Un pays qui tourne au ralenti le temps de la diffusion d’un feuilleton télé. Une présidente qui change son emploi du temps pour ne rien rater. C’est au Brésil que ça se passe, et ce n’est pas à cause d’un match de football, non, il s’agit d’une telenovela, l’autre passion des Brésiliens.

C’est-à-dire que ce n’est pas, n’importe quelle télé novela. C’est un feuilleton qui est pire qu’une drogue. Qui rend accro dès les premières secondes du générique. Une sorte de Sous le soleil de Rio de Janeiro, mais en mieux. Un plus belle la vie brésilien, et encore. Difficile de trouver un équivalent. Rien qu’avec la fameuse chanson, OI OI OI qui veut dire « Coucou Coucou coucou ». Une série diffusée en 2012 par la chaîne Globo au Brésil, le TF1 brésilien puissance 10. Une série qui a rendu fou tout un pays. Tout de suite on est plongé dedans. Pour preuve je témoigne, j’ai regardé les premiers épisodes et tout de suite on en devient accro.

L’histoire se passe dans la fameuse Avenida Brasil à Rio de Janeiro, une fillette de 9 ans, Rita, orpheline de mère, vit avec son père, Genesio. Un homme aussi bon qu’il est aveuglé par l’amour qu’il porte à sa nouvelle femme, Carminha, une terrifiante belle mère qu’on redoute tous d’avoir un jour. Mais quand Genesio se fait voler toute sa fortune par un homme à la solde de sa machiavélique épouse, et que la petite fille est abandonnée dans un dépôt d’ordures, tout soupçon de fable est anéanti par la dramaturgie propre à une telenovela.

Tout le pays est devenu obsédé par « Oi Oi Oi ». Tous les journaux télévisés brésiliens en ont parlé, un phénomène national qu’on décrypte et qu’on tente de comprendre là-bas. Il faut dire que les scores d’audience laissent songeur : chaque épisode d’Avenida Brasil a été suivi par en moyenne 38 millions de téléspectateurs. Et le dernier épisode a carrément immobilisé le pays : le Brésil s’est arrêté de tourner. Avec 46 millions de téléspectateurs, autrement dit 84% des téléspectateurs. Dont Dilma Roussef, la Présidente de la République qui a même reporté un meeting à Sao Paulo pour ne pas rater une seconde du dénouement de 160 épisodes à forte teneur en mélodrame.

Un phénomène qui n’a pas d’égal de ce côté de l’Atlantique. À titre de comparaison, la finale de la Coupe du monde de football 1998 (France-Brésil) n’avait séduit que 75,6 % du public français, alors que le France-Italie de 2006 n’avait séduit que 80,3 % du public français. La télévision brésilienne passait en boucle des images des aéroports désertés, des couloirs d’hôpitaux où les malades s’installaient pour suivre le dénouement, de stars du foot, comme Neymar, une des nouvelles recrues du Barça, qui se filme en train de regarder la télé. Un pays tout entier qui tourne au ralenti. Un événement télé mondial qui avait totalement échappé à la France. Et pourquoi cette série a-t-elle tant passionné ?

Parce qu’elle cumule tous les ingrédients d’un bon feuilleton : du drame, de la souffrance, un projet de revanche, avec pour héroïne, une « Causette » abandonnée dans une décharge par son ignoble belle-mère qui grandit tant bien que mal avec une seule chose en tête, se venger façon Comte de Monte Cristo, une fois le moment venu. Un succès qui s’explique aussi par le choix de ses personnages issus de la classe moyenne et non pas des beaux quartiers. C’est ce qui a séduit Gilles Camouilly, Directeur de l’antenne et des programmes de France 0, qui a acheté le programme pour le diffuser en France.

« C’est une série qui vient d’Amérique latine, c’est une série brésilienne, mais il n’y a finalement plus beaucoup de codes classiques des telenovelas. On tourne en extérieur, les acteurs ne sont pas caricaturés. Ce sont des jeunes, ils vivent dans le monde urbain , soit dans la réalité de la société brésilienne. Le cas Avenida Brasil est vraiment l’exception de la chaîne Globo. Je ne suis pas sûr qu’on puisse parler de télénovelas, mais plutôt de fictions longues brésiliennes ».

Tout est tourné dans un décor naturel, le décor de Rio de Janeiro. C’est ça qui rend cette série exceptionnelle, ce qui la différencie de toutes les telenovelas classiques. Le choix des acteurs aussi est beaucoup salué là-bas, les téléspectateurs s’identifient facilement aux personnages. Une décision scénaristique qui n’est pas anodine : au cours des six dernières années, 30 millions de Brésiliens ont quitté les classes populaires pour rejoindre cette population intermédiaire.

Et pour Gilles Camouilly, cette série correspond parfaitement aux valeurs que la chaine veut transmettre. « Je pense qu’Avenida Brasil est susceptible de séduire la société française parce qu’elle est moderne, c’est le vrai plus de cette série aujourd’hui ». La coupe du monde 2014 au Brésil commencera le 12 juin prochain. Le temps pour nous de regarder les 160 épisodes de cette série histoire d’avoir un avant-gout de la vida o Brasil.

Mohamed Mezerai

« Avenida Brasil » Tous les soirs du lundi au vendredi 19h55 sur France O. Bande annonce.

 

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