On pensait Nicolas Sarkozy préoccupé par les industries françaises. C’est bel et bien peine perdue pour PSA… Après avoir volé au secours de Lejaby, Photowatt et plus récemment ArcelorMittal de Florange, Nicolas Sarkozy semble avoir mis ses engagements de côté concernant le constructeur automobile. Après avoir affirmé qu’il ferait de PSA « une affaire d’Etat », le Président de la République n’a plus donné signe. Aucune réponse à la lettre qui lui a été envoyée par l’ensemble des syndicats à la mi-novembre. D’autres politiques, comme François Hollande, ont exprimé leur soutien sans réellement prendre de réels engagements.

Plus de 2 000 personnes, selon les syndicats, ont défilé dans les rues du centre ville d’Aulnay-sous-Bois samedi dernier. L’ensemble des organisations syndicales du géant automobile a appelé à une manifestation commune. Point de départ : Place du Général de Gaulle, gare d’Aulnay-sous-Bois. Dans le cortège, des employés d’autres sites de PSA (Sochaux, Poissy) ont fait le déplacement par solidarité avec leurs collègues. Un groupe d’étudiants et quelques politiques  – essentiellement de gauche – ont suivi la marche : le maire de la ville Gérard Segura (PS), à ses côtés Claude Bartolone (député de Seine-Saint-Denis et Président du Conseil Général du département) Nathalie Arthaud (Lutte Ouvrière) accompagnée d’Arlette Laguiller, Philippe Poutou (NPA), Martine Billard (co-présidente du Parti de Gauche) pour représenter Jean-Luc Mélenchon et Stéphane Gatignon maire de Sevran (EELV). Certains employés sont venus en famille, avec leurs enfants, des habitants de la ville étaient là également.

« De l’argent il y en a dans les caisses de PSA ! », c’est l’un des slogans répété par des manifestants tout  au long de la marche, sous une pluie fine.  « Une chance », « il y a de l’espoir ». L’usine ne doit pas fermer selon eux, ils y croient dur comme fer.  Philippe Poutou aussi : «  La seule chose qui compte c’est quand on se bat, le vrai combat c’est le rapport de force » affirme-t-il tout en revenant sur ce qu’il a vécu à Ford de Blanquefort (Gironde) avec la sauvegarde des emplois, raison pour laquelle il leur apporte sa « solidarité ».  Pour Nathalie Arthaud, « les salariés ne sont pas encore au pied du mur ». Elle ajoute : «  Je les soutiens ! Je pense qu’en période de crise on devrait interdire les licenciements ».

Mohamed,  jeune employé depuis 8 ans à PSA  y croit moins  en voyant « tous ces gens qui partent » au fur et à mesure, « il y a une certitude de fermeture » se désole-t-il. Si PSA ferme, Mohamed pense qu’il devra faire face à « une mutation ». Se reconvertir dans un autre domaine ? « C’est possible » pour ce diplômé d’un baccalauréat littéraire. Moins compliqué quand on est jeune mais lorsqu’on est plus âgé, est-on du même avis ? Pas si sûr… Un père de famille m’explique, « quand vous passez plus de 30 ans de  votre vie à travailler dans une usine c’est pas à l’approche de votre retraite que vous allez  vous reconvertir dans un autre métier ! »

Arrivé à l’hôtel de Ville d’Aulnay-sous-Bois, l’ensemble des manifestants se rassemble devant les syndicats et politiques, qui ont pris la parole tour à tour, depuis le haut des escaliers de la mairie.  « Faut pas venir uniquement pendant l’élection présidentielle ! » crie un homme aux politiques. Jean-Pierre Mercier, délégué CGT du groupe PSA ouvre le bal, l’émotion dans la voix, « ça fait chaud au cœur de vous voir rassemblés contre la fermeture de PSA Aulnay ». Il adresse ses remerciements aux habitants de Seine-Saint-Denis « venus soutenir leur combat », à la municipalité, à ses collègues de Poissy, Mulhouse et Sochaux qui ont manifesté avec eux aujourd’hui. « Quel que soit le résultat de la présidentielle, nous devons compter sur nous-mêmes ! » s’exclame le cégétiste. L’ensemble des syndicats demande toujours la garantie des emplois jusqu’en 2016 et l’attribution d’un nouveau véhicule. Chacun d’eux rappelle la lettre envoyée au président Nicolas Sarkozy, en novembre 2011. Une lettre restée sans réponse…

Le maire d’Aulnay-sous-Bois, Gérard Segura se demande « où est passé le député UMP de la circonscription, Gérard Gaudron ? » Claude Bartolone, quand à lui, se fait huer par une partie de la foule lors de son intervention. On apprend que François Hollande a répondu à la lettre envoyée par les employés de PSA. « Il est où ? » s’exclame une partie du public.

Parmi la foule, Chriso écoute attentivement. Il est venu en double soutien : il habite la cité de la Rose des vents (les 3 000) et en tant que représentant du Parti de gauche dans la ville. « PSA représente un emploi de proximité. Pour Aulnay, sa fermeture serait une catastrophe économique » argumente-t-il, lui qui a travaillé en intérim pendant 6 mois à PSA, il y a 20 ans. « J’ai craqué c’était trop dur ».

Un groupe brandit une pancarte, « étudiants solidaires des ouvriers de PSA ». Danielle en fait partie. Cette étudiante en master 1 de sciences politiques se sent elle aussi concernée par la situation de PSA. « Notre fac est dans le 93, un département ravagé par le chômage des jeunes », elle évoque aussi « le souvenir de mai 1968 » où les étudiants étaient solidaires des salariés. Nicolas est lui aussi étudiant. Sa solidarité avec les salariés de PSA il la voit  plus largement : « On est les futurs travailleurs, même maintenant avec des diplômes c’est dur. Ensemble on peut créer un rapport de force ». Sebastian, étudiant à l’Ecole Normale Supérieur de Paris, évoque lui « la force des étudiants » et le « besoin de cette alliance » avec les salariés.

Quelques jours après la manifestation, quelles sont les réactions de la direction de PSA et des politiques ? « Aucune », répond Jean-Pierre Mercier. François Hollande a répondu à la lettre envoyée par les syndicats avant la manifestation de samedi. « Il souscrit à notre revendication […] et reste attentif à l’évolution de la situation mais il n’a pris aucun engagement » explique-t-il sans étonnement. « Aujourd’hui, on doit se battre nous-mêmes » affirme ce syndicaliste convaincu.

Imane Youssfi


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