Mon copain s’appelle Jules. Il se fait embêter à l’école, il se fait frapper car il lit tout le temps, et il ne fait pas sa racaille. Personne ne le laisse respirer, tout le monde lui prend ses livres quand il lit. Tout le monde lui dit des gros mots. Dans la classe il y a des élèves qui lui font des doigts d’honneur quand le maître a le dos tourné. Alors Jules s’énerve et les insulte. Mais comme le maître ne voit pas que c’est les autres qui lui ont fait un doigt d’honneur, il engueule Jules. Et c’est comme ça tout le temps.

A la  cantine, comme Jules n’aime pas les yaourts, il dit « qui en veut ? », il y a des élèves qui lui disent « ferme ta gueule et mange ! », et quand il leur répond, ils se lèvent pour le frapper. Jules dit « pardon, pardon » pour qu’ils arrêtent. Des fois je leur dis « vous aimeriez bien être à sa place ? », après ils disent « non, non », et ils arrêtent. Mais y en a qui continent.

Dans la cour, quand il n’a pas de livre, Jules demande aux gens s’il peut jouer avec eux mais personne ne veut le laisser jouer. Donc, résultat, il se retrouve tout seul sur le banc à attendre la sonnerie. Quand je joue des fois, je lui demande s’il veut jouer.

Il y a des élèves qui disent « Jules il est handicapé, lui, avec sa tète de débile », « il pleure pour rien », ou bien, « c’est un pleurnichard ». Moi je dis qu’il pleure parce que les autres, ils le frappent, ils jettent ses affaires par terre, ils tapent sur son cartable. A sa place je serais malheureux.

Les animateurs dans la cour, ils n’interviennent pas, ils sont scotchés sur leurs portables. Eux ils pensent qu’à regarder leurs messages, ils mettent des musiques. Des fois quand on fait rien, ils disent « tiens, toi, viens t’asseoir », pour faire genre « ouais je surveille la cour ». C’est comme ça depuis qu’on est en en CP. Cette année, on est en CM2 et Jules est content parce qu’il va bientôt partir de cette école.

L’autre jour ma mère m’a dit que la mère de Jules lui avait dit que Jules doit voir un psychologue chaque mercredi à cause de tout ça. Il doit être mal à l’aise. Alors maintenant, moi, j’interviens plus qu’avant. Je le défends quand il a des problèmes et que les gens le frappent. Je leur dis d’arrêter une fois, et s’ils recommencent je les menace de les frapper ou d’aller le dire. Et s’ils arrêtent pas du tout, je les frappe, après ils partent et ils recommencent plus.

Je souhaite que Jules ne se souvienne plus jamais de ça et que, au collège, ça se passe bien pour lui. Je pense que ça se fait pas, tout ce qu’ils lui font, les autres.

Ali, élève en CM2

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