L’actualité brûlante qui intéresse les pères de famille de mon quartier en ce moment, c’est la Libye. Dans de nombreux cas, ils regardent l’actualité libyenne à travers  les chaînes des pays dont ils sont originaires.

Leur regard sur l’actualité diffère. Le débat politique avec eux est toujours très intéressant du coup. En plus de cette double vue médiatique, ils connaissent souvent le terrain et l’histoire des  pays qui font souvent  l’actualité en ce moment.  Certains ont longtemps vécu dans cette région du globe.

En ce qui concerne Kadhafi, tous les chibanis sont d’accord : il était « barjot ». « Mais s’il n’était pas un dirigeant très juste, les gens ne savent pas qu’en Libye, il n’y a pas de clochard, il y a beaucoup de richesse pour peu de population» me dit l’un d’eux. Un autre confirme qu’il a très peur pour la Libye de demain. Son fils Habib présent à nos côtés me dit: « Quand tu vois certains occidentaux,  plus attirés par le business  mais qui font les yeux doux au CNT, ça fait peur. Quand les occidentaux s’en mêlent, ils ont toujours une idée derrière la tête même si c’est vrai que Kadhafi a adopté une mauvaise posture en tirant sur son propre peuple. » Les vieux du quartier pensent à Saddam Hussein lui aussi mort, et il regarde l’Irak d’aujourd’hui qui va mal…

« Il vaut mieux un dirigeant dur chez soi mais vivre bien qu’une soi-disant démocratie à l’occidentale, qui est à la botte des ces pays et qui délaisse le peuple. En plus, en Libye il y a plein de tribus, ça peut très vite dégénérer » me dit une personne d’origine mauricienne qui envisage le pire pour la Libye.

Quant à Manu, il se pose des questions sur la participation des pays occidentaux : « L’OTAN a participé a l’élimination de Kadhafi, franchement j’ai vu les images, je n’étais pas content qu’ils montrent son cadavre comme ça. Peut-être que ce n’était pas un bon dirigeant mais aucun être humain ne mérite que son cadavre soit maltraité ainsi ».

Un vent de liberté souffle sur les pays du Maghreb, pour mettre fin à une chose insupportable pour tous les peuples de la terre, l’injustice du pouvoir, le mépris, la hogra, comme on dit là bas. « Tous les hommes se sont soulevés à un moment ou à un autre de l’histoire face à l’injustice » me disait un prof au lycée.

Malgré cela, beaucoup de personnes regardent ces changements avec méfiance, c’est le cas des pères de ma cité, et attendent de voir l’évolution des choses. Dans mon quartier, on se félicite de voir chuter des dictateurs qui pillent leur propre peuple, mais méfiants, les gens attendent de voir la suite. Par peur sans doute des déceptions, les vieux du quartier qui en savent long sur les belles promesses, n’osent pas trop espérer.

Amine Benmouhoud

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