femme a quitté sa ville et ses quartiers sud, depuis une dizaine d’années, mais elle continue de se rendre à Longjumeau car toute sa famille est restée là-bas.

Longjumeau, c’est aussi l’époque du collège et des premiers stigmates pour la jeune femme : « J’étais dans un collège ZEP où tout le quartier se rendait. C’était cool, il y avait toutes les origines : des Yougoslaves, des Italiens… Mais déjà à l’époque on nous disait qu’on était des bons à rien et que moi avec ma grande gueule, mon côté exubérant et mon incapacité à rester les fesses assises plus de 3h sur une chaise, je n’irai pas très loin. C’est marrant ce stigmate qu’on vous colle dès le début ».

Très vite, Nora Hamadi a eu besoin de s’échapper de son quotidien et de sa ville pour découvrir autre chose : « J’ai voulu sortir de mon environnement de ZEP, où vos voisins sont dans votre classe et où finalement vous rentrez dans une espèce d’entre soi qui devient lourd. J’ai donc eu la plus grande idée du siècle en me disant que j’allais faire autre chose. Quand vous essayez de contourner la carte scolaire, vous trouvez plusieurs options [qu’il n’y a pas dans votre établissement], en l’occurrence le théâtre ». C’est ainsi que la Longjumelloise s’est retrouvée à faire du théâtre à 5 kilomètres de chez elle, dans un lycée de Savigny-Sur-Orge.

« Je n’avais jamais pensé au journalisme … »

Après le lycée vient le temps de l’orientation et du « qu’est-ce que vous faîtes dans la vie ? ». Nora Hamadi est alors intéressée par les sciences politiques, mais rencontre un obstacle de taille : « Sciences-Po Paris, c’était entre 5 000 et 6 000 euros l’année. Une somme impossible à payer pour mes parents qui sont ouvriers. Et à l’époque, il n’y avait pas de convention ZEP ni même de tarif dégressif pour les boursiers ». Elle a donc commencé une licence en AES (Administration économique et sociale) à la fac d’Evry-Courcouronnes (91) avant de se retrouver en sciences politiques à Nanterre pour y faire de la recherche.

Et le journalisme dans tout ça ? « Je n’avais jamais pensé au journalisme parce que le traitement médiatique de l’époque m’était insupportable. J’ai grandi au sein d’une famille de militants communistes où les livres ont toujours étaient très présents, où les discours étaient très présents. Il y avait du débat. Les journalistes on les appelait les journaleux ! », lâche-t-elle.

Finalement, en 2003, Nora Hamadi a eu l’opportunité de rentrer au Parisien en tant qu’assistante de rédaction. C’est à ce moment-là qu’elle a eu le déclic : « C’est là que je me suis rendue compte, alors que je n’avais jamais pensé au journalisme, du pouvoir que ce métier représente. Voir que les sujets du Parisien étaient repris par les journaux télévisés, c’était quelque chose de fort. Et je me suis dit que c’était assez intéressant comme travail alors que pour la recherche, je n’étais plus trop sûre ».

« Dans ce métier, on la provoque sa chance »

Pourtant à 24 ans, faire une école de journalisme était impossible. Toujours ce problème financier. Nora Hamadi y est donc allée au culot. « J’ai fait des demandes de stages partout. Je me suis fait jeter de partout. Le seul qui m’a prise en stage et m’a mis le pied à l’étrier, c’est Christophe Barbier », dit-elle en souriant. Voilà comment Nora Hamadi a commencé à travailler pour L’Express. En parallèle, elle propose également des papiers au quotidien Le Parisien.

Mais après cinq ans de presse écrite, elle se dirige vers la télévision sur les conseils de Christophe Barbier. Elle se retrouve à I-Télé, où elle travaille pendant quatre ans. « J’ai appris sur le tas. Mais si vous en voulez, il y a des opportunités en télévision. C’est une super école. Ça vous donne des automatismes et ça vous apprend à bosser sous la pression », déclare-t-elle. Nora Hamadi n’oublie pas de souligner qu’il y a beaucoup de précarité dans ce métier.

En 2009, Nora Hamadi quitte I-Télé sans avoir de point de chute. Elle veut se consacrer au magazine et aux formats longs. « J’ai eu une chance inouïe. Gilles Leclerc venait d’être nommé à la tête de Public Sénat et il cherchait un profil de rédacteur en chef/chef d’édition. Il a appelé un ancien collègue de France 2 qui lui a donné mes coordonnées. Je venais de quitter I-Télé 3 jours auparavant. J’ai eu de la chance mais j’ai l’impression que dans ce métier, on la provoque sa chance. Votre meilleure carte de visite, c’est votre manière de bosser », affirme la jeune femme.

Nora Hamadi travaille maintenant depuis quatre ans sur la chaîne Public Sénat. Elle y présente notamment les émissions « Europe Hebdo » et « Enquête d’Europe ».

Kozi Pastakia

 

La prochaine Ecole du Blog aura lieu le 16 novembre avec Lucie Geffroy, spécialiste de l’Italie, journaliste à Courrier International. Elle collabore aussi à l’Orient littéraire, le supplément du journal francophone libanais L’Orient-le-jour, assure régulièrement une revue de presse sur Radio Nova… L’exercice pratique de sa masterclass portera sur la revue presse. Rendez-vous à 10h, dans les locaux du Bondy Blog.

 

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