« Je ne partirai pas sans une solution de repli convenable », prévient Leila Bendib, la présidente des Vêtements du Cœur. Bien décidée à obtenir gain de cause, la soixantenaire au caractère bien trempé est une habituée des rapports de force.

« La décision de la municipalité de récupérer le local sans nous proposer d’alternative est honteuse », poursuit la native de la Duchère. Fin août, elle reçoit un courrier de la mairie l’informant de l’obligation de rendre les clefs de leur local de stockage à compter du 1er septembre, sous peine d’une amende de 100 euros par jour de retard. Depuis, elle ne décolère pas.

Les vêtements du cœur, c’est son bébé. Deux friperies solidaires qu’elle a fait grandir au fil des années. Récupération de vêtements, d’électroménagers, de matériels de puériculture, tri, remise en état et revente à un prix modique pour les plus précaires. Ici, tout ou presque est recyclé.

Un projet de récupération du lieu de stockage

Pourquoi la municipalité souhaite-t-elle récupérer un local après tant d’années de mise à disposition gracieuse ? En cause, un projet de réalisation d’un tiers lieu accessible à l’ensemble de la population et contigu au local de stockage. Ce local sera réaménagé pour répondre aux normes de sécurité du bâtiment.

« On ne remet pas en cause le projet, néanmoins il ne devrait pas se faire au détriment d’une autre association », déplore la présidente de l’association. Et d’insister sur la nécessité d’obtenir un nouvel espace de stockage de même superficie et, de préférence, en rez-de-chaussée.

« Lorsque nous avons rencontré la mairie, fin 2020, ils nous ont informés de ce projet d’aménagement, mais il était convenu que d’autres espaces devaient nous être proposés afin de déménager nos stocks, affirme Leila Bendib. Ça n’a pas été le cas et, aujourd’hui, on nous met à la porte sans proposer d’alternative acceptable ».

La maire d’arrondissement dément ces accusations

De son côté la maire d’arrondissement, Anne Braibant, rétorque que les responsables de l’association étaient informés du non-renouvellement de bail, déjà prolongé par deux fois.

« Lors de notre échange fin 2020, nous avions informé les représentants de l’association du projet de réhabilitation du local, puis évoqué le fait que nous essayerions de leur trouver un autre lieu. Il ne s’agissait néanmoins pas d’un engagement à le faire, eux aussi devaient chercher une solution de leur côté », répond Anne Braibant.

La maire d’arrondissement assure également avoir sollicité la mairie centrale et la métropole afin de pouvoir proposer de nouveaux locaux sur d’autres arrondissements. « Le foncier sur le 9eme arrondissement est très rare », précise-t-elle. « Mais ces locaux ne semblent pas convenir à Mme Bendib », soutient Anne Braibant.

« Qu’on me montre les mails ou les courriers de propositions qu’on m’aurait envoyés », répond, pour sa part, la présidente des Vêtements du cœur. Elle assure que seuls des boxes de garage inadaptés leur ont été proposés et affirme que c’est l’association, elle-même, qui a sollicité la mairie centrale sur le sujet.

Quand on veut faire un beau projet, on essaie de trouver en amont une solution acceptable pour les gens qui doivent partir

La question du projet de réemploi dudit local a été à l’ordre du jour du dernier conseil municipal d’arrondissement. « Quand on veut faire un beau projet, on essaie de trouver en amont une solution acceptable pour les gens qui doivent partir (…) Et surtout, on ne lance pas une mise en demeure par courrier avec amende de 100 euros par jour de retard. Ça ne facilite pas le dialogue », a lancé l’ancien maire d’arrondissement, Alain Giordano, tout en saluant le projet.

Interrogée sur ce courrier de mise en demeure et l’amende de 100 euros par jour de retard, la maire reconnaît une maladresse. « Il s’agit d’un courrier type. Il est évident qu’ils n’auront pas à payer ces amendes. Par ailleurs, nous faisons notre possible pour trouver une solution en sollicitant la mairie centrale et la métropole », assure-t-elle.

Leila Bendib et Adel Hanachi évoquent, quant à eux, des relations tendues depuis l’arrivée des Verts à la mairie, avec un non-renouvellement du label LVED (Lyon Ville Écologique et Durable) et une baisse des subventions quasiment de moitié. « Des miettes de subventions » qu’ils ont par ailleurs refusées, estimant qu’il s’agissait d’un manque de considération pour leur travail.

Avec ses trois salariés, ses nombreux bénévoles et ses partenariats, les Vêtements du cœur représente quelque 70 tonnes de vêtements, 40 tonnes d’encombrants, recyclés et près de 6 000 bénéficiaires en 2021.

Céline Beaury

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