Né en 1951 dans l’ex-Congo Belge, Jacques (au centre de la photo), notre guide, a un parcours assez original. De sa naissance jusqu’à l’obtention de l’équivalent du baccalauréat, il réside avec sa famille dans le pays de sa naissance. Le bac en poche, il s’envole pour la Belgique pour y poursuivre des études. Il y restera trois ans et décrochera une licence en comptabilité et informatique.

Désormais muni d’un CV tout ça fait satisfaisant, il retourne sur le continent africain, au Zaïre, qui ne s’appelle plus Congo belge et qui porte aujourd’hui le nom de République démocratique du Congo. Il y exercera le métier de chef-comptable chez Caterpillar, fabriquant d’engins de chantiers. L’économie du pays repose alors principalement (et cela a très peu changé) sur l’exploitation des mines d’or et de charbon principalement. Il se marie, a deux filles. Une quinzaine d’années plus tard, il divorce et se voit attribuer la garde de ses filles. Il repart vivre en Belgique pour leur éducation et afin qu’elles y obtiennent des diplômes européens.

Mais après dix années passées en Belgique, l’Afrique lui manque. La nostalgie l’envahit. Comme il avait visité l’Afrique du Sud durant l’apartheid lorsqu’il résidait au Zaïre, il décide de s’y rendre. Il a notamment le souvenir de la ville du Cap, qu’il avait trouvée magnifique. Et pour la petite histoire, ou la grande, il entretenait depuis la Belgique une correspondance sur Internet avec une Sud-Africaine. La voir pour de vrai ajoute à son envie de plaquer le Plat-Pays.

Arrivé au Cap, il cherche un emploi dans l’informatique ou la comptabilité, mais n’en trouve pas bien qu’il maîtrise parfaitement l’anglais et le français bien sûr. Nous sommes dans l’après-apartheid, et, après des décennies d’apartheid, la priorité en matière d’emploi dans ce secteur va aux Noirs. Il entame alors une reconversion totale et devient guide touristique. Agé d’une cinquantaine d’années, il retourne à l’université pour apprendre tout ce qu’il faut savoir des caractéristiques du pays : sa faune, sa flore, ses langues, ses paysages, ses ethnies… Sa volonté et son travail paie : il obtient son badge de guide.

Jacques a le coup de foudre pour l’Afrique du Sud et le métier qu’il exerce. Sa vie privée en pâtit. Début janvier 2010, il rempile dans la compta où les horaires sont fixes, mais il s’aperçoit rapidement que sa place n’est pas derrière un bureau mais avec des touristes attentifs, à l’écoute de ses mots. Il abandonne donc la compta et renfile sa tenue de guide, mais en indépendant, cette fois. L’entreprise pour laquelle il travaillait auparavant, African Eagle, fait appel à lui de temps à autre. Il se trouve que notre car de collégiens français est son premier job depuis son retour en freelance sur le circuit du tourisme.

Quand j’aborde la question du montant de son salaire, voilà la réponse qu’il me fait : « La concurrence congolaise et rwandaise sur le marché des guides de tourisme et rude. Si je me plains de ne pas gagner assez, je peux passer à la trappe et me faire rapidement remplacer par un guide rwandais ou congolais. Il accepte le même emploi pour une paie bien moindre. Du coup, je continue mon job car la passion que j’ai pour celui-ci est intacte. » Jacques perçoit en moyenne par mois un peu moins que le smic, alors qu’il ne compte pas ses heures. Par exemple, il s’est tenu un jour à notre disposition de 8 heures du matin à 4 heures du matin le lendemain. Heureusement, il y a les pourboires, « sinon, dit-il, ce serait vraiment compliqué ».

Jacques adore son travail et ne se voit pas le quitter de sitôt. Etre guide, c’est avoir des responsabilités, c’est un exercice de patience une responsabilité. Il faut savoir être clair pour tout le monde et satisfaire les attentes de tous les voyageurs. Avec nous, il aura été parfait, au point qu’Amanda et ses copines lui ont écrit une chanson la veille de notre départ. Pour Jacques et Freddy, notre chauffeur de car aussi doué que Schumacher dans sa formule 1. Un duo excellent qui nous a fait découvrir et aimer l’Afrique du Sud.

Inès El Laboudy

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