C’est comme si les jeunes Français décidaient de voter Chevènement. Ron Paul, candidat libertarien à l’investiture du parti républicain à la présidentielle américaine, a beau avoir presque 80 ans, il est l’idole des républicains de 18-29 ans.

Lors du caucus de l’Iowa et de la primaire du New Hampshire, les deux premiers scrutins du processus de désignation du candidat républicain, il a respectivement engrangé 48% – plus que n’importe quel autre candidat – et 47% des votes des électeurs de moins de 30 ans. Paul doit ces bons scores à ses jeunes supporters, qui constituent de loin la tranche d’âge de son électorat la plus mobilisée autour de sa candidature.

Les médias se confondent en hypothèses pour expliquer comment le septuagénaire, arrière grand-père, peut plaire autant aux jeunes. Ron Paul est vétéran de la politique américaine. Depuis 1988, ce parlementaire texan, ancien obstétricien-gynéco qui se vante d’avoir mis au monde 4.000 bébés, tente de devenir président. Anti-avortement jusqu’au bout des ongles, il veut mettre un terme à toute présence militaire américaine à l’étranger. Il se veut aussi un défenseur acharné des libertés, ce qui explique notamment qu’il rejette l’interventionnisme étatique dans tous les domaines (économie, vie privée…).  Anecdotiquement, il soutient la légalisation du hashish.

Les mauvaises langues prétendent que cette dernière prise de position explique en grande partie le soutien de la jeunesse. Mais un article de l’agence de presse Associated Press indiquait que la préoccupation numéro 1 des jeunes électeurs dans l’Iowa et le New Hampshire était l’emploi, et non la liberté de fumer. L’article suggère qu’ils voient dans le « moins d’Etat » proposé par Paul une solution à l’endettement du pays et la crise économique.

« La Liberté est une idée magnifique, c’est pour cela que je suis excité. Mais je suis vraiment excité quand je vois des jeunes le dire », a-t-il dit lors de son discours post-primaire dans le New Hampshire.

Le style Ron Paul séduit aussi : le même message peu orthodoxe, martelé depuis des années sans « peut-être » ni «  à condition que » et qui fait oublier qu’il appartient au système qu’il dénonce. Sans oublier son allure décontractée – l’effet de l’âge ? –. « Si vous n’aimez pas Washington, c’est le gars qui parait le plus en dehors du système de tous les candidats. Certes, il est membre du Congrès, mais il ne ressemble pas à un politique de Washington, n’agit pas comme un politique… », souligne Tray Grayson, directeur  de l’institut politique d’Harvard (IOP) qui a récemment réalisé un sondage sur le vote des 18-29 ans.

N’en déplaise à ses supporters, Ron Paul n’est pas le favori pour affronter Barack Obama en novembre. C’est Mitt Romney, le Mormon, qui a la corde pour l’instant. Aussi flatteur que soit le titre de champion des jeunes, Ron Paul sait que cela ne fera pas nécessairement de lui le prochain Obama. Car aux Etats-Unis comme en France, les jeunes sont souvent ceux qui s’abstiennent le plus le « jour J ».

Alexis Buisson (New York)

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