Avez-vous déjà vu ces ballons éclairés par des leds aux multiples couleurs et tenu au bout d’une tige ? Certainement, sur le Champ de Mars ou au Trocadéro, au milieu des tours Eiffel miniatures et autres babioles. Des scènes que l’on ne voit pas du côté de Bobigny ou de Bondy. Mais ces dernières années, les fameux ballons lumineux, prisés par les enfants, et vendus pour quelques euros, ont petit à petit fait leurs apparitions dans les villes de banlieues.

Régulièrement, au carrefour du pont de Bondy, des vendeurs déambulent entre les voitures avec, dans les mains, des ballons lumineux. D’où viennent ces hommes ? Pourquoi vendre ces ballons lumineux ? D’où proviennent ces ballons ? Et pourquoi venir ici, à Bondy ?

Voici les questions qui fusaient dans notre esprit. Sur ces nombreuses interrogations, nous avons décidé d’enquêter sur les mystérieux vendeurs de ballons. Nous allons vous raconter une véritable épopée de plusieurs mois à travers le froid, la galère des transports franciliens et les « flops ».

La longuuuuue quête

Novembre 2022, tout fraîchement arrivés au Bondy blog, notre quête des hommes aux ballons lumineux commence. Nous sommes sortis plusieurs fois en voiture, à pied et en transports afin de les trouver, quitte à faire plusieurs fois le tour de la ville. Nous étions aux portes de l’hiver et aucun homme aux ballons n’était de sortie. Après avoir essuyé plusieurs échecs, des « flops », nous avons repris nos recherches quelques semaines plus tard avec un petit espoir de les apercevoir.

Un soir d’avril 2023, on décide de retenter l’aventure au Pont de Bondy. Il nous suffira de seulement quelques minutes pour trouver un de ces hommes aux ballons lumineux. Nous étions au même endroit au même moment : le mektoub nous avait réunis.

Ce soir-là, nos espoirs ont douché par la barrière de la langue. En effet, ce vendeur ne parlait ni français ni anglais. Malgré cela, il nous a indiqué par des gestes qu’il acceptait d’être photographié. Couvert de cicatrices impressionnantes dans le dos et amputé de deux phalanges à la main gauche, son corps était le témoin d’une vie difficile.

Cette fois, c’est un demi-flop

Dans les mois qui suivirent, soit de mai à août 2023, nous recevions des photos de nos collègues qui croisaient souvent nos insaisissables vendeurs de ballons, au moins une fois par mois. Mais pour nous impossible. Les allers et retours entre le pont de Bondy, la gare de Bondy et le quartier Pablo Picasso à Bobigny n’ont rien changé, rien. Ce sujet devenait interminable.

Dix mois d’enquête et presque rien. Un soir, nous n’avions plus qu’une chose en tête : clôturer ce sujet. La semaine suivante, avant la conférence de rédaction, nous fonçons au pont de Bondy en espérant que cette fois, ce sera la bonne. Arrivés à destination, nous avons crié notre joie de voir cet homme à travers une expression à consonance arabique très connue : Al Hamdoulillah !

Nous allions à sa rencontre, mais comme le premier homme, lui non plus, ne parlait pas français, il parlait une langue d’Asie du Sud appelée Panjabi. Par chance, nous trouvons à travers notre carnet d’adresse, un contact qui maîtrise cette langue et nous faisons alors cette interview avec comme intermédiaire notre traductrice au téléphone. Enfin, nous avons pu avoir les réponses qu’on attendait.

Le dur quotidien de M. Singh

Cet homme s’appelle M. Singh (le nom a été modifié), un homme d’une quarantaine d’années, originaire d’Inde, de taille moyenne, une personnalité en apparence réservée. Dans ses mains, les fameux ballons lumineux, devenus un peu notre saint Graal. Dans l’attente de ses papiers, M. Singh essaye tant bien que mal de gagner sa vie en vendant des ballons afin de payer son loyer et subvenir à ses besoins.

Comme d’autres vendeurs de ballons lumineux, il dit se fournir depuis l’Inde par voie postale. Son travail, de subsistance, est rythmé par le bruit des véhicules, des passants, du tram juste au-dessus et par les interventions de la police qui viennent lui saisir de temps en temps sa marchandise, sa seule ressource pour vivre.

Avec un train de vie difficile et de lourdes dettes, M. Singh ressent comme un regret d’être venu en France, malgré son rêve de trouver une vie meilleure pour lui et sa famille. En attendant d’avoir ses papiers et ainsi trouver un boulot stable, M. Singh continue sa vente de ballons lumineux pour quelques sous, faute de mieux.

L’histoire de M. Singh est très probablement l’échantillon d’une réalité partagée par tous ces hommes vendeurs de ballons lumineux. Notre quête aux hommes vendeurs de ballons lumineux s’achevait ici.

Thidiane Louisfert et Sélim Kourchi

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