L’exploit de Raphäl Yem, c’est de pouvoir toucher à tous les médias (radio, presse écrite, TV, web) sans n’avoir jamais intégré aucune école de journalisme. « La seule que j’ai faite, c’est HEC : les Hautes Études du Culot » sourit-il. Et du culot, Raphäl Yem en a à revendre.

L’histoire de ce fils de réfugiés Cambodgiens commence à Hérouville-Saint-Clair, en Basse-Normandie. Il débute dans le journal du collège. Mais c’est après le fameux stage de 3ème, effectué dans une radio locale qu’il devine très vite qu’il veut baigner dans le monde des médias. Au lycée, il monte donc une radio puis avec le journal du lycée, obtient le prix académique de la presse.

Avec une bande de copains, il se lance dans la rédaction de Fumigène qui traite des quartiers populaires et des cultures urbaines. La réalisation de ce magazine est digne de la contrebande d’alcool des années 1930 ! Les maquettes sont réalisées avec le système D : les 4 pages recto verso qui composent le magazine sont photocopiées la nuit à la MJC, avec des ramettes de papiers volées dans des bibliothèques de la ville… Tout ça pour que le fanzine puisse être distribué gratuitement aux potes et aux premiers amateurs !

Première grande interview dans Fumigène : celle de Shurik’n du groupe Iam. Elle fait connaître le magazine dans le milieu hip-hop. Puis Raphäl pige successivement dans plusieurs médias et devient rédac-chef adjoint du magazine RER. Il refuse même un poste de rédacteur en chef adjoint du magazine Rolling Stone pour un poste d’emploi-jeune. « J’avais déjà donné mon accord à l’association en question ! »

Sa grande fierté : avoir vu Fumigène sortir en kiosque. « Cest l’aboutissement d’un long travail et de beaucoup de débrouilles ! » Une autre interview, celle de Paul Amar, lui ouvre les portes de la télévision. « La télé me paraissait inaccessible car je n’avais pas un physique télégénique. Je n’avais pas la bonne couleur, je n’avais pas non plus la formation. »

Puis de fil en aiguille, Raphäl fait aussi « son trou » à la radio, au Mouv’. Une consécration pour lui, Radio France étant écoutée par les parents de sa copine ! Il assure, pendant un temps, des chroniques dans quatre radios différentes (Nova, le Mouv’, Générations et France Culture). Ce qui lui permet de toucher un smic…

Petit à petit, il développe son réseau et le milieu commence à lui faire confiance. Lors d’un festival de courts-métrages, il rencontre Isabelle Giordano qui lui propose une chronique dans son émission sur France Inter. S’ensuit un passage éclair à la matinale de Canal Plus, « grâce à mon pote Mouloud Achour ». Actuellement, il collabore avec Canal Street et MTV. « Être l’animateur pour la France de MTV, c’est ma petite fierté à moi » précise-t-il.

Raphäl a donc toujours eu plusieurs employeurs mais aucun CDI, même s’il en a déjà refusé. « Je ne serais pas à l’aise si je devais être toujours là, tout le temps, au même endroit. De toutes façons, dans les médias on ne signe presque plus de CDI ! » C’est le système de la pige qui prévaut et la précarité qui va avec. « Tous les 30 juin, je suis au chômage » conclut-il. C’est le prix de la liberté. Mais Raphäl Yem vit de ses passions et ça lui va bien !

Latifa Zahi

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